C’est étrange une passion. Cela vous tombe dessus sans crier gare. C’est tellement fort que l’on pense être le plus passionné au monde. Cela ne s’explique pas, et pourtant on pourrait citer mille raisons pour lesquelles la passion nous a un jour pris à la gorge. C’est l’effet que me fait le cinéma depuis un petit paquet d’années maintenant. Quelque chose d’irraisonné, parce que la raison n’a rien à voir là-dedans. Il y a des jours où je me dis que je pourrais passer ma vie à aller voir des films et cela suffirait à me rendre heureux. D’autres où je me dis que si je ne finis pas Délégué Général du Festival de Cannes, c’est que le monde ne tourne décidément pas rond. Et surtout, tous les jours, depuis tant d’années, de nouvelles raisons se font jour et viennent entretenir ma passion.
Il y a quelques semaines, je découvrais ce billet sur un site américain, dans lequel un autre passionné listait toutes les raisons pour lequel il aime le cinéma. Et évidemment, en lisant cela, je me suis dit que c’était une des meilleures idées que le monde ait jamais porté (oui je sais j’ai toujours des petites tendances à l’excès dans mon enthousiasme). Seulement voilà, je me connais. Je sais que si je me lance dans un billet somme comme celui-ci, je ne le finirai jamais. Je passerai des années à l’alimenter jusqu’à ce que je me réveille en 2016 en me disant « Oups, il serait peut-être temps que je le mette en ligne ce billet qui fait désormais 467 pages…
Du coup j’ai décidé de m’y prendre autrement. Comme cela reste la plus grande idée que le monde ait porté et que je n’ai pas envie de m’enliser dans un billet que je n’arriverais jamais à conclure, pourquoi ne pas en faire un billet récurrent ? Régulièrement, écrire quelques raisons pour lesquelles j’ai le cinéma dans la peau. Et c’est aujourd’hui que cela commence. Alors, pourquoi j’aime le cinéma ?
Parce qu’aller au cinéma en sortant de l’école, c’est quand même mieux que faire ses devoirs, même pour voir un film d’auteur en VO alors qu’on n’aime pas ça.
Parce que si tout Hollywood voulait jouer dans La ligne rouge, moi j’aurais tué père et mère pour le voir avant tout le monde. Et comme je ne pouvais pas, j’ai regardé la bande-annonce 78 fois (à peu près).
Parce que quand j’étais gamin, je pensais que Charles Bronson était un gros ringard. Et puis un jour j’ai vu Il était une fois dans l’Ouest.
Parce que Peter Sellers se lève d’une chaise roulante en criant « Mein Fuhrer, I can walk ! ».
Parce que « La chanson d’Hélène », c’était pas au Club Dorothée, c’était Les choses de la vie.
Parce que personne ne se risquerait à manger un poulpe vivant pour de vrai.
Parce qu’à 88 miles à l’heure, la DeLorean retourne vers le futur. Ou vers le passé. Sur terre ou dans les airs. Avec du plutonium, ou un éclair. Et même avec les ordures de la poubelle.
Parce que c’est le seul endroit où je peux croiser Gong Li.
Parce que j’espère toujours que Meryl va ouvrir la portière et rejoindre Clint, même si cela tuerait le film.
Parce que j’ai vu tant de choses que vous, humains, ne pourriez pas croire. De grands navires en feu surgissant de l’épaule d’Orion. J’ai vu des rayons fabuleux, des rayons C briller dans l’ombre de la porte de Tannhauser. Tous ces moments se perdront dans l’oubli, comme les larmes dans la pluie. Il est temps de mourir.
Parce que Tony Leung murmure son amour impossible entre deux pierres, et que c’est le geste le plus beau et le plus triste qui soit.
Parce qu’aller voir le nouveau Disney de Noël au Grand Rex tous les ans avec la Féérie des Eaux quand on est haut comme trois pommes, ça met des rêves plein la tête.
Parce que quand la fanfare de la 20th Century Fox retentit, je bas la mesure sur mes cuisses comme si j’étais seul dans la salle.
Parce que jusqu’ici, tout va bien.