Les OGM n'ont toujours pas conquis l'Europe mais selon un récent rapport, les surfaces de cultures génétiquement modifiées ont progressé de 8 % en 2011, atteignant 160 millions d'hectares à travers le monde.
L'ISAAA (International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications), un think tank qui promeut les biotechnologies, ne voit certainement que des bonnes nouvelles dans son rapport annuel qui vient d'être publié. En effet, depuis les premières autorisations de cultures dans les années 90, les OGM ne cessent de gagner du terrain. Au total en 2011, 16,7 millions d'agriculteurs ont semé des OGM, dans 29 pays dont 19 en voie de développement. Des cultures génétiquement modifiées dominées par quatre espèces : le maïs, le coton et le colza ; et les deux mêmes modifications génétiques ; tolérance à un herbicide et production d'insecticide.
Les pays en développement : en tête de la course pro-OGM
"Les cinq pays chefs de file du développement des cultures biotechnologiques sont la Chine et l'Inde en Asie, le Brésil et l'Argentine en Amérique latine, et l'Afrique du Sud sur le continent africain", indique l'étude.
Si les Etats-Unis restent le principal producteur de cultures biotechnologiques avec 69 Mha, le Brésil, qui occupe la deuxième place avec 30,3 Mha, est considéré comme "le moteur de croissance des cultures biotechnologiques" car il a augmenté ses cultures OGM de 20 % en l'espace d'un an.
Le taux de croissance de ces cultures dans les pays en voie de développement a été de 11 % en 2011, soit un niveau deux fois plus élevé que celui des pays industrialisés. "Les pays en voie de développement ont planté environ 50 % des cultures biotechnologiques mondiales en 2011 et dépasseront probablement le nombre d'hectares des pays industrialisés en 2012 ", rapporte également l'Isaaa.
Le rapport salue particulièrement les " bons résultats " de la Chine et de l'Inde. Mais l'Isaaa ne mentionne à aucun moment les réticences du gouvernement chinois, qui s'oppose toujours à l'introduction de la culture d'une variété de riz génétiquement modifiée. Même omission pour l'Inde, qui malgré d'importantes surgaces de cultures de coton génétiquement modifié, reste fermement opposée à l'arrivée d'OGM dans certains Etats, comme le Kérala. Un moratoire sur l'aubergine Bt de Monsanto a d'ailleurs été décrété pour une durée indéterminée, après que les autorités aient relevé plusieurs actes de biopiraterie.
L'Europe résiste... pour combien de temps ?
A l'inverse des pays en développement, l'Europe reste réticente aux cultures OGM, qui n'occupent que 114 490 hectares dans 8 pays que sont l'Espagne, le Portugal, la République tchèque, la Pologne, la Slovaquie et la Roumanie. Cependant, la législation européenne autorise la commercialisation et la culture d'OGM pour la nourriture des animaux d'élevage.
On notera aussi que l'Allemagne est classée dans les pays qui cultivent moins de 0,1 million d'hectares... " Effectivement, en 2011, nos voisins outre-Rhin ont cultivé 2 ha de pomme de terre Amflora (ndlr : un OGM développé par le groupe allemand de la chimie BASF) ", rappelle l'association Inf'OGM dans un communiqué. Mais cet infime pourcentage lié aux cultures d'expérimentation pourrait bien disparaître en 2012 puisque la section biotechnologies de BASF a récemment quitté l'Allemagne, préférant se concentrer sur les marchés porteurs, regroupés sur le continent Américain.
Loin de toute objectivité, l'Isaaa regrette cette résistance européenne qui s'exprime à travers l'action des associations écologistes, des syndicats de l'agriculture durable mais aussi des partis politiques " les questions (autour de ce sujet) ne sont pas liées à la science et à la technologie, mais à des considérations de nature politique et influencées par des vues idéologiques de groupes activistes " souligne l'organisation pro-OGM.
Des statistiques controversées
On l'aura donc bien compris, ce rapport - s'il à le mérite d'être un des seuls état des lieux global - est à considérer avec prudence. Les organisations écologistes, unanimes, dénoncent un manque d'objectivité et des statistiques approximatