Il y a toujours un sourire
Dans chaque terre étrangère
Lointaine
Qui nous rend amis
Sans se connaître
Sans jamais nous parler
Séparés par des montagnes navigatrices
Océans fondus
Guerres inattendues
Exodes interminables
Entre soleil et poussière
Et accablantes maladies
Mais ton sourire est là !
Et il sera toujours là !
Mama noire
Mama-terre
Chaleureuse
Gentille
Simple
Maternelle
La plus humaine !
Elle qui a vécu comme les arbres
Pour fleurir et rafraîchir avec une ombre solennelle
Son propre peuple
Les emportés du sable et de l’illusion
Jeunes de village qui préparent leurs tristes
Et derniers vêtements
Avant de partir et de se jeter dans l’extension vorace
De l’exode et de l’aventure
Comme unique vision
Mama noire
Mama-terre
Entre ciel parfumé à la menthe
Entre rochers caressés par la mer
Parfumés d’algues, de poisson et de sel
Ou entre la terre perdue de la géographie
Qui sent le bois calciné
Et qui se dessèche
Au fil des années
Entre tes mains et tes pieds
Creusés par un temps
Sans écho
Mais
Ton sourire est là !
Et il sera toujours là !
Mama noire !
Mama-terre !
Avec ton parfum de vie !
Avec tes enfants
Tes petits-enfants et tes chèvres
Avec la farine naturelle
De tes jours et tes nuits intemporelles
Qui te rendent chaque jour
Plus belle !
Enveloppée d’ancienneté
Parsemée de rêves
Qui coulent invisiblement de ta rétine acérée
Qui me regarde avec sa peau
De pénombre douce
Comme une source intarissable
De ma petite condition
Qui viens vers toi
Pour apprendre à sourire
Comme toi
Mam noire !
Mama-terre !
Et l’inachevé de la vie
Avec les mots humbles de ta féminine simplicité
Que tu chantes
Quand tes ancêtres ne te parlent plus
Que tu chantes
Quand le vent t’amène de mauvaises nouvelles
Tu es la présence de la couleur infinie
Mama noire !
Mama-terre !
Couleur qui défie le soleil qui s’abat
Sur tes épaules et généreux dos et bras
Tu traverses chaque matin la brousse
Et les champs moribonds
A la recherche d’une goutte d’eau
Mais tu ne quitteras jamais ton village
Je le sais
Sans le savoir
Tu resteras auprès de tes enfants
Sans ton mari
Qui a péri en transportant de vieux cartons
Et quelques branches desséchées
Comme nourriture essentielle
Et tu frappes le blé –
Sans tes frères
- Tu frappes le blé –
Sans aucun autre amour
-Tu frappes le blé-
Sans aucun autre espoir
-Tu frappes le blé-
Pour demain
Mama noire !
Mama-terre !
Tu frappes tes rêves
Ton enfance et ta vieillesse
Comme en exorcisant
Le soleil et les hommes
Qui ne cessent de tout saccager !
-Tu frappes le blé !-
Mama noire !
Mama-Terre !
Pablo Poblète.
Paris, 2011.