« Le moment est venu de dire : C’est assez ! ça suffit ! Stop ! (…) Nous sommes depuis deux mille ans la civilisation qui refuse de faire du faible le responsable des mauvais choix du fort. (…)
Ce ne sont pas les chômeurs qui sont responsables du chômage mais les gouvernants. » (Paris, 11 février 2012).
Pour un électeur, il y a (au moins) deux manières d’aborder une élection présidentielle en France, en
sachant qu’elle régente l’ensemble de la vie politique pendant la durée du mandat présidentiel (cinq ans depuis 2002).
Soit on vote pour ses propres convictions, on cherche, par les discours, par le positionnement, par le
programme, le candidat le plus proche de soi, de son opinion, de sa pensée politique, et dans ce cas, les sondages influent peu et l’élection serait de la plus grande sincérité.
Soit on considère que cette échéance a pour but de désigner efficacement la personnalité qui sera Président
de la République à partir du 16 mai 2012 (une procédure de recrutement comme une autre).
Et dans ce dernier cas, plus pragmatique qu’idéologique, les sondages peuvent avoir une influence, difficile
à déterminer en raison des calculs et des contre-calculs (des études aux États-Unis révéleraient que cette influence serait cependant négligeable ; en France, aucune étude sérieuse n’a pu
être faite, car il faudrait mettre un échantillon représentatif de la population hors de l’espace médiatique pour qu’il ne prenne connaissance d’aucun sondage pendant les quelques semaines qui
précèdent le premier tour).
Vote utile ?
Le principe de réalité du second cas est pourtant un élément essentiel de prise en compte dans une élection.
C’est d’ailleurs l’argument du "vote utile" : voter pour des petits candidats serait inutile et ferait le
jeu des grands candidats opposés.
C’est difficile de répliquer à ce genre d’argument, car il y a du vrai et du faux : toutes les voix qui
vont vers un candidat dont on est sûr qu’il ne sera pas présent au second tour sont des voix "perdues". Mais que veut dire "perdues" ? Perdues pour désigner le Président de la République,
assurément, mais peut-être pas perdues pour faire pression auprès des candidats présents au second tour et pour les élections législatives. Avec le but de créer un rapport de forces.
Exemple typique : il y a une quasi-certitude pour que Jean-Luc Mélenchon ne soit pas présent au second tour. Voter Mélenchon pourrait donc affaiblir le score au premier
tour de François Hollande ; mais voter Mélenchon, cela pourrait au contraire forcer François Hollande
à prendre des positions plus "à gauche" dans sa campagne du second tour.
D’ailleurs, historiquement, les campagnes des grands partis de gouvernement cherchent plutôt à cliver au
premier tour (histoire de ramasser les éventuelles voix pour les petits candidats dès le premier tour) et à rassembler au second tour (pour prendre des voix chez les hésitants du camp d’en
face).
Un choix entre trois personnalités, in fine
Concrètement, à presque deux mois de l’échéance, à l’exception de la candidature de Jean-Luc Mélenchon qui
plafonne en dessous de 10% mais qui pourrait évoluer, il est certain qu’aucun des candidats n’obtenant pas 10% dans les sondages ne puisse être présent au second tour. Ce qui, en clair, signifie
qu’il n’y a que quatre candidats qui aient la capacité d’être qualifiés : deux qu’on présente comme certains d’arriver au second tour, à cause de leur forte avance, François Hollande et
Nicolas Sarkozy, et deux autres, encore assez distancés mais dont une inflexion dans la campagne pourrait
créer la surprise, Marine Le Pen et François Bayrou.
Et parmi ces quatre candidats, seule Marine Le Pen semble générer une opposition suffisamment générale pour
être sûr qu’elle ne serait jamais élue à l’issue d’un hypothétique second tour.
Donc, dans le choix tangible d’une personnalité pour désigner un Président de la République en 2012, il
n’en reste que trois : François Hollande, Nicolas Sarkozy et François Bayrou.
La situation ne semblerait d’ailleurs pas très différente dans le cas (très improbable) où Marine Le Pen ne parviendrait pas à collecter ses cinq cents parrainages.
La question palpable du 22 avril 2012, ce serait donc une sorte de plébiscite à trois dimensions, concernant
les trois personnalités citées. Un vote anti-Sarkozy, un vote anti- ou pro-Hollande ou encore un vote Bayrou (au contraire des deux autres, François Bayrou jouit de sondages de popularité qui
montrent qu’il n’inspire aucune forte défiance, même si cela ne signifie rien en intentions de vote).
Comment être gouvernés après 2012 ?
La question cruciale en
2012 est de savoir si les Français sont contents de la manière dont ils sont gouvernés depuis 1981, c’est-à-dire depuis plus de trente ans.
Car au contraire des mandats d’avant 1981, le pouvoir est désormais concentré par le représentant de
l’Exécutif (pouvoir du prince) qui est en même le chef de facto du parti majoritaire (pouvoir parlementaire).
Que ce soit en période ordinaire ou en période de cohabitation, celui qui a détenu le pouvoir avait également
l’ascendant sur le grand parti majoritaire, ce qui a rendu les parlementaires peu autonomes. Cela a été pour François Mitterrand en 1981 et 1988, pour Jacques Chirac en 1986, 1995 et 2002, pour Édouard Balladur en 1993, pour Lionel Jospin en 1997 et pour Nicolas Sarkozy en 2007.
Il est clair désormais que ce serait le cas également en 2012 dans l’hypothèse d’une réélection de Nicolas
Sarkozy ou d’une élection de François Hollande. Que ce soit pour l’UMP ou pour le PS, dans tous les cas, leurs parlementaires seraient soumis à l’effet godillot par nécessité (les élections législatives arrivant juste après l’élection présidentielle).
Un État impartial
Une telle configuration met à mal l’impartialité de l’État. L’État impartial n’est pas un thème nouveau : il avait été le thème principal de la campagne présidentielle
de Raymond Barre en 1988 pour s’opposer à la fois à l’État RPR et à l’État PS.
Aujourd’hui, il est devenu presque anodin que l’UMP devienne un parti qui régisse toutes les nominations dans
la haute fonction publique.
Mais parallèlement, en cas de victoire du PS, le risque d’un nouvel État PS serait bien réel. Pour preuve,
cette rencontre de François Hollande le 10 janvier 2012 avec trois
cents hauts fonctionnaires (ambitieux) leur expliquant ceci : « Je sais que certains d’entre vous sont aussi là parce qu’ils cherchent des
postes. Ils ont raison, car des postes, il y en aura. ». Bonjour l’État impartial que le candidat socialiste a eu le toupet de revendiquer le 6 février 2012 !
Dans ce contexte, un seul candidat capable d’être élu Président de la République le 6 mai 2012 et qui
peut garantir à l’ensemble du peuple français l’impartialité de l’État : c’est François Bayrou.
Pour une raison assez simple : son point faible dans cette élection, à savoir l’absence d’un grand parti
derrière lui capable d’obtenir une majorité à l’Assemblée Nationale, est devenu un point fort dans cette quête sincère d’un État impartial. La garantie d’être un arbitre et pas un monarque.
En cas d’élection, François Bayrou serait en effet dans l’obligation de composer avec une majorité
parlementaire diversifiée issue d’horizons différents. Cette absence de majorité béton est l’assurance d’une renaissance du débat parlementaire où la partition ne serait plus déjà jouée avant
qu’elle ne soit écrite.
L’État impartial, c’est aussi la solidarité avec tous les Français
L’État impartial, c’est également un État qui cherche à maintenir la cohésion nationale, qui prône le
rassemblement de tous les Français et évite tous les anathèmes sur une catégorie de personnes. Ce sont ces valeurs républicaines, peu éloignées du gaullisme social, que François Bayrou a souhaité
mettre en avant en réagissant à l’interview musclé de Nicolas Sarkozy dans "Le Figaro Magazine" du 11 février 2012.
En insistant sur la solidarité, François Bayrou a prononcé, à la Maison de la Chimie à Paris le 11 février
2012, un discours résolument rassembleur : « Cette
solidarité qui fait qu’un peuple, une société, une nation ne sont pas formés de personnes étrangères les unes aux autres, chacune s’occupant de son propre avenir, mais qu’il y a entre nous des
liens qui font que nul n’est abandonné, singulièrement pas les plus faibles, nul n’est oublié, singulièrement pas celui qui a des difficultés, nul n’est laissé de côté, singulièrement pas les
plus fragiles. ».
C’est une question de valeurs : « Ces valeurs
correspondent à l’idée que chaque être humain est en soi un absolu. Il peut être malade, paralysé, sans capacité de production, génial, formidablement entreprenant… Il n’y a pas
de différence, pas de balance où l’on pèse celui qui sert et celui qui ne sert pas. On ne peut soutenir l’un et abandonner l’autre. Et c’est cela notre choix. Et ce choix-là est en effet,
puisqu’ils aiment utiliser le mot, c’est un choix de "civilisation". ».
Entre la peur et la colère, il y a l’espérance
L’État impartial, c’est redonner le pouvoir d’initiative de la loi aux parlementaires.
L’État impartial,
c’est ne pas imposer un parti dans l’ensemble des centres de décisions.
L’État impartial, c’est ne pas diviser les citoyens par des provocations
électoralistes.
L’État impartial, c’est ne pas promettre qu’on rase gratis quand il faut réduire la dette publique (Le dernier rapport de la Cour des
Comptes dirigée par le socialiste Didier Migaud, téléchargeable ici, a désavoué le 8 février 2012 les propositions économiques de Nicolas Sarkozy et de
François Hollande).
L’État impartial, c’est ne pas s’engager dans un scénario à la grecque.
L’État impartial, c’est peut-être aussi ne pas aller au dîner du CRIF pour mieux défendre la laïcité.
L’État impartial, c’est encore protéger les
plus faibles et ne pas instituer un droit de tuer qui se révèle très dangereux aux Pays-Bas et en
Belgique.
D’un côté des valeurs républicaines mises à mal par le « choix
d’un certain nombre de cibles proposées à l’exaspération collective », de l’autre un Parti socialiste tout puissant et revanchard, sans conscience de la situation de grave crise, prêt à
mettre à mal le désendettement de la France par des considérations clientélistes, est-ce donc cette alternative que veulent nous imposer les médias ?
Pourtant, rebâtir un État impartial avec toutes les personnes de bonne volonté, hors des intérêts
particuliers et des passions déraisonnables, c’est possible dès 2012.
Aussi sur le
blog.
Sylvain Rakotoarison (15 février
2012)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Les naufrageurs,
dehors !
Le
rassemblement des Français.
Les surprises de 2012.
L’union nationale.
Les valeurs aujourd’hui.
Les candidats à l’élection présidentielle.
Le problème du quinquennat.
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/l-etat-impartial-c-est-bayrou-110228
http://rakotoarison.hautetfort.com/archive/2012/02/15/bayrou-etat-impartial.html