L'ouragan créateur, l'ultime chance de Bayrou

Publié le 22 février 2012 par Lheretique

Les tous derniers sondages ne sourient guère à François Bayrou. Toutefois, le Béarnais pourrait encore créer la surprise à condition de créer aussi une faille dans l'offre politique actuelle.

Il est très difficile de déboulonner l'actuel duopole PS/UMP d'autant qu'il s'inscrit dans un clivage traditionnel. La loi de l'offre et de la demande s'appliquent cependant à la sphère politique, et, en digne hérétique, j'ajoute qu'Aloïs Schumpeter voit ses thèses validées autant dans ce domaine que dans le champ économique.

Je l'ai dit maintes et maintes fois ici, la seule manière de gagner, c'est de cliver. Bayrou l'a compris au moins dans deux domaines : l'économie et l'éducation. Pour la seconde, malheureusement, c'est sans doute une préoccupation des Français, mais ils n'entendent pas grand chose aux considérations techniques et ce n'est  donc pas un thème de campagne, d'autant qu'ils sont inondés de mensonges dégoûlinants de toutes sortes en provenance des médias et des autres camps politiques. C'est donc cuit de ce côté-là en dépit des bonnes idées de Bayrou.

Tout ce qui est contrat démocratique, justice sociale, et cetera, tous les partis et les candidats disent la même chose : impossible donc, pour le citoyen lambda de démêler le vrai du faux.

Il y a des différences dans le domaine de la fiscalité, mais elles ne sont pas énormes d'un candidat à l'autre, et surtout, les réformes fiscales qui pourraient être efficaces en économie ne sont a priori pas populaires. Danger de ce côté-là. Dans ce domaine, Bayrou a pris ses responsabilités. Sarkozy prend un risque avec sa TVA sociale, mais on ne peut pas le lui reprocher, sur ce point, il ne se montre pas démagogue, au contraire de la gauche et de Hollande, qui comme d'habitude, promettent la lune.

Non, en 2012, le vrai curseur, c'est l'économie, et bien sûr l'emploi. Bayrou a vu avant tous les autres que l'industrie était au coeur de nos déficits et de notre chômage. Il a également conscience que ce n'est pas l'effort de quelques uns mais de toute la nation qui peut améliorer notre situation d'où son idée de faire du consommateur un consommacteur.

C'étaient là ses idées de début de campagne. Mais ce n'est pas suffisant. Bayrou a de bonnes idées, mais au bout d'un moment, il tend à les réciter en boucle et la pâte retombe avant d'être soufflée. C'est ce qu'il s'est produit aussi en 2007.

Aujourd'hui, pour parvenir à casser l'alternance droite-gauche, il faut pouvoir apporter des réponses aux ouvrières de Lejaby, aux métallos de Florange et à tant d'autres.

Il faut pouvoir dire comment le label en France va se mettre en place, ce qu'il prendra en compte et ce qu'on en attend en termes d'emplois, de réduction des déficits et de productivité.

Bayrou a une conception de l'État dans laquelle l'État, facilite, dans laquelle le législateur prépare un cadre pour que les acteurs s'organisent. Hélas, par les temps qui courent, la société française n'a pas la patience d'attendre que les acteurs s'organisent, et surtout, qu'on le lui dise, lui apparaît comme une idée flou.

A Bayrou de trouver d'autres idées clivantes et surprenantes pour expliquer comment des segments industriels entiers peuvent se réimplanter en France ou tout simplement apparaître sur le marché, là où ils n'existent pas. 

La société française cherche plus qu'un sage : elle veut un démiurge.

Il en va donc de cette présidentielle comme de la tempête capitaliste de Schumpeter : l'entrepreneur doit créer un déséquilibre par une innovation foudroyante qui lui permette de devancer d'un coup tous ses concurrents. Ceux qui auront survécu, s'ils parviennent à s'emparer de l'idée à leur tour, rééquilibreront la balance jusqu'à l'innovation suivante. 

Pour parvenir à capter un électorat très indécis, Bayrou devra lui donner des gages d'inventivité. Sa victoire politique ne peut être qu'à ce prix et il n'existe aucune autre issue. Dans le cas contraire, c'est au mieux la stagnation, au pire, la chute...