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Le vieux, ce nouveau jeune

Par Ladecool

Avant il y avait les vieux. Les vrais. C’était facile de les reconnaître : ils portaient des rides, achetaient des Damart dès qu’il faisait frisquet, dissimulaient toujours une boîte de bonbon pour leurs petits-enfants, et affichaient 50 ans de mariage avec la fierté de ceux qui ont réussi un marathon olympique. Les vieux étaient des vieux, des vrais. Lorsqu’ils allient à la pharmacie, on les appelait par leur nom : « Alors madame Truchot, comment ça va aujourd’hui ? Les rhumatismes ? ». C’était le signal que le vieux était vraiment vieux. Il jonglait entre tous ses rendez-vous : le gastro-entérologue, le cardiologue, le rhumatologue. Le vieux commençait à se soigner par petits bouts, ça s’effritait de partout. Le vieux était à la mode, mais pas la même que les jeunes. Ses accessoires à lui, c’était le dentier, les lunettes-loupe et le sonotone. A un moment pourtant, il avait été jeune. Il avait même été chef de service à Gaz de France. Mais de chef de service, il est soudain passé à « vieux de service ». C’était comme ça.

Aujourd’hui les vieux ne sont plus ce qu’ils étaient. La réflexion m’est venue en voyant Guy Bedos sur scène. Les vieux ne veulent plus être vieux. Ils retro-pédalent comme des fous pour ne pas y aller. Comme un plongeur qui fait demi-tour en haut du plongeoir : « arrêtez, les jeunes, poussez pas derrière, on est pas au pièce, on a bien le temps de mourir ». Le vieux en 2012, c’est le nouveau jeune. Les rides, il les comble avec l’énergie du désespoir. Même notre président aurait avoué du bouts des lèvres avoir eu recourt au Botox. Et il n’y a qu’à voir Johnny national. A lui seul une publicité qui aurait pour slogan « vadé rétro, vieille peau ! ». En fait, les vieux nous ont volé leur vieillesse. Avant, les grands-parents servaient à garder les petits-enfants. On ne se posait même pas la question de leur emploi du temps. Aujourd’hui, les grands-mères surfent sur internet et s’organisent des rendez-vous Meetic entre deux cours de Pilate. « Ecoute chérie j’aurais adoré gardé Iris, mais tu comprends, ça tombe juste la semaine où je fais mon trekking au Népal ». La grand-mère réfute même le terme de grand-mère. La mamie est une espèce en voie de disparition. Aujourd’hui, les grands-mères se font appeler Ludivine, Amandine, ou Clémentine. Les Henriette sont aux oubliettes.

Quand aux grands-pères, ils en sont à leur troisième mariage et leur dernière femme de 32 ans vient de donner naissance à un petit Paul de 3,5 kilos. Alors vos enfants, c’est le cadet de ses soucis. Il se rachète une seconde jeunesse en se levant la nuit pour donner le biberon. Les cris de son bébé sont comme un élixir de jouvence qu’il absorbe comme un vampire. Une sorte de fil invisible qui le retient sur terre un peu plus longtemps que les autres. Il a gagné un peu de rab.

Je crains le pire pour les années à venir. Dans 30 ans, je ferai partie des « nouveaux vieux » mais peut-être que je ferai plus jeune que maintenant. Ma peau sera rose et fraîche comme des joues de bébé, mes seins seront triomphants après mes nouveaux implants, mon nouvel amoureux aura 25 ans, mes petits-enfants me prendront pour leur grande sœur. A moins que je ne me la joue vintage. Avec de vrais rides, comme au bon vieux temps. Je ne sais pas encore. Le vintage, c’est pas vraiment mon truc, et les piqures me fichent la trouille. Tout ce que je sais, c’est qu’à un moment il faudra tirer sa révérence. Comme tout le monde. Et ça, c’est pas près de changer. 


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