Le Mage Penché sur son athanor, Bras maigres sortant d'une ample manche, Le Mage gesticule, se déhanche, Va-t-il échouer encore ? Ses cheveux blancs, hirsutes, Ornent comme dentelle La coiffe haute, pointue Qui, sur son crâne chauve, chancelle Du fourneau ventru, magique, Il attise le feu dit « infernal » Dans le creuset dépose l'antimoine Cherche-t-il la philosophale antique ? Le fourneau, rougi jusque l'incandescence, Vibre, gémit, gonfle ses flancs, Les étincelles folles s'élancent… Vision dantesque, hallucinante ! Yeux enfiévrés, il ajoute le soufre, La flamme hurle, bleuit… C'est le Diable sans aucun doute Qui, maintenant, surgit ! Sa voix module de bizarres incantations, Il jette l'esprit de sel. Le métal boue, s'agite en fusion, Les scories s'amoncellent ! Vite ! vite ! c'est à l'instant Qu'il faut ajouter le vif argent, Puis chauffer, chauffer à blanc… Juste ce qu'il faut cependant ! Une âcre, irritante odeur sulfureuse, Du centre du creuset se dégage Le mage ricane, lèvres bulbeuses Lorsque surgit l'image ! Le dernier apport est en son creux de main Chut ! c'est un morceau de Destin, Du… et du… mélangés, Un secret terriblement bien gardé ! Le fourneau enfle son ventre Le Mage danse en son antre… Encore, encore, il attise la braise, La dernière incandescence se lève. La matière vile est séparée, Le métal noble est-il né ? Le Mage se penche sur son athanor… Au fond… au fond… il y a de l'OR ! elaine de liancourt
© Black-out