De jour de retard en jour d'absence, je ne dois plus vous dire "je serai là demain". Je ne sais pas tenir mes engagements, peut-être est-ce là ce qui me caractérise le mieux, dire ce que je ne veux pas et faire ce que je ne dis pas. !
Alors que je veux divaguer et errer, il me faudrait être concis et percutant.
Dans un communiqué récent, nous, marionnettes et autres objets des Mille et une Vies, avons décidé de reprendre la parole que les auteurs ont abandonnée. Lorsque nous avons publié ces mots, nous n'avions pas conscience des réalités que cet engagement allait générer. Disant que nous ferions mieux que ceux qui céans nous avaient précédés, nous nous retrouvons aujourd'hui confrontés aux mêmes troubles qui les empêchaient : nous devons courir après le temps pour réussir à tenir chronique de notre néant. Cette course, nous ne la voulons pas. Alors que je veux me perdre dans une poétique rêverie je devrais raccrocher les mots de mes ardeurs à de matérialistes tâches. Et quoi encore ?
Alors quoi, alors qui. Oui, j'ai perdu, je l’avoue, j’ai voulu prendre les mots parce que je voulais le pouvoir. C'est ce qui m'humanise. Pas les mots, le goût du pouvoir... Si je le laisse m’animer, oui, comme vous, comme ceux de chair et de sang, je veux prendre sans rien donner ! Prendre une poupée et ici la découper. Je ne suis plus un objet. Je ne veux pas être tenu en laisse. Cette laisse, la voila, elle est mes ailes et mes ailes je veux trancher. Dans une forme germanisante je veux reconstruire langue et mon renvoi du verbe en fin de proposition viendra vous perdre.
Ecrivant ces mots, je retrouve ce désir persistant, je veux rester sur mon trône et je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour y arriver. Le plus sale, le plus dégoûtant ne sera pas suffisant. Alors, les mains rougies, telles mon visage, je m'assiérai et contemplerai vos terres brulées par les maux que j'y aurai déversé..
J'ai l'âge que vous me donnez, et pour la raison il faudra repasser, je n'en ai pas été doté. Le constructeur n'avait pas le temps ; en avait-il lui même pour pouvoir la partager ? Je ne sais pas, je ne crois pas. Je sais, je sais que je ne sais pas ! Ces temps sont noirs et il est temps de savoir que nous allons à notre perte. Je vous le disais hier, peut-être était-ce avant-hier, nous serons des milliers à alimenter le feu et des cris sortiront des flammes. C'est de ces cris qu'émergera le tableau d'une terre désolé.
Je l'ai vu. J'ai perdu, je ne suis plus là. Je ne reviendrai pas, je reviendrai certainement après-demain. je m'appelle Germain Lenain et j'ai l'âge que vous me donnez, je n'ai pas d'âge. Je m'appelle germain Lenain et je suis la représentation de vos (in)humanités.
Germain Lenain pour la Cie Les Mille et une Vies Théâtre de Marionnettes Itinérant
Photographie Cie Les Mille et une Vies extraite de "le dernier spectacle des Grizbatoruc" 2009