Tous les protagonistes étant maintenant sur le champ de bataille : la campagne présidentielle -moment essentielle de la vie politique française- peut réellement commencer. Or, il faut bien constater qu'elle est mal partie: petites phrases assassines, discours contenant des qualificatifs à la limite de l'insulte, désignation multiples de bouc émissaire,... En cette période de crise, les étrangers, les riches, les chômeurs, l'Europe, la Chine, l'Euro, ... les candidats rivalisent d'imagination pour trouver des coupables à défaut de présenter des idées politiques concrètes pour résoudre les problèmes de la France.
Dans ce contexte, le livre (Reprenons-nous! aux éditions Tallandier) et le discours de Jean-Paul Delevoye, apparaissent comme révélatrice des maux de la société française. Il est intéressant de l'entendre expliquer que sa position de médiateur de la République lui a ouvert les yeux sur les souffrances des Français.
Pourtant, explique-t-il, un député rencontre ses administrés et fait "l'assistante sociale" pour eux. Mais les gens qui vont voir leurs députés sont convaincus de leur bon droit et sont rarement dans le besoin. Le médiateur, au contraire, rencontre la souffrance des citoyens. Delevoye insiste par exemple sur l'inefficacité du travail du législateur: de plus en plus de lois, de plus en plus complexes, souvent sans effet, et parfois ayant des conséquences négatives.
La "légifération" est un mal très français : on pense et on croit qu'une loi résout un problème. Si à chaque problème, on lui adjoint une loi, on le règle. Mais l'accumulation, par exemple, des lois sur la récidive le prouve : la complication rend inutile les anciennes règles et les nouvelles ont des effets pervers.
Autre travers, autre maux, le livre de Yann Algan, Pierre Cahuc et André Zylberberg (la fabrique de la défiance, et comment s'en sortir, aux éditions Albin Michel) montre que la société française est cadenassée par la difficulté à créer des rapports sociaux fondés sur la confiance et le dialogue: patrons hautains, presque tous sortis des castes des grandes écoles, personnel politique aux moeurs féodales, syndicalistes minoritaires qui font carrière, système éducatif élitiste, où la compétition est la règle et les échanges et les coopérations, l'exception. Il nous faut sortir de ces travers et créer une ère nouvelle au service de la population française et dans l'espoir de la sortie de crise.
Force est de constater, avec tristesse, que la campagne présidentielle tourne le dos à ces enjeux majeurs : le déclin de notre pays semble avoir de belles espérances. Il nous faut pourtant réagir si nous voulons éviter le crash.