Il y a du nouveau du côté de la côte pacifique des Etats-Unis! Après une relative période de creux, symbolisée par la sortie de 3 albums de The Game et de 14 dates/promesses de sortie pour le Detox de Dr Dre, la nouvelle vague californienne est prête à débarquer dans vos mp3.
Depuis un peu plus d’un an, on ne compte plus les sorties en provenance de la baie des anges et des ses environs. Ca a commencé avec les lascars d’Odd Future, puis beaucoup, dans des styles plus ou moins différents ont suivi. Que l’on parle de Pac Div, Overdoz, Casey Veggies ou Dom Kennedy, la qualité est souvent au rendez-vous et le Chill reste un mot d’ordre permanent.
Mais ce renouveau de la West Coast a réellement pris forme l’été dernier, avec les succès des albums de Jay Rock (Follow Me Home) et surtout du Section 80 de Kendrick Lamar, acclamé un peu partout et notamment ici même.
En ce début d’année, c’est au tour de Schoolboy Q, membre du crew Black Hippy comme ses copains Jay et Kendrick, de rider la vague de la hype avec la sortie de son 2nd album, Habits and Contradictions.
Deux constats s’imposent d’entrée: -Si tu as déjà écouté le premier album de l’écolier Q, manifeste toi, vous devez pas être ultra nombreux sur la planète
-En cette saison hivernale où il doit faire dans les -12° un peu partout en France, est-ce une bonne idée d’écouter de la West Coast. Pire, est-ce une bonne idée de rider une vague?
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La dessus, on est fixé dés la première écoute. Pas de sirènes G-Funk, aucun morceau qui fait vraiment penser à la plage…Ce disque pourrait venir de n’importe quel endroit des Etats-Unis et c’est un peu ça le problème en fait.
Bon du coup l’intro de cet article est un peu pétée mais c’est pas grave, il fallait parler des Black Hippy, tu verras c’est important pour la suite.
Revenons en au fait. Pas de véritable identité West Coast donc, mais surtout pas de véritable identité tout court. On touche directement le plus gros problème de cette galette, le Schoolboy se cherche, et ça se sent. Sans vouloir comparer systématiquement ce Habits and Contradictions au Section 80 de Kendrick Lamar (il n’en a pas la carrure et puis ça ne serait pas très juste), une différence d’approche saute aux yeux et aux oreilles.
Là ou KL avait su donner une couleur musicale et une vraie homogénéité à son album, Schoolboy semble se contenter de mettre en application des formules ayant déjà bien fonctionné ailleurs. Gros samples de pop par-ci (There he go, Hands on the Wheel), instrus planantes et voix trainante à la Wiz Khalifa (Oxy Music, Sex drive) ou encore prods electro-bourinnos pour faire kiffer les fans de Skrillex (Druggys With Hoes, Nightmare on Figg Street).
A peu près tout y passe et même si les producteurs «font le taf» comme on dit, on regrette un certain manque d’ambition et surtout de cohérence d’ensemble. Bon voila le petit Schoolboy, il se sait sous les spotlights, il a pas envie de se rater donc il bouffe à tous les râteliers, c’est humain. On te pardonnera cette faiblesse l’ami, mais qu’as-tu d’autre à offrir?
Passons sur l’intro introspective vite-fait sur sample d’electro-poop pourlingue genre La Roux et on arrive sur le morceau There He Go, qui nous montre ce que le Q a de bon à nous apporter.
Le sample est efficace, l’egotrip est ravageur. Schoolboy ne se retient pas et les punchlines sont plutôt bien senties. Preuve du culot du jeune homme, il se permet meme de lâcher une petite pique contre le docteur Andre («Coast ain’t been thit hard since sincePac, Death Row and Dr Dre/Word to Dr Dre, Detox is like a mix away»). Le p’tit gars n’invente rien mais ça reste bien efficace, surtout quand ses intonations barrées font monter sa voix dans l’aigu, offrant un côté foutraque bien venu.
Uhh Muthafucka’, muthafucka’ yeah/fuckin is my favorite word, reason why i’m fuckin her
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Schoolboy Q a donc de la réserve et un certain talent pour partir en couilles tout seul lorsque l’instru le permet. Seulement ce niveau, à la fois dans le flow et dans les lyrics, Q peine à le maintenir tout au long de l’album. Beaucoup de morceaux sont dispensables, parler de cul et de weed c’est marrant quand c’est bien fait, mais lorsque les répétitions et les fameuses intonations baroques ne sont plus là que pour masquer un manque d’inspiration et une technique faiblarde, ça pose un peu problème.
Ce constat s’impose un peu plus quand on regarde quels sont les meilleurs morceaux de l’album. Mise à part quelques réussites (NiggaHs already know ou le très bon Raymond 1969, morceau hommage au fondateur des Crips, sur un sample du groupe Portishead qui n’a jamais paru aussi gangsta), ce sont les featurings qui tirent les morceaux vers le haut.
Grooveline pt.I (feat. Dom Kennedy & Curren$y)
Sur une prod ultra planante de Lex Luger (!) qui prouve qu’il ne se contente pas de produire des gros bangers et que si les artistes le cantonnent à ce rôle, il est bien le premier à en souffrir. Sinon sur le morceau en lui-même, ben tu veux pas prendre Spitta à ce jeu la et comme Schoolboy se contente de s’adapter au style de ses invités, ça fait un bon son mais où lui ne brille pas.
Hands on the Wheel (feat. A$ap Rocky)
Le TUBE de l’album, sample genial, gimmick plus qu’accrocheur à base de beu et de breuvage (Weed and brews, weed and brews, life for me is just weed and brews). Et puis l’A$ap Rocky. Believe the hype, ce mec est un tueur et il nique le skeud en quelques mesures, à grand coups de flow élastique.
Blessed (feat. Kendrick Lamar)
Et puis pour boucler la boucle, un aperçu de ce que pourrait donner un album commun des Black Hippy. Bien sûr on s’aperçoit de l’écart qui demeure entre K-Dot et son poulain Schoolboy, mais le son défonce et c’est bien là le principal.
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Schoolboy Q ne nous livre donc pas un mauvais album, loin de la même puisque ça reste impeccable en terme de réalisation… Mais ca reste un peu trop mainstream pour avoir une vraie saveur. Le disque que tu pourra faire écouter à ta copine, ou à tes potes qui «n’aiment pas le rap»
TRISTAN