Quand l'amour et l'amitié se mêlent cela fait parfois d'excellents romans
En voici un dont vous pourriez penser que je l’ai choisi pour être en accord avec la météo, et bien pas du tout, je l’ai choisi d’abord pour l’auteur dont j’avais lu deux romans qui m’avaient laissé un très bon souvenir, et puis mon oeil a été attiré par l’éditeur dont je surveille les publications car mes lectures de Walden et du Pays des petites pluies m’ont rendu très attentive.
Un haut pays, celui déserté et à moitié sauvage d’une Drôme où vit l’auteur de ce roman.
Quatre personnages vont aller les uns vers les autres, comme pour un rendez-vous secret, au gré d’enfances saccagées, de vies marquées par la malchance, gâchées par la violence.
1965 Deux frères se retrouvent orphelins, la violence a été telle que Daniel ne parlera plus et que Richard et lui vivront un jour reclus dans leur misérable ferme des Rabasses. Daniel s’occupe de son troupeau de brebis et Richard s’est fait ferrailleur mais il lui arrive de gratter la guitare et écoute Bob Dylan en boucle.
Alice aussi est du pays, les deux frères l’ont vu grandir, ils l’aiment bien, elle est même capable de créer des liens avec Daniel le mutique qui écrit dans son journal « Alice, c’était ma fée d’hiver ». Ses frères Robert et Pierre, c’est pas pareil, des méchants, des tordus ceux là.
Le temps passe et Alice se marie avec Louis un lointain cousin et travaille à la scierie familiale.
1998 Et voilà qu’apparaît le dernier personnage du quatuor : Vladimir, bûcheron clandestin arrivé des Balkans. Il a fuit un passé douloureux, a traversé un pays dévasté « Il traversait de maigres villages déserts, croisait des fermes éparpillées ou de muets hameaux juchés à flanc de coteaux, tous accablés. Il longeait des terres sans horizon, sans un seul arbre, un paysage morne et moribond, où même le silence semblait s’être retiré ».
Après les passages de frontières, la clandestinité un beau jour il sait qu’il est arrivé
« De minces particules de lumière peignant les ombres convergeaientt vers la ligne de partage des eaux, entre la vallée de l’Ouvèze et celle de la Méouge »
Ils vont marcher les uns vers les autres, affronter le passé, se créer une nouvelle vie. Ils vont se tenir chaud, se protéger, s’apprivoiser, fraterniser en faisant fi des cicatrices qu’ils portent tous.
J’ai appris en lisant sa biographie chez l’éditeur qu’André Bucher est un grand lecteur de Jim Harrison et Rick Bass, rien d’étonnant que je me sois sentie si bien dans ce roman.
L’écriture donne un grand plaisir, le genre de roman qu’on lit lentement en se délectant des images, on s’attache aux personnages, on partirait bien à la découverte des lieux pour y voir filer les saisons. Un roman que l'on garde précieusement.
Le livre : Fée d'hiver - André Bucher - Editions Le Mot et le Reste