En tant que dirigeant, en tant que responsable d'équipe, le but est avant tout de remplir des objectifs quantitatifs et qualitatifs précis. Si les Hommes composant l'entreprise sont indispensables, alors les questionnements autour des talents comptent.
Des "top talents" aux "talents"
LES talents, oui. Il convient de revisiter la conception dominante lorsqu'on entend parler de talent. En général, on évoque les "top talents". Cette vision a pour ambition de tirer les personnes vers le haut (en termes de performance) et de mettre en avant les capacités individuelles. Les limites de cette vision résident dans le fait qu'une atmosphère concurrentielle nocive peut s'installer en interne, avec des luttes de pouvoir et des rivalités pour apparaître dans la liste des "top talents", des "top performers".
Et le sens de l'équipe ? Et les autres salariés ? Ils existent.
Ils ont très certainement des habilités supérieures dans certains domaines et qui leur permettent d'être efficaces à leur poste.
Ici, cela n'a rien à voir avec le fait d'avoir un focus sur les "top talents", mais sur les talents tout court. Et c'est plutôt une fierté de travailler et d'être entouré de personnes talentueuses, de confiance, quelque soit leur niveau hiérarchique.
Il serait plutôt méprisant et maladroit de penser que l'on travaille, que l'on collabore, avec une élite et que le reste n'est qu'une force de travail indifférenciée ou sans rôle majeur.
Une vision humaine passe justement par un autre positionnement et une autre lecture de l'organisation humaine. Avons-nous la toute puissance composée de l'équipe dirigeante et de l'élite ? Existe-t-il de forts signes de distinction ?
Au fond, qui contribue à la performance globale de l'entreprise ?
Le "tout prêt, tout chaud" : le barrage à l'humanisation
Le "tout prêt, tout chaud" est un piège pour la performance et le développement des talents composant les équipes. Ceci renvoie à une perception très industrielle du talent, de la personne.
Cette vision du "tout prêt, tout chaud" pèse à différentes étapes du management des talents. Ainsi, il y aurait une attraction pour des profils connus et plébiscités. Point de surprise.
Seulement voilà, le "tout prêt, tout chaud" a ses limites dans le sens où les autres employeurs oeuvrant sur les mêmes espaces partagent un point de vue similaire. Il y a cette sur-focalisation sur un groupe de personnes, au détriment d'autres plus atypiques mais à gros potentiel. Cela ne signifie pas qu'il faille oublier ce premier groupe, mais plutôt d'avoir une vue plus équilibrée.
Dans la phase qui suit l'intégration (l'onboarding), vient celle de développement, soit un travail de longue haleine et durable. Avoir un nouveau "talent" dans l'entreprise est loin d'être la fin du voyage. Ce dernier peut faire le choix de quitter l'entreprise pour des motivations personnelles, et voilà qu'un nouveau cycle de recrutement est à mettre en place au plus vite. D'avance, la problématique du coût est visible.
Le développement de talents : le cadrant "Révélation"
Voilà un thème crucial ! Quel travail de l'équipe de management pour révéler des talents ? Quel travail de la personne-même pour révéler ses talents ? La dynamique n'est pas unilatérale et contient des retours positifs pour l'entreprise comme pour l'individuel, pour le collectif comme le particulier.
Ainsi, il y a également une part de développement personnel où le salarié va vers une meilleure connaissance de soi.
Un seul mot : challenge.
Challenger pour progresser. Suggérer des sorties de zone de confort. Il n'est pas impossible d'entendre parler de talents ayant fait le tour de leur poste et s'ennuyant à cause d'une absence de challenges. Si les conditions d'évolution sont absentes (pas forcément verticales), il y a de grandes chances pour qu'ils choisissent finalement de quitter l'entreprise.
Bien évidemment, challenger sur les 100% de temps de travail peut paraître excessif. Une part raisonnable semble tout de même être intéressante. Et le mouvement peut également être inverse, c'est-à-dire "challenger l'équipe dirigeante" dans le design d'un environnement de travail stimulant; tout ceci dans le but de s'installer dans une logique de progression, bénéfique pour l'ensemble.
Matrice R.A.C.I ?
Lors d'une discussion avec un ami travaillant pour un grand cabinet de management, nous avons évoqué la matrice R.A.C.I et échangé sur son utilité. Souvent employée pour de la gestion de projet, elle permet de délimiter les zones de responsabilité et d'attente pour une optimisation de l'exécution.
Derrière les sigles :
R pour R esponsible (la ou les personnes en charge de l'exécution d'une ou plusieurs tâches du projet)
A pour A ccountable (la personne responsable des résultats et en charge des prises de décision)
C pour C ontributing/Consulted (les personnes dont on demande l'opinion, les "spécialistes" de certains sujets spécifiques)
I pour I nformed (les personnes qui doivent simplement être informées des avancements)
Après le passage en revue de chaque élément de la matrice R.A.C.I, quels seraient les points de convergence avec le "travail" de révélation des talents ?
Tout d'abord, l'organisation sous forme de projets multiples n'est pas très loin de celui de la plupart des entreprises.
Ensuite, les potentialités d'usage de cette matrice résident surtout dans le positionnement. En effet, on observe bien que la position A est celle du chef de projet. A l'opposé, la position I contient des rôles plus passifs, finalement assez éloignés de l'exécution-même.
Dans l'idée de la révélation, l'idée est de positionner les talents sur un projet inhabituel mais cohérent avec leur portefeuille de compétences et leurs aspirations. Le but est certes d'avoir un résultat satisfaisant (selon des indicateurs de performance précis) mais aussi de donner la chance de se jauger sur quelques compétences nouvelles, pour finalement acquérir ces dernières sur le long terme.
I.C.R.A et mise en action
Au-delà du jeu de forme, la matrice I.C.R.A constitue une trajectoire intéressante pour le processus de révélation.
Ainsi, entrer en "position I" est une prise de risque moindre pour l'exécution du projet. Ceci consituerait une phase d'exploration, de découverte pour le talent, qui jouera uniquement le rôle d'informé.
La "position C" est une étape supérieure, et c'est là où l'on peut demander au talent de d'activement contribuer en donnant régulièrement son opinion. C'est aussi ici une manière progressive de proposer un rôle plus important.
La "position R" marque une prise d'action plus poussée et la participation concrète à l'exécution. Ici, on peut avoir plusieurs niveaux graduels, de manière à ne pas avoir un passage trop brutal de la contribution aux prises d'action.
La "position A" est managériale, avec une prise de responsabilité encore plus importante, et demande une vue élargie sur les problématiques et un rôle de pilotage des différentes actions pour optimiser l'exécution du projet.