La Défense française en constante évolution.
C’est un perpétuel recommencement : au fil des temps, la Défense doit s’adapter à une géopolitique mouvante, actualiser les moyens militaires qu’elle met en œuvre, en développer d’autres parce que, selon l’incontournable expression, le monde change. Voici déjà venu le moment d’actualiser le dernier Livre blanc et de réorienter ce qui doit l’être, notamment pour prendre en compte le durcissement de la menace balistique, l’aggravation jugée considérable des cyber-menaces et ce qu’il est pudiquement convenu d’appeler les nouvelles puissances.
En matière de Défense, rien n’est simple, à commencer par l’application des technologies les plus avancées, les cycles longs en termes d’études, de développement puis de production. Ainsi, aujourd’hui, la DGA, délégation générale pour l’Armement, se penche sur le réexamen de la loi de programmation militaire, 4 ans à peine après son début d’exécution. Elle réfléchit et prépare des systèmes d’armes nouveaux comme le drone franco-britannique MALE, l’aviation de combat telle qu’elle se présentera à l’horizon 2030 ou encore ce qu’il est convenu d’appeler les capacités ISR, intelligence, surveillance et reconnaissance.
Entre-temps, le renouvellement des moyens mis en œuvre se poursuit : Rafale, missile balistique M51, Aster, MM40, Mica, ASMPA (air-sol moyenne portée amélioré), hélicoptères Tigre et NH-90 (notre illustration), bâtiments de projection, etc. L’année dernière, la DGA, qui fête ses 50 ans, a investi 10,7 milliards d’euros dans l’industrie au titre des programmes et de la recherche. Son rôle est essentiel mais, par définition, discret. Laurent Collet-Billon, son délégué général, rappelle que la DGA affiche un modèle unique dans le monde administratif français et constitue plus que jamais «un outil agile, réactif et performant au service de la décision politique et de l’investissement de l’Etat».
Ce commentaire est formulé au moment où est rendu public son bilan 2011, dont celui des prises de commande à l’exportation, un peu plus de 6 milliards d’euros. Ce résultat s’inscrit dans la continuité des années précédentes, susceptible de progresser fortement dans l’hypothèse où le Rafale confirmerait les succès qu’on lui prête sur le marché indien et, peut-être au Brésil et ailleurs. Des exportations soutenues, outre leurs effets bénéfiques sur l’emploi et le commerce extérieur, permettent d’allonger les séries, de réduire les coûts de production et sont donc bienvenues.
Ce triple impact justifie des efforts importants, d’autant qu’ils ne sont pas réservés aux seuls maîtres d’œuvres. En témoigne, par exemple, l’initiative RAPID, Régime d’appui aux PME pour l’innovation duale. C’est un monde qui a ses codes, parfois hermétiques : BITD, Base industrielle et technologique de la Défense, PEA, programme d’études amont, etc. Et qui procède à des démonstrations technologiques généralement discrètes.
En témoigne, par exemple, Essaim, expérimentation de recueil de renseignements électromagnétiques dans les télécommunications, qui repose sur quatre microsatellites mis en orbite à 700 km d’altitude. Ou encore Espadon, démonstration technologique dans la robotique navale. Ce sont des affaires de spécialistes qui sont parcimonieusement mises sur la place publique, tout comme l’entrée en service de NH-90 Caïman, la fin de la transition entre missiles ASMP et ASMPA et les premières livraisons de CN235-300M destinés à atténuer le manque de capacité de transport né du début du retrait des Transall et à l’arrivée tardive des premiers A400M.
Pour la DGA, 2012 s’annonce comme l’année des choix. Mais, tout bien réfléchi, c’est là une situation permanente, dans un contexte évolutif.
Pierre Sparaco - AeroMorning