Habibi

Par Fibula
Habibi, Craig Thompson, Éditions Casterman (pour la version en français), collection Écritures, 2011

L'édition française (Casterman)

Cinq ans que nous attendions le nouvel ouvrage de l'auteur de bandes dessinées américain Craig Thompson. Cinq ans à suivre son blogue Doot Doot Garden pour savoir l'état d'avancement de son travail.Habibi est enfin là, entre nos mains, énorme œuvre de presque 700 pages, agrémentée de notes et de traductions de deux poèmes.Et là, on comprend la somme de travail, de recherches effectuées par l'auteur, dans le but de nous offrir ce résultat somptueux.Presque dix ans après la bande dessinée initiatique Blankets, qui a été mon initiation aux romans graphiques, Craig Thompson, qui est demeuré depuis tout ce temps ma référence en la matière, nous amène complètement ailleurs. Si on se demande ce qui l'a poussé à se pencher sur cette histoire d'amour singulière, on ne peut qu'admirer l'acharnement et la passion qui l'ont animé pour mener cette histoire jusqu'à sa conclusion.

L'édition américaine (Pantheon)

Habibi, c'est quasiment l'histoire de l'humanité, à travers l'amour que se vouent Cham / Zam (Habibi) et Dodola, dans un décor à la fois futuriste et antique. L'auteur traite dans son livre de notre rapport à la nature, à l'autre, tout cela en illustrant son histoire par des paraboles tirées du Coran et de la Bible. Si le fond s'en va parfois vers une fable apocalyptique qui n'évite pas certains écueils et raccourcis (notamment par la vision simpliste de la pollution par l'homme, et une appréhension plutôt personnelle de la sexualité), la forme nous subjugue littéralement.Le dessin est d'une telle précision, quasiment hypnotisante, trait fin noir et blanc, détails arabisants pour illustrer les différents chapitres.Un travail impressionnant et érudit qui fait de Craig Thompson un auteur tout à fait singulier et remarquable dans le monde de la bande dessinée.Pour ceux qui pensent encore que la BD se résume aux supers héros et aux comics américains, Habibi est un bon moyen de découvrir un récit très riche et imaginatif, à la narration aussi complexe que celle d'un roman.
Si vous savez lire l'anglais, l'édition américaine vaut vraiment le détour. Dommage que Casterman n'ait pas reproduit l'enveloppe originale.
Libé en parle (Éric Loret)
Et Télérama aussi (Jean-Claude Loiseau)
[Lætitia Le Clech]
Humeur musicale : John Coltrane, Best Of (Blue Note)