A las cinco de la manana…
Monsieur Gentil
Les stratégies se dévoilent…
Coté Hollande, la stratégie est classique, basée sur la critique d’un quinquennat sarkozyste qu’il juge sévèrement. Hollande critique un Sarkozy diviseur, ami des riches, dressant les français les uns contre les autres. Les mots clés de François Hollande sont « la République », « la dignité », « le respect », « l’égalité », « la sincérité », « l’honnêteté« . Il est « le candidat normal », l’homme qui refuse la confrontation directe avec Nicolas Sarkozy, en prenant un soin un peu puéril à parler « du candidat sortant ». Hollande veut provoquer le taureau qui sommeille en lui.
Hollande préfère mener la guerre sur le terrain des personnalités plutôt que celui de l’expérience ou des idées. Il est ce personnage de bande dessinée pour enfant, cet inoffensif « Monsieur Gentil ». Monsieur Gentil n’agresse pas, Monsieur Gentil ne clive pas, Monsieur Gentil n’insulte pas. Il ne veut pas le pouvoir. Il n’aime pas les riches et les méchants. Et il met d’accord tout le monde.
Docteur House
Coté Sarkozy, la stratégie est plus complexe à suivre car le candidat doit changer de peau, tout en défendant son bilan, ce qui l’oblige à contourner sur la pointe des pieds le javelot fiché à terre de son premier quinquennat, qui est à la fois difficile à manier et en même temps un pivot central de son identité politique. Le président sortant a commencé par chanter son amour de la France, un mot répété inlassablement lors de son allocution de Marseille.
Cette sacralisation de la France l’amène ensuite à avancer l’idée que, lui, entend renforcer l’intérêt supérieur du pays, c’est à dire prendre ses responsabilités par rapport à un adversaire jugé changeant, mou, et prêt à toutes les contorsions pour ramener des voix ethniques ou corporatistes. C’est là où il amorce le lien avec l’électeur : la France forte peut protéger les Français, quitte à contourner les barrières dressées par les élites entre lui et eux. Les mots clés de Sarkozy sont « France », « courage », « responsabilité », « vérité ».
Bref : « J’ai mauvais caractère, et j’assume ! »
Sarkozy esquisse une critique sur la personnalité de son adversaire mais son propos vise plutôt la méthode de gouvernement de Hollande.
Le Flou et le Fou
Chacun des deux attaque l’autre sur sa faiblesse principale.
Hollande tape régulièrement sur la personnalité du candidat sortant, dont tout le monde connaît les limites : ouh, le croquemitaine ! C’est un merveilleux sujet d’attaque, une autoroute, car François Hollande sait que sa personnalité un peu fade mais joufflue passe forcément mieux que les aspérités sarkozyennes. Jamais un mot plus haut que l’autre, un peu d’humour, un peu de distanciation, et toujours le ton du brave monsieur qui vient vous dépanner en vous prêtant sa tondeuse : la méthode Hollande. L’idée est de faire passer le message qu’un candidat désaxé et clivant a forcément des mauvaises idées pour la République.
Il s’est néanmoins laissé imposer le rythme, avec la mauvaise idée qu’il a eu d’aller guerroyer sur le concept de référendum. Attaquer le référendum, c’est mécontenter tout le monde, car chacun a une opinion et aime la faire partager. Attaquer les sujets de référendum, c’est déjà admettre l’arme choisie par l’adversaire, et donc lui octroyer un avantage symbolique.
Sarkozy de son coté cherche à faire l’alchimiste en transformant l’avantage de personnalité de Hollande en boulet programmatique. Il sait de toutes manières que Hollande a un programme très flou, et qu’il a depuis le départ choisi de présenter le visage bonhomme d’un monsieur jourdain de la politique, une savonnette caoutchouteuse qui convainc mal mais ne clive pas. L’idée de Sarkozy c’est que la personnalité non-clivante devienne dans la psyché de l’électorat une traduction d’un flou électoral. Du coup, on lui ressort ses déclarations contradictoires sur les familles, le nucléaire ou le libéralisme.
Reste que pour Sarkozy, taxer Hollande de girouette n’est pas forcément crédible, étant donné ses propres abandons ou revirements.
Il faut désormais surveiller les sondages : normalement, Marine Le Pen et François Bayrou devraient perdre 1 ou 2 points, et Sarkozy en gagner 2/3.