Les Chiens et les Loups d’Irène Némirovsky

Par Etcetera

Sachant qu’Irène Némirovsky est un grand écrivain et n’ayant jamais lu de livre d’elle, je me faisais une joie de découvrir Les Chiens et les Loups.
J’ai été assez déçue : c’est un roman bien sûr intéressant mais ce n’est pas le chef d’œuvre bouleversant annoncé en quatrième de couverture.

L’histoire s’articule autour de trois personnages, juifs, et cousins à des degrés divers :  Ada, intelligente et sauvage, Ben, avec lequel elle est élevée, débrouillard et arriviste, et Harry, riche et sensible, dont Ada tombe éperdument amoureuse dès l’enfance et dont elle parvient à conserver le rêve intact jusqu’à l’âge adulte.
On comprend assez vite que Les Chiens et les loups mêle des éléments autobiographiques et des péripéties inventées : à un passage saisissant et très fort peut succéder un épisode superficiel ou cousu de fil blanc.
Ce mélange entre le réel et l’imaginaire saute vraiment aux yeux et donne une impression disparate.
On regrette qu’Irène Némirovsky n’ait pas opté pour une vraie autobiographie – qui aurait certainement été très belle.
J’ai beaucoup aimé la première partie du livre : celle où Ada et Ben sont encore enfants, dans l’Ukraine des ghettos et des pogromes. Leurs jeux, leurs peurs et leurs rêves sont restitués d’une manière très évocatrice. Et les différents membres de la famille sont très bien caractérisés, même si leur rôle est épisodique.
Curieusement, en devenant adultes, et immigrés dans le Paris des années 30, Ada et Ben semblent perdre de leur profondeur et se figer dans des stéréotypes, en même temps que l’histoire dévie vers des rebondissements invraisemblables.
Quant au personnage d’Harry, c’est une sorte de pantin creux, qui fait à peu près tout ce qu’on attend de lui au moment voulu.

Par ailleurs on voit bien qu’Irène Némirovsky cherche à exprimer la profonde angoisse des juifs pendant l’entre deux guerres, et à analyser la manière dont les épreuves et les injustices ont modelé leur tempérament et leur force de caractère. Mais le mélange de ces réflexions graves, de ce cadre dramatique, avec une histoire d’amour assez mièvre donne un résultat discordant, voire carrément gênant.

Ceci dit, je ne déconseillerais pas ce roman : beaucoup de passages méritent d’être lus, l’écriture est très belle, les descriptions sont évocatrices, et la restitution de l’atmosphère et de l’état d’esprit de l’époque est intéressante.