J’en ai déjà parlé ici, mon père ne fait plus parti de ma vie depuis une vingtaine d’années. Mes parents ont divorcé lorsque j’avais 1 an, puis j’ai vu mon père un week-end sur deux pendant quelques années. Vers 7/8 ans, ma soeur et moi n’y allions que très rarement, pour les vacances et à 9 ans, nous avons stoppé les visites. Ma mère et lui se déchiraient, de vieilles rancoeurs qui nous ont atteintes ma soeur et moi. Et nous avons toutes deux grandi sans père.
Par la suite, j’ai revu mon père 4 fois. La première fois, j’avais 12 ans, le lendemain de mon anniversaire, il est venu car il passait par là, nous sommes allées dans un magasin de vêtements, il m’a offert un pull vert et m’a donné 100 Francs. La deuxième fois, j’avais 19/20 ans, je ne sais plus vraiment… Il refusait de continuer à payer la pension alimentaire alors que j’étais étudiante, nous sommes allés au tribunal, j’étais assise à 10 mètres de lui dans un couloir, il ne m’a pas adressé la parole, pas regardé une seule fois… Je l’ai haï ce jour là, de m’avoir abandonné, de ne pas m’aimer, de m’ignorer comme une parfaite inconnue. La troisième fois, c’étais aux funérailles de mon grand père, son père, nous ne nous sommes pas parlé, le goût amère de notre dernière rencontre m’empêchait d’aller vers lui, et sa fierté l’empêchait de venir vers moi. La dernière fois, c’était il y a quelques mois, entre-temps ma soeur avait repris contact avec lui, ma grand-mère paternelle mourait et je suis allée à son enterrement avec ma soeur. Et là, bien qu’il ne m’ai pas parlé depuis quasiment 20 ans, mon père s’est comporté comme si on avait déjeuner ensemble la veille, à m’embrasser comme du bon pain, à m’appeler “ma puce”. Énorme choc, il préférait agir comme si de rien était… Depuis on s’appelle de temps en temps, pour mon anniversaire, le sien, les voeux de nouvel an…
Il y a deux semaines, je prenais le train pour aller bosser et j’ai décidé comme ça que j’allais rendre visite à mon père. Je voulais y aller avec mon copain, il est neutre, il ne parle pas français, l’attention serait donc sur moi! (Et oui, face à ma soeur, j’avais peu de chance de recevoir de l’attention, mais c’est une autre histoire…) Samedi, nous sommes allés chez lui, pour le déjeuner, ça s’est bien passé, même s’ils ont une image faussée de moi, celle de la petite fille de 6/7 ans, boudeuse, colérique, gourmande (ça ça n’a pas changé!), bordélique… comme si cette petite fille que j’étais n’avait que des défauts…
Ma thérapeute dit souvent que si j’étais si chiante c’est certainement que j’étais très malheureuse.
J’ai donc revu mon père, rencontré cet homme que je ne connais pas et qui ne me connait pas non plus, on a parlé de nos vies, et j’imaginais la mienne si mes parents ne s’étaient pas séparés. J’aurais fait du vélo le dimanche matin avec lui, il m’aurait botté les fesses pour que je continue mes études, on aurait voyagé plus et vu notre famille. Mais ça n’aurait jamais marché, mes parents se ressemblent trop, hyperactifs, le boulot passe avant tout, il a besoin d’une femme à la maison qui cuisine, qui lave ses chemises, elle a besoin d’indépendance, et tant pis si elle mange du pain avec du fromage tous les soirs quand elle rentre du travail à 21h…
Ils n’étaient pas fait l’un pour l’autre, ça se voit, je le vois, ils n’ont pas divorcé à cause de moi… Ils ont divorcé à cause d’eux!
(alleluia! 32 ans pour en arriver à cette conclusion…)