Grèce : "il ne peut y avoir une réduction suffisante des déficits publics sans croissance !"

Publié le 14 février 2012 par Letombe

François Hollande était l'invité de Jean-Jacques Bourdin pour l'émission "Bourdin 2012" sur RMC et BFMTV. A cette occasion, il est notamment revenu sur la situation politique et économique de la Grèce. A cette occasion, il a refusé la rigueur comme seule solution de réduction des déficits, pour la Grèce comme pour l'Europe.


Bourdin 2012 : par BFMTV

Retrouvez également le script de la première partie de cette intervention :

Jean-Jacques BOURDIN

François HOLLANDE est notre invité ce matin. Bonjour.

François HOLLANDE

Bonjour.

Jean-Jacques BOURDIN

Où serez-vous demain soir à 20H00 ?

François HOLLANDE

Demain soir à 20H00, d’ailleurs j’invite tous ceux qui peuvent s’y rendre, je serai en meeting à Rouen, ma ville de naissance, et je suis donc tout au long de la journée à Rouen, et je ferai donc réunion publique le soir.

Jean-Jacques BOURDIN

Et pendant ce temps-là Nicolas SARKOZY sera sans doute sur TF1 pour annoncer sa candidature. Est-ce que vous en parlerez demain soir ?

François HOLLANDE

Je ne sais pas à quelle heure, donc visiblement c’est à 20H00.

Jean-Jacques BOURDIN

Apparemment. Apparemment.

François HOLLANDE

On peut penser qu’il ne vient pas au journal de 13H00…

Jean-Jacques BOURDIN

Apparemment.

François HOLLANDE

Donc écoutez, je n’ai pas de raison d’en parler puisque mon meeting se tiendra, ça me permet encore d’être plus précis, à 18H30. Mais vous savez c’est un événement, et bien sûr je comprends, une déclaration de candidature ce n’est pas rien, surtout pour un président sortant, mais enfin, ce n’est pas une surprise. Moi je ne me suis pas déterminé par rapport à Nicolas SARKOZY. Vous vous rendez compte, Jean-Jacques BOURDIN, je suis candidat déjà depuis 1 an, 1 an que j’ai présenté moi-même ma candidature aux Français, c’était à Tulle, et c’était dans le cadre, d’abord des primaires citoyennes du Parti socialiste. Ça fait 1 an que je multiplie les rencontres, les propositions. Alors, il peut y avoir un candidat qui a un autre calendrier que moi, et je le comprends parfaitement, qui a utilisé pleinement les moyens de l’Etat, ces dernières semaines, pour lui-même faire campagne, mais ça ne me détourne en rien de mon objectif. Mon seul objectif, ce sont les Français.

Jean-Jacques BOURDIN

Bien. Votre objectif ce sont les Français. Mais, franchement, est-ce que vous attendez avec impatience ce face à face, François HOLLANDE ? Franchement.

François HOLLANDE

Mais d’abord, ce serait prétentieux de dire qu’il y aura un face à face, il y a plusieurs candidats. Qui sait qui seront les candidats au second tour ? Moi je suis humble et modeste. Je demande aux Français de venir voter massivement au premier tour, je souhaite être au plus haut au premier tour, mais je ne sais rien encore de l’ordre d’arrivée, donc je fais en sorte de respecter, et les calendriers, et les autres candidats.

Jean-Jacques BOURDIN

Vous voilà modeste. Je vous sens modeste là. Prudent.

François HOLLANDE

Non, ni modeste, ni prudent, je suis respectueux des Français.

Jean-Jacques BOURDIN

Vous avez entendu ce que dit Nicolas SARKOZY, je le cite : « ça fait des mois qu’il est en campagne » - le « il » c’est vous – « il a fait sa première grande télé, son premier grand meeting, et aucune de ses propositions n’imprime. Il suffit que je fasse une interview dans LE FIGARO MAGAZINE, et tout le monde réagit. »

François HOLLANDE

Là, ça ce n’est pas humble ni modeste, vous en conviendrez, c’est son tempérament. Lui ça fait 5 ans qu’il est président, 5 ans qu’il a donné ce qu’il pouvait offrir aux Français, 5 ans qu’il a réalisé ou pas réalisé ses promesses, donc il sera jugé sur son bilan, sans doute aussi sur son projet, pour ce que j’en sais.

Jean-Jacques BOURDIN

Est-ce qu’il veut esquiver ce bilan selon vous ?

François HOLLANDE

Je crois, parce que s’il était flatteur, aurait-il besoin de se lancer, tête perdue, dans une somme d’annonces dont on ne sait pas d’ailleurs si elles son véridiques ou si elles sont simplement des ballons d’essai. J’entendais encore ce matin la fin du statut de la fonction publique démentie sans l’être vraiment. Ecoutez, franchement, quand il y a un président…

Jean-Jacques BOURDIN

Qu’est-ce que vous répondez d’ailleurs sur la fin du statut de la fonction publique, des fonctionnaires ?

