Sarkozy: cette réalité économique que le candidat sortant ne veut pas voir

Publié le 19 février 2012 par Letombe

Quand il s'exprima sur TF1 mercredi dernier, Nicolas Sarkozy n'eut qu'un commentaire sur la situation économique du pays qu'il lèguera à son successeur s'il n'est pas réélu: la croissance est revenue.
C'était un peu court. On savait que le bilan était bien plus terrible que cela.
A TF1, Laurence Ferrari avait pourtant un prétexte tout trouvé pour l'interroger sur son bilan: la Cour des Comptes présidée par Didier Migaud venait de publier son rapport sur l'année 2011, dernier bilan de la dernière année de Sarkofrance.
Le rapport était attendu, ou craint. Ou les deux. Ce fut un avis de décès politique. Le Monarque avait beau s'agiter avec des propositions de référendums improbables, le bilan était intraitable.
Incapable de gouverner
1. La Cour a rappelé combien la situation économique s'était dégradée en 2011: « les perspectives de croissance se sont nettement dégradées ; de fortes tensions sont apparues sur le marché des titres publics de la zone euro ; de nouvelles mesures de redressement des comptes publics ont été décidées par le Gouvernement. » Qui nous assurait, il y a quelques mois encore, que nous étions sortis de la crise ? En début d'année, le story-telling avait dû s'adapter, et reconnaître la dégradation. A l'Elysée, on pilote à vue, on reste incapable de gouverner.
2. Le candidat sortant voudrait l'oublier, la situation des comptes publics est sacrément grave: « Les dépenses publiques représentant 56,3 % du PIB, un déficit public de 5,7 % du PIB signifie qu’environ 10 % des dépenses des administrations publiques, soit l’équivalent de plus d’un mois de dépenses, sont financées par l’emprunt.»
3. Président, Sarkozy fut incapable de rigueur. La Cour le rappelle: 40% des 19 milliards d'euros de hausse d'impôt en 2011 correspondent en fait à la fin du plan de relance (pour 3,6 milliards d'euros) et à « la disparition du surcoût ponctuel, en 2010, de la réforme de la taxe professionnelle » (3,9 milliards d'euros). Si l'on retranche d'autres évènements ponctuels (comme « l’arrêt du plan de relance et des livraisons exceptionnelles de matériel militaire de 2010 »), la progression des dépenses publiques sous-jacente « serait donc de 1,4 % en 2011 en volume. »
4. Au passage, Sarkozy ment sur un autre point: la France n'a pas mieux résisté que ses voisins... La Cour a défoncé l'argument sarkozyen: « Même si le déficit public est ramené à 5,7 % du PIB en 2011, il restera nettement supérieur à la moyenne de la zone euro (3,7 % du PIB hors France selon les dernières prévisions de la Commission européenne) et de l’Union européenne (4,5 % du PIB hors France). »
5. Pour 2012, la Cour des Comptes a aussi critiqué la prévision de croissance « spontanée » des recettes publiques Elle rappelle que le ralentissement des dépenses « n'est pas acquis ». Bref, pour 2012, le projet de budget et de redressement budgétaire est loin d'être fiable, Sarkozy et consorts ont raconté... des bobards: « La réduction du déficit public de 5,7 % du PIB en 2011 à 4,5 % en 2012 repose sur une hypothèse de croissance de l’activité très favorable et un objectif de maîtrise des dépenses qui n’est pas acquis. »
6. Pour 2013, la Cour s'inquiétait, et elle avait raison. Même Moody's s'en inquiète: « l’objectif de ramener en 2013 le déficit à 3,0 % du PIB est encore plus difficile à atteindre car la programmation repose sur un cumul d’hypothèses favorables. »
Dangereux en gouvernant ?
Ce n'était pas tout. La Cour des Comptes avait aussi démonté quelques curiosité sarkozyennes. Nous avions déjà rendu compte de son analyse de la réforme de ma masterisation, un échec en bonne et due forme. Mais ce n'était pas tout.
1. La lutte contre la fraude fiscale était pourtant une (fausse) grande obsession d'Eric Woerth alors ministre du Budget. Ce dernier vient d'être doublement mis en examen dans l'affaire éponyme. La Cour des Compte s'est attardée sur Tracfin. La Cour s'est justement attaquée à la faiblesse des moyens (« compte tenu de la forte croissance des déclarations de soupçon reçues » - 110.000 pour la seule année 2009 !), ou au manque de suivi des poursuites pénales. Le contrôle fiscal a eut droit à sa critique: « le système de contrôle fiscal peine à s’adapter aux nouvelles formes de la fraude, qui s’est dématérialisée, internationalisée, accélérée et complexifiée ». La Cour critique une organisation qui est restée « dans les grandes lignes celle des années 1980. »
2. L'agriculture était un grand sujet de préoccupation de Nicolas Sarkozy depuis 2009. La Cour concède 25 pages au secteur. Les Sages s'indignent de la persistance d'une curieuse pratique, l'octroi de subventions agricoles trop tard et sans contrôle. « Ces aides constituent, de façon plus générale, une réponse qui n’est satisfaisante ni pour les agriculteurs qui préfèrent vivre du revenu de   leur   exploitation   que   des   aides   publiques,   ni   pour   l’ Etat   qui, paradoxalement, décourage les nécessaires évolutions structurelles, en intervenant de manière asymétrique lors des crises, tout en ignorant les périodes d’embellies économiques.» La Cour pointe notamment sur «  le recours immédiat à la solidarité nationale » sans prévision ni anticipation. En d'autres termes, Nicolas Sarkozy, qui a beaucoup visité d'exploitations agricoles depuis 2 ans pour se réconcilier avec le milieu, n'a rien changé.
3. La défense des victimes a été une cible de choix dans l'argumentaire sarkozyen post-2007. Cinq ans plus tard, le ministère de la Justice délègue toujours trop, et avec trop peu de moyens. La Cour constate aussi que : « Le dispositif d’indemnisation, malgré d’importants progrès, reste complexe et inégalitaire.»
4. La Cour des Comptes s'est aussi interrogée sur la « sensible réduction » de l'effort budgétaire en faveur du logement social Le sujet n'est pas politiquement correct en Sarkofrance. Le candidat Sarkozy répète qu'il a mieux fait que Lionel Jospin en créant 200.000 logements sociaux... Rooooo. Le pays compte « 4,5 millions de logements locatifs sociaux soumis à un loyer réglementé et ouverts aux ménages selon leurs ressources, soit 16 % des 28 millions de résidences principales. » En 2009, la Cour avait pointé que « 75 % des logements sociaux étaient construits là où n’existaient pas de besoins manifestes.» En 2012, le nouveau zonage est toujours « inadapté pour définir précisément les besoins en logements sociaux.» Au passage, elle fustige les niches fiscales immobilières qui «  renforcent la tension sur le foncier et rendent ainsi la construction de logements sociaux plus difficile et, à tout le moins, plus coûteuse. » Nicolas Sarkozy a mis 5 ans à comprendre que la défiscalisation des intérêts d'emprunts immobiliers étaient une bêtise.
La liste était encore longue.
Mais il faut en garder.
Nicolas Sarkozy n'a avoué être sa candidature qu'il y a quelques jours.

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