Plus de trente ans après Madeleine Renaud, vingt cinq ans après Denise Grey, dix sept ans après Danielle Darrieux, Line Renaud s'empare à son tour du rôle de Maude, joyeuse et tendre mamie marginale un peu baba, à laquelle l'actrice donne toute son énergie et son humanité, dans un spectacle à la mise en scène inventive, inspirée, aux effets efficaces et à l'impeccable distribution.
Vous connaissez probablement le pitch de l'oeuvre de Colin Higgins adaptée par Jean-Claude Carrière (qui sauf erreur de ma part a subi ici quelques coupes profitables). Harold, dix-huit ans passés, est un garçon de bonne famille solitaire et renfermé aux idées morbides, passant ses journées à assister aux enterrements d'inconnus ou à mettre au point de faux suicides. Il fait le désespoir de sa mère, Madame Chasen, qui tente en vain de lui trouver une épouse. Son chemin croisera celui de Maude, quatre vingts ans, en qui il trouvera sa première complice, et son premier amour.
Solidement ancré dans le début des 70's, le propos "carpe diem" et "peace and love" pourrait paraître désuet si Ladislas Chollat, metteur en scène, ne l'avait pas subtilement traité, tant dans sa direction d'acteurs que dans ses choix de scénographie et costumes, et si la pièce ne comportait également d'excellents moments de comédie.
Dans ce registre, c'est la brillante Claire Nadeau qui mène la danse, composant une savoureuse Madame Chasen. En bourgeoise légèrement débridée et affligée, elle provoque les rires à chacune de ses apparitions. Soulignons également le soin apporté aux rôles plus modestes. Sophie Bouilloux est parfaite en bonne hystéro subissant les canulars sanglants d'Harold avant de recourir à la marijuana pour rester zen. Chloé Catrin, quant à elle, fait montre de l'ampleur de son talent en campant consécutivement et assez irrésistiblement les trois prétendantes du fils Chasen.
Thomas Solivéres, pour sa part, est un Harold complexe, mystérieux et plein de candeur, s'épanouissant joliment au contact de Maude. L'élégant, poétique et improbable couple qu'il forme avec Line Renaud fonctionne parfaitement et réussit à émouvoir le spectateur.
En conclusion, nonobstant un texte qui indéniablement prend des rides au fil des ans, et quelques erreurs minimes de mise en scène (à l'image de cette otarie en peluche censée être vivante qu'il conviendrait de remiser urgemment en coulisses, ou de la séquence fort brève mais non moins grotesque durant laquelle Line Renaud bêche le plancher du théâtre avec une pelle), le spectacle, s'il n'est pas inoubliable, se révèle fort plaisant.
Un excellent travail de troupe.
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