François HOLLANDE

Mais c’est une protection, pas pour les fonctionnaires, c’est une protection pour les Français d’avoir le statut qui donne de la neutralité, de la continuité, des devoirs, parce qu’il y a un recrutement par concours, avec un agent public qui doit respecter les règles du service public, c’est une protection pour les Français, et ce n’est pas au moment où il y a déjà de la précarité qu’il faudrait en mettre davantage. Enfin, je n’ai rien compris à cette proposition, sauf, là encore, à vouloir faire du bruit. Le rôle d’un candidat n’est pas de faire du bruit, ce n’est pas de diviser, ce n’est pas de stigmatiser, ce n’est pas d’opposer, ce n’est pas de désigner un adversaire, un adversaire en plus dans le pays. Moi mes valeurs, comme vous dites, mes valeurs ce sont celles de la République, et si je prépare à être président, c’est pour réunir les Français. J’ai bien compris que tous ne voteront pas pour moi, il y aura sûrement, si je suis élu, 47, 48, 49%, qui n’auront pas voulu de ma candidature, et alors ! Je ne vais pas les montrer du doigt, je ne vais pas les dénoncer. Je considère que le rôle qui sera le mien ça sera de réunir. Parce que, si nous voulons redresser, et je le veux, mon pays, il faudra bien le concours de tous, y compris de ceux qui n’auront pas voté pour moi.

Jean-Jacques BOURDIN

Nous allons entrer dans le concret de vos propositions, revenir sur certaines de vos propositions, mais les valeurs de Nicolas SARKOZY ont été exposées, travail, responsabilité, autorité.

François HOLLANDE

Eh bien prenons-les une après une.

Jean-Jacques BOURDIN

Eh bien oui, le travail.

François HOLLANDE

Le travail. Est-ce que ça a été une valeur respectée pendant les 5 ans, quand il y a 4 millions de personnes qui sont privées d’emploi, de façon totale ou partielle ? Est-ce que c’est une valeur qui a été respectée quand la rente, la spéculation, la finance, ont été à ce point protégées ? Est-ce que c’est une valeur qui a été respectée quand la fiscalité du travail est plus lourde que la fiscalité du capital ? Est-ce que c’est une valeur qui a été respectée quand beaucoup de jeunes ne peuvent pas, alors qu’ils ont fait tout le parcours nécessaire, entrer dans l’emploi ? est-ce que c’est une valeur qui a été respectée quand on a défiscalisé les heures supplémentaires – ce qui pourrait laisser penser que le travail est mieux rémunéré – alors que tant d’autres veulent travailler tout simplement ?

Jean-Jacques BOURDIN

Vous les refiscalisez ces heures supplémentaires.

François HOLLANDE

On remettra bon ordre, c'est-à-dire il est normal qu’il y ait des heures supplémentaires, c’est bien qu’elles soient majorées, c’est bien que ceux qui travaillent plus longtemps puissent gagner davantage, mais est-il besoin pour ça d’exonérer le patronat de toute cotisation sociale, ce qui fait que finalement ceux qui veulent rentrer dans l’emploi n’y parviennent pas, que les jeunes en soient dissuadés. Voilà pourquoi je ferai en sorte de réhabiliter le travail.

Jean-Jacques BOURDIN

La responsabilité.

François HOLLANDE

La responsabilité ça commence au plus haut sommet de l’Etat, quand celui qui a pris des engagements et ne les a pas respectés, il doit venir devant le pays s’en expliquer, c’est ça le principe de responsabilité.

Jean-Jacques BOURDIN

C’est ce qu’il va faire. C’est ce que va faire le président de la République.

François HOLLANDE

Ce n’est pas ce que j’ai entendu…

Jean-Jacques BOURDIN

Le candidat Nicolas SARKOZY.

François HOLLANDE

Je n’ai pas entendu une espèce de autopromotion, enfin la promotion, plutôt, de lui-même, mais pas une auto-désignation de ses erreurs et de ses fautes.

Jean-Jacques BOURDIN

Et l’autorité.

François HOLLANDE

L’autorité cela suppose, là encore, de respecter les pouvoirs. Est-ce que c’est une autorité qui décide de tout, sur tout, partout, pour tous ? L’autorité c’est être capable de soi-même être respecté. Est-ce que vous pensez que, aujourd’hui, le candidat sortant est respecté ? S’il l’était, eh bien son élection…

Jean-Jacques BOURDIN

Il n’est pas respecté par les Français ?

François HOLLANDE

S’il l’était pas les Français, s’il l’était pleinement…

Jean-Jacques BOURDIN

Pourquoi n’est-il pas respecté, à vos yeux ?

François HOLLANDE

Parce que sans doute y a-t-il eu des promesses qui n’ont pas été tenues.

Jean-Jacques BOURDIN

Pourquoi ? Il a menti aux Français, il a trompé les Français, pourquoi ?

François HOLLANDE

Je ne sais pas s’il leur a menti, parce qu’il y a toujours une part de sincérité. Je ne sais pas s’il les a trompés, je ne crois pas qu’il l’ait fait exprès, mais il se trouve qu’il a fait une campagne en 2007, qu’il a ensuite été président pendant 5 ans, il a tenu des propos durant ce mandat. S’il était, finalement, sûr de son fait, d’abord il ne se précipiterait pas à être candidat dès à présent, il avait dit que ce serait plus tard, et deuxièmement, s’il était sûr de son fait, il défendrait son bilan, il se montrerait confiant dans sa réélection. Je ne crois pas que ce soit le cas. Mais moi je ne veux pas passer mon temps sur…

Jean-Jacques BOURDIN

Oui, à parler de Nicolas SARKOZY, mais je voudrais…

François HOLLANDE

Sur Nicolas SARKOZY, je veux…

Jean-Jacques BOURDIN

Que vous nous parliez de vos valeurs.

François HOLLANDE

Oui.

Jean-Jacques BOURDIN

Justement, vous allez en parler, je crois demain soir à Rouen et dans un livre qui va sortir le 23, « République et Nation », quelles sont ces valeurs que vous défendez ?

François HOLLANDE

Mes valeurs sont celles de la République, la liberté, qui doit être jusqu’au point de menacer celle des autres.

Jean-Jacques BOURDIN

Quelles sont les valeurs que vous allez avancer tout au long de cette campagne ?

François HOLLANDE

La considération, le respect, j’ai beaucoup insisté là-dessus, la considération. Beaucoup de Français sont prêts à faire des efforts, mais ils veulent que nous puissions regarder leur situation avec une attention particulière. Chacun peut être un atout pour la France. La justice, ça c’est une grande valeur…

Jean-Jacques BOURDIN

Mais les Français ne sont-ils pas trop assistés ? François HOLLANDE.

François HOLLANDE

Mais demandez à ceux qui sont chômeurs, ceux qui cherchent un emploi, s’ils sont des assistés. Demandez à ces jeunes, qui sont précaires, s’ils sont des assistés. Demandez à ces personnes âgées, qui ont une petite retraite, si elles sont des assistées. Demandez à ceux et à celles qui peinent à accéder aux soins, si ce sont des assistés. Donc, ayons là aussi de la considération. Il y a des règles sociales dans notre pays. J’ai insisté sur la justice, la justice, moi je pense que l’effort est nécessaire, je pense d’ailleurs que c’est normal que ceux qui travaillent, que ceux qui ont du talent, que ceux qui font des efforts particuliers doivent être récompensés, mais que ça se fasse dans la justice aussi. On ne peut pas demander toujours aux mêmes, regardez là, cette histoire de TVA, on va demander aux Français de payer un impôt de plus, alors que…

Jean-Jacques BOURDIN

Justement, vous confirmez que vous revenez sur la TVA sociale, si vous êtes élu.

François HOLLANDE

Mais bien sûr, parce que c’est un impot injuste, et en plus il n’aura aucun effet sur le plan économique puisque le rapporteur général du Budget, qui est UMP, qui est un homme tout à fait, là encore, sérieux, dit que cette mesure ne va avoir aucun effet, ou presque, sur l’industrie, mais va être diffusée à toutes les entreprises sans aucune contrepartie, la baisse des cotisations familiales. Donc, pourquoi aller faire payer un impot aux Français, une TVA, qui va déprimer la consommation, sans impact sur l’économie ?

Jean-Jacques BOURDIN

Est-ce que vous pensez qu’une partie l’UMP n’est pas favorable à cette TVA sociale, ce qui expliquerait ce qui s’est passé à l’Assemblée nationale ?

François HOLLANDE

Mais enfin ils n’ont pas l’air d’être enthousiastes. S’ils étaient tout à fait confiants dans la mesure, tout à fait convaincus, ils seraient venus en masse voter, et en commission, et bientôt à l’Assemblée. Je n’ai pas l’impression qu’ils soient eux-mêmes persuadés.

Jean-Jacques BOURDIN

C’est une manœuvre du PS, dit l’UMP.

François HOLLANDE

Enfin, il n’y a aucune manœuvre, on a tous connu, à des moments différents de la vie parlementaire, ce type d’incident. Mais quand même, à la fin d’un mandat, vous n’inventez pas une procédure pour changer le mode de financement de la protection sociale, ça, ça peut se défendre dans une campagne présidentielle, et moi-même j’ai dit qu’il ne fallait pas fiscaliser toujours le travail, notamment pour financer la protection sociale, mais prendre en compte le capital et aussi les facteurs de pollution. Il n’est pas normal qu’une entreprise qui se comporte mal par rapport à la nature, ne paye aucun impot, quand une autre qui va être respectueuse, en paye peut-être un parce qu’elle a des salariés nombreux dans son entreprise.

Jean-Jacques BOURDIN

Alors, sur vos valeurs, trois mots, trois valeurs que vous allez défendre.

François HOLLANDE

Justice, efforts, parce qu’il en faut, et dignité, dignité. Parce qu’il n’y a rien…

Jean-Jacques BOURDIN

Justice, efforts, dignité.

François HOLLANDE

Il n’y a rien de plus beau pour un individu d’être en confiance par rapport à lui-même et par rapport à son pays.

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