21 Février... les sirènes du MES

Publié le 19 février 2012 par Osiris

Lettre ouverte aux députés qui seraient susceptibles d'abandonner leurs électeurs au bon vouloir des marchés financiers.

Ce ne pourrait être sans conséquences

"Mesdames et Messieurs les députés français,

Comme des millions de personnes dans toute l'Europe,je m'inquiète des dérives autoritaires, des politiques d'austérité et de la casse systématique des services publics qui sont mis en oeuvre, sous prétexte d'une dette dont la légitimité n'est d'ailleurs toujours pas questionnée.

Nous voyons bien la réalité des conséquences de ces politiques en Grèce, où un véritable pillage du pays a lieu. Je ne développerai pas cette situation tragique que vous connaissez.

Je vous écris concernant le traité européen instituant le mécanisme européen de stabilité sur lequel vous devrez vous prononcer le 21 Février. Vous savez que ce mécanisme donnera des pouvoirs complètement anti-démocratiques à la Commission Européenne. Vous savez que les États européens seront soumis à une discipline budgétaire qui obligera à tout vendre, service public après service public. A travers ce véritable pillage organisé, c'est toute la cohésion sociale et la  qualité de vie dans notre pays, déjà bien entamée, qui seront mis à mal. Je m'étonne du silence qui entoure ce traité crucial et m'indigne de l’absence de consultation populaire à ce sujet.

Au sein de ce mécanisme, les décisions seront prises par le Conseil des gouverneurs composé exclusivement des ministres des finances de la zone euro. Aucun veto, ni aucune autorité des parlements nationaux n’est prévu sur ces ministres lorsqu’ils agissent au titre de gouverneurs. De plus, ils jouiront en cette qualité d’une immunité totale leur permettant d’échapper à toute poursuite judiciaire. Pourtant, ils disposeront alors librement des caisses de l’État qui devra accéder de façon « irrévocable et inconditionnelle » à leurs demandes. Il est aussi intéressant de noter que le budget de départ du MES pouvant être réclamé aux États-membres dans un délai de sept jours seulement n’est pas plafonné et peut donc augmenter de façon illimitée sur décision du Conseil des gouverneurs.

Aucun membre ou employé de cette structure ne sera élu par la population ni responsable devant elle. Plus fort encore, le MES peut attaquer en justice mais pas être poursuivi, pas même par les gouvernements, les administrations ou les tribunaux. Le manque de transparence concerne aussi les documents « inviolables » , qui ne seront rendus publics que si le Conseil des gouverneurs le souhaite.

Négation des compétences fiscales et budgétaires des parlements nationaux, déni des principes de base de la démocratie, impossibilité d’opposer un veto, immunité judiciaire totale, opacité des documents… Autant de procédés antidémocratiques qui m'amènent aujourd’hui à vous demander d’adopter une position claire quant à ce traité. Allez-vous l’accepter ou le rejeter ?

Cette société devient étouffante d'injustice. Je vous le demande , Madame, Monsieur, au nom de la gauche dans ce pays, au nom de la souveraineté populaire, au nom de la justice sociale, au nom de la république et de la démocratie, vous devez rejeter ce texte.

En 2008, beaucoup de députés socialistes se sont abstenus et c'est l'abstention qui a permis une majorité pour valider le traité de Lisbonne. Peut-être avez-vous fait parti des 115 parlementaires socialistes qui ont eu le courage de voter contre ce traité, mais je vous demande de bien réfléchir à la portée sans précédent du vote du 21 Février. Il va sans dire que je prendrais en compte votre réaction sur cette question cruciale la prochaine fois que je serai appelé(e) aux urnes.

Un monde est en train de basculer et l'issue en est bien incertaine. Je suis inquiet pour notre avenir et c'est peut-être bien la fin de nos démocraties en Europe qui est en train de se jouer.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous souhaite un bon vote.

Solidairement
"

Merci à Michaël Le Sauce via Mediapart, le 13 Février 2012

Pour un décryptage du mécanisme