Pourquoi les pasteurs sont particulièrement affectés

Publié le 17 février 2012 par Cmasson

Au Sahel, la faim est saisonnière. La période la plus difficile, connue sous le nom de « soudure » est la période où les greniers sont vides. Elle se situe entre le moment de l'épuisement des récoltes, pour les agriculteurs, et des pâturages pour les éleveurs, et le moment de l'arrivée des récoltes suivantes pour les agriculteurs ou la repousse des pâturages et l'arrivée du lait dans les campements pour les éleveurs.
 
Pour les cultivateurs, cette période se produit habituellement entre mai et octobre. Pour les pasteurs, qui représentent 20% de la population dans la région, entre mars et juillet. Cependant, le manque de pluies de cette année avance la période de soudure - et augmente sa durée. Elle se déroulera de mars à octobre pour les cultivateurs, et elle a déjà commencé pour les pasteurs.
 
« Le déficit de la biomasse a contraint cette année les bergers à se déplacer prématurément au sud, et à se concentrer sur les rives des fleuves du Sénégal et du Niger, où des conflits peuvent rapidement apparaitre pour des pâturages de plus en plus rares. Cette conséquence menace l'environnement d'épuisement des ressources » explique Frédéric Ham, responsable de la prévention des désastres naturels chez ACF.
 
« Les faibles pluies de cette années ont entrainé un épuisement des pâturages, et cela a forcé beaucoup de familles à vendre prématurément leurs animaux, avant qu'ils ne meurent d'affaiblissement, pour pouvoir acheter de la nourriture. Cette situation a entrainé un déséquilibre entre l'offre et la demande: les prix du bétail ont chutés, réduisant ainsi le pouvoir d'achat des bergers » explique un des  responsable de la sécurité alimentaire d'ACF, Julien Jacob. « Il y a un an il était possible d'avoir, par exemple, 100 kilos de mil contre un bouc, alors qu'aujourd'hui cet échange a diminué de 40%. »

Les solutions pour atténuer la crise pastorale

 
ACF accorde une attention particulière aux pasteurs dans son plan de réponse à la crise, notamment par la vaccination, la distribution de nourriture pour le bétail, de compléments (blocs à urée, etc.) et en organisant des transferts monétaires pour les bergers. « Nous n'excluons pas, d'ici quelques semaines, des mesures d'extrême urgence, comme la décapitalisation massive et organisée du bétail, de manière à ce que les animaux puissent être vendus ou consommés avant qu'ils ne soient trop faibles au point de perdre toute valeur ».

La rébellion touareg, une nouvelle menace

 
Depuis qu'une nouvelle rébellion touareg a éclaté mi-janvier au nord du Mali, des dizaines de milliers de personnes ont fui dans les pays voisins, au Niger et en Mauritanie, ou se sont déplacés au sein du pays. « Ces déplacements, et les obstacles qu'ils entrainent pour l'aide humanitaire, vont aggraver la situation des populations les plus vulnérables » explique Rafael de Prado, l'un des responsables géographiques pour l'Afrique d'ACF.
 
ACF met déjà en place des mesures d'atténuation de crise (programmes d'argent contre travail ou distribution de rations de protection) dans 6 des pays affectés par la crise (Niger, Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Tchad et Sénégal), avec le soutient notamment du Service d'aide humanitaire et de la Protection civile de la Commission européenne(ECHO).

EN BREF :

  • Les pasteurs sont parmi les premiers à avoir épuisé leurs réserves alimentaires, notamment parce que leur période de soudure arrive plus tôt que pour les cultivateurs
  •  En Mauritanie, le nombre de familles en situation d'insécurité alimentaire a triplé par rapport à l'année dernière. Les nomades et les pasteurs sont parmi les plus touchés
  •  La nouvelle rébellion touareg dans le nord du Mali commencée il y a un mois est devenue un nouveau facteur d'aggravation
  •  Selon les estimations, 2,6 millions enfants pourraient être atteints de malnutrition aigüe au printemps