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Sarkozy et Hollande : attention au show et froid (et au chaud effroi)

Publié le 16 février 2012 par Sylvainrakotoarison

Deux scoops entre le début et la fin de la nuit dernière : Nicolas Sarkozy est candidat et Hervé Morin ne l’est plus. Rajouté à cela, un François Hollande qui use et abuse de démagogie. Bayrou lâche : « Ras le bol du SarkHolland ! ».

yartiShow01Secret de Polichinelle, le Président de la République Nicolas Sarkozy a annoncé sa candidature à l’élection présidentielle de 2012 au journal de vingt heures de TF1 ce mercredi 15 février 2012.

Au contraire du 29 janvier 2012 où j’avais trouvé qu’il avait été bon sur la forme, Nicolas Sarkozy a paru tendu et stressé pendant ses quelques minutes d’intervention, comme si cet exercice obligé était une corvée. La pensée m’est venue qu’il semblait avoir vieilli de plus de dix ans pendant la durée de son quinquennat (il a même buté sur le mot en prononçant d’abord septennat).

Il était d’ailleurs intéressant de remarquer qu’à la même heure, François Bayrou "officiait" sur Canal Plus, un peu à l’étroit dans un espace médiatique qu’il a dû partager avec un sportif (rugbyman ?) et deux clodettes, et le contraste était grand entre l’air très soucieux du Président sortant et l’attitude très détendue et sereine du candidat centriste prêt même à rire des interruptions de Jean-Michel Aphatie.

Classicisme et double langage

Sur le fond, Nicolas Sarkozy a tenté de développer son thème slogan, "La France forte", en s’estimant le meilleur à défendre la France dans la mondialisation des échanges économiques.

Le slogan est peu original. Il a été utilisé par Valéry Giscard d’Estaing pour le second tour de 1981 et par Ségolène Royal pour le premier tour de 2007 (avec les succès que l’on sait). François Bayrou a d’ailleurs une idée bien précise de ce qu’est un bon slogan : c’est un slogan que les autres candidats ne peuvent pas adopter et qui résume donc bien le message particulier et original d’un candidat donné. Ce n’est pas le cas avec "La France forte" ; qui voudrait d’une France faible ? Ce n’est pas plus le cas du slogan de François Hollande : "Le changement, c’est maintenant" ; qui, à part le candidat sortant, ne voudrait pas le changement justement ?
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On pourrait presque le croire sincère lorsqu’il a expliqué qu’il avait impatience à faire la campagne, à retrouver les Français en dehors du protocole élyséen (il a quitté la tour de TF1 dans une voiture de location).

Sa tactique sur tous les sujets est cependant souvent la même : souffler le chaud et le froid. Se dire déprimé en janvier pour mieux montrer sa combativité en février. S’interroger sur le mariage homosexuel pour mieux affirmer son opposition. Renvoyer Jean-Louis Borloo de Bercy en début de quinquennat à cause de la "TVA sociale" pour mieux l’imposer en fin de quinquennat (après un incident de commission, les députés l’ont adoptée ce 15 février 2012).

Nicolas Sarkozy a réaffirmé sa volonté de consulter les Français par référendum sur la formation des demandeurs d’emploi. C’est un sujet qu’il ne semble visiblement pas vraiment connaître à en croire les très nombreux témoignages disponibles sur Internet depuis une semaine (par exemple, les indemnités chômage ne sont que la conséquence des cotisations d’assurance chômage que le demandeur d’emploi a payées auparavant ; de même, ces indemnités ne mettent pas ce même demandeur d’emploi sous assistanat mais lui apportent des revenus pendant une recherche d’emploi qui prend plein temps). S’il n’y a que 10% des chômeurs qui sont en formation, la faute ne leur incombe pas mais c’est à l’État d’apporter les financements nécessaires. Le député socialiste Alain Vidalies disait d’ailleurs très ironiquement sur la Chaîne parlementaire le 14 février 2012 que si le référendum portait sur la lutte contre le chômage, alors il répondrait oui, mais faut-il vraiment un référendum pour cela ? Le discours de Nicolas Sarkozy oscille sans arrêt entre lapalissades et stigmatisation.

Hollande cite Mitterrand

Au même moment, François Hollande prononçait un discours dans un grand meeting sur les terres fabiusiennes, à Rouen (certains disent, à tort à mon avis, que Laurent Fabius pourrait être le Premier Ministre de François Hollande). Toujours avec son ton de hachoir assez agaçant à la longue (je regrette sa jovialité d’antan !), le candidat socialiste n’a pas manqué de rappeler le beau mot de son idole après l’annonce de candidature de Valéry Giscard d’Estaing eut annoncé sa candidature le 2 mars 1981.

En effet, François Mitterrand, dans un meeting à Beauvais le 7 mars 1981, avait eu la formule acide : « Il était difficile cette semaine d’ignorer que Valéry Giscard d’Estaing avait présenté sa candidature aux Français. On aurait attendu plutôt qu’il présentât ses excuses au pays. » et un peu plus tard, il concluait : « Au lieu de présenter sa candidature, il aurait dû présenter son bilan, puis se retirer sur la pointe des pieds en souhaitant qu’on l’oublie. ».

Démagogie et propos électoralistes

Hautain, François Hollande n’a même pas su trouver ses petites phrases tout seul. Son discours de Rouen n’a rien apporté de constructif, aucune proposition concrète et surtout aucune authenticité. Après la "droitisation" de Nicolas Sarkozy, François Hollande a voulu esquisser un recentrage qui pourrait profiter à Jean-Luc Mélenchon.

En affirmant au "Guardian", le 13 février 2012, la disparition complète des communistes (« Aujourd’hui, il n’y a plus de communiste en France. »), il a dû imaginer que ces derniers ne liraient pas la presse étrangère. Mais c’est en fait bien pire qu’il a soutenu dans ce journal pour "rassurer la City", comme l’ont titré les journaux : « La gauche a gouverné pendant quinze ans, durant lesquelles nous avons libéralisé l’économie et ouvert les marchés à la finance et aux privatisations. ». Au moins, c’est (enfin) clairement dit et assumé. Oublié donc le discours du Bourget et son : « Mon adversaire, la finance ! ». Il est vraiment très intéressant de lire cet article du "Guardian" (voir aussi le NB en fin d’article). Attention aux futurs électeurs cocus !

Des Mitterrandolâtres ?

En gros, avec un petit "oui" d’évidence sur un plateau de télévision, Nicolas Sarkozy a fait son annonce "à la Mitterrand" de manière très classique. François Mitterrand avait en effet annoncé sa candidature le 22 mars 1988 dans le journal télévisé de vingt heures sur Antenne 2.

Pour un homme qui n’a aucun tabou et qui est capable des plus grandes libertés avec son expression (jusqu’à la vulgarité) et avec les valeurs (jusqu’à un électoralisme quasi-suicidaire), il est toujours étonnant de voir à quel point Nicolas Sarkozy est finalement très "classique" dans sa fonction présidentielle. On avait pu le comprendre aussi avec son portrait officiel, très classique dans la bibliothèque de l’Élysée, alors que ses prédécesseurs Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac avaient innové, l’un devant un drapeau (photographie d’ailleurs ratée) et l’autre dans le jardin du palais avec un fond vert.
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Il est quand même incroyable que les deux candidats, qu’on dit principaux et que les médias voudraient imposer au peuple français dans un second tour, ne sachent que singer François Mitterrand, le Président de la République le plus hypocrite et le moins sincère.

Vrai début de campagne

Nicolas Sarkozy a prévu de faire un meeting à Annecy ce jeudi 16 février 2012, à Marseille ce samedi 18 février 2012 et en mars, l’UMP imagine un énorme meeting probablement à Villepinte où le Président candidat voudrait réunir plus de cinquante mille militants, histoire de surpasser le meeting du Bourget du 22 janvier 2012. On serait presque en présence de vieux garçons sur le mode : "C’est moi qu’ai la plus grande" !

Après Christine Boutin le 13 février 2012, c’est au tour d’Hervé Morin (dont je reparlerai bientôt) d’officialiser son retrait de candidature et son soutien à Nicolas Sarkozy dans "Le Figaro Magazine" du 17 février 2012 : « Ma détermination ne doit pas tourner à l’obstination. ».

Des annonces qui dégagent l’horizon d’une campagne présidentielle qui se fera avec finalement beaucoup moins de protagonistes que prévu. Le show peut commencer !

Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (16 février 2012)
http://www.rakotoarison.eu

NB. Les propos dans le "Guardian" ont été légèrement modifiés le lendemain (rajoutés en gras) : « Today there are no Communists in France. Or not many… The left was in government for 15 years in which we liberalised the economy and opened up the markets to finance and privatisations. There is no big fear. ».

Pour aller plus loin :
Arrogance adroite.
Et l’État impartial ?
Hollande et son double langage.

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