« Soyons du petit nombre de ceux qui croient
" en esprit et en vérité "
qu’un seul homme, quelle que soit sa race,
a une valeur infinie. »
Mardi 12 avril 1955
Ce Concerto pour piano en si bémol (n° 27) entendu hier à la radio, j’avais oublié qu’il était le dernier que Mozart ait composé. Or j’ai reconnu dès le premier mouvement un certain accent propre à ses oeuvres des approches de la mort. Je ne m’y trompe jamais.
On ne saurait parler de désespoir. C’est une plainte, mais qui ne s’adresse plus aux hommes, qui n’espère plus toucher ces coeurs de pierre. Une plainte qui n’est que pour Dieu, un reproche d’enfant perdu dans la jungle et qui n’a pas été adopté par les fauves : les fauves polis de ce siècle des grâces, les pires de tous.
Cet enfant n’est en rien semblable aux enfants que nous avons été, ni à ceux qui nous entourent et qui demeurent tels que La Bruyère les a vus.
Nous feignons d’oublier que chaque génération d’enfants porte en germe tous les goujats, toutes les crapules et tous les mufles de demain. Mozart est un enfant venu d’une autre étoile, bien qu’il ait ressenti toutes nos passions, mais sans y rencontrer de partenaires de son espèce : un Papageno sans Papagena.
Il s’en tirait en divertissant les autres et en jouant pour cacher ses larmes. A la fin, elles ruissellent sans fin, même à travers les joyeux presto du finale, et il ne les essuie plus. Un enfant, jusqu’à la fin, mais un enfant crucifié dont le petit cadavre va être jeté à la fosse commune.”
Bloc Notes de François Mauriac
« L'art est un pressentiment de l'éternité. Remercions Dieu de ce qu'il nous a donné le pouvoir d'entendre la parole et le chant de ses messagers : Mozart, Bach, Baudelaire », écrivait Mauriac à son fils Jean en 1940.
« Lorsque je l’ai entendu pour la première fois en 1933, la grande vague qui nous a ramené Mozart commençait à peine de déferler. [...] Ce n’est d’ailleurs pas le snobisme qui, en peu d’années, a fait de Mozart un musicien universellement aimé. Ne passons pas sous silence une cause toute matérielle : Mozart est, entre tous les maîtres, celui que le disque a le mieux servi. Mais il y a une plus profonde raison : le malheur des temps. L’ère atomique et concentrationnaire est consolée par un enfant. C’est pour nous que Mozart est venu, pour que nous ne doutions pas qu’elle existe, cette âme, notre âme pareille à la sienne, aussi exigeante, aussi tendre, aussi perdue, au milieu d’un monde qui la nie. Notre âme... mais d’où vient-elle ? »
François Mauriac, D’un bloc-notes à l’autre (1952-1959).
Concerto pour piano n° 27, en si bémol majeur, K 595, W.A. MOZART? ?
Aleksandar Madžar, sur piano Bösendorfer. Royal Philharmonic Orchestra, direction André PREVIN.Premier mouvement. Allegro.http://fr.youtube.com/watch?v=RCYidpqARG…
http://fr.youtube.com/watch?v=TTtVHJEPjG…Deuxième mouvement. Larghetto.
http://fr.youtube.com/watch?v=4R8mBUnT4_…Troisième mouvement. Allegro.
http://fr.youtube.com/watch?v=BD2ZdVSe2v…
posté le 08 décembre à 11:43
Uno dei più belli scritti su Mozart dal grande scrittore François Mauriac, ben primo che Mozart sia stato ridicolizzato e presentato come un semi deficiento nel film (a successo commerciale) "Amadeus"!