Trois jolies jeunes femmes.
Elles sont sans nom, puisque qu'elle ne sont que concept dans les yeux de bien des hommes.
J, V, JJ.
Dans le regard masculin, elles sont la femme décorative, dans le plus pur esprit des années 60.
Le magasin où elles posent à leur kiosque de parfum est construit dans le style des années 60. C'est une thématique de l'endroit, sa couleur, son style. Il s'agit du magasin Sixties. Mais les trois filles sont bien des femmes de 2012. Elles vendent du parfum à qui voudrait bien en acheter. Officiellement en compétition puisque vendant des produits différents, pour des grandes maisons différentes, elles sont toutefois bonnes amies.
On leur demande d'incarner le style des années 60 à leurs comptoirs. Il y a même un vieux jukebox dans le coin du café dans le magasin à rayon.
Les trois filles sont si jolies que les clients masculins font souvent semblant de s'intéresser à leurs produits en cachant leur réèl motivation plus axée sur le flirt. Les patrons ont vite compris. Le désir vend. Ils ont placé les trois filles dans l'entrée du magasin. J s'est toujours promise de ne jamais céder aux avances d'un client. Les fragrances qu'elle vend sont les plus coûteuses, les italiennes. Elle a donc plus de maris, souvent plus riches, qui lui demandent de faire un choix à leur place. Pour leur femme. Il n'y a rien de charmant là-dedans. L'homme est marié et J garde alors pour elle sa ligne "vous savez toutes les peaux ont des odeurs différentes, l'impact de cette fragrance sur la peau de votre femme ne sera pas la même que celle sur votre peau ou même sur la mienne". Elle se prête toutefois au jeu de poser sur elle certaines fragrances pour que ces hommes l'hument sur elle. Elle sait qu'elle leur fait plaisir en les laissant se pencher dans son cou ou sur son avant-bras. Cette proximité doit leur procurer la sensation de s'être rapproché davantage. La vente est presque toujours assurée dans ses conditions. Ses ventes sont trop bonnes, les commissions trop importantes. Rarement se sent-elle en insécurité face à ses ventes. Juste en amour, se sent-elle quelques fois, incertaine.
V est aussi fort jolie. La plus ancienne au rayon des parfums, elle se trouve au centre des kiosques des deux autres. Faussement blonde, elle sait exactement l'effet qu'elle produit sur les clients. Les femmes sont rassurées par sa beauté qui semble naturelle, par son expertise qui lui confère un air maternel et par ce côté sexy retro qu'elle assume pleinement. Belle comme ça, on est mère à 35 ans. Ce que V est. Ce qui ne l'empêche pas d'avoir l'air d'une jeune fille dans ses petites robes d'été. C'est sa bouche et ses yeux qui attirent d'abord les regards mais ses cuisses sont aussi fort attirantes pour l'oeil du mâle d'Amérique. Elle sait en jouer sans jamais paraître putassière. Le style des années 60 commandé par la magasin lui va fort bien et elle en est ravie. V est celle des trois qui s'est le mieux intégré au style sixties. On savait qu'elle avait trouvé son rôle et n'en chercherait pas d'autre. Comme c'était elle qui tenait un kiosque dans ce magasin depuis le plus longtemps, c'était elle en quelque sorte, le coeur du trio. C'est elle qui bravait la route que les deux autres appelaient "du chemin de fer du viol" quand elle se rendait au travail.
JJ est la plus jeune. Pas encore 30 ans. La plus mélancolique aussi. Souvent c'est elle qui remetterait en question toutes les politiques de la maison de parfum qui l'engageait. Si l'une d'entre elle devait quitter son poste sur un coup de tête c'est JJ qui l'aurait fait. Elle peut quelque fois plonger dans une "zone" qui lui est bien à elle. Les deux autres savent quand la laisser tranquille quand elle tombe dans la lune avec ses beaux yeux tristes.
Voilà 8 ans que JJ et V se côtoient et 6 que les trois femmes travaillent au même endroit dans le bonheur. Il y avait toujours eu foule. Surtout les week-ends. Elles ne voyaient pas leur journée passer ces jours-là. Elles chérissaient les lundis, mardis mercredis, beaucoup plus tranquilles, ce qui leur donnait la chance d'errer et de papoter davantage pendant que les patrons calculaient les caisses du week-end ailleurs ou dans les bureaux.
On peut dire que les trois filles avaient une bonne chimie entre elles. Elles étaient toutes d'une beauté racée. Le jeune trio parmi les employées plus anciennes ou plus matantes, voire grand-maman.
Les trois poseuses se sont regardés une dernière fois, ont eu les yeux pleins d'eau et ont compris.
Il n'existeraient plus l'une pour l'autre que par le passé.
Rien à craindre, elles étaient jeunes, belles, et désirées.
Elles avaient été imperméables aux échecs toute leur vie, ça ne commencerait pas aujourd'hui.
Il faudrait maintenant poser ailleurs.
Pour de nouveaux secrets admirateurs.
Dans une vitrine peut-être aussi datée.
Jeunes, belles et désirées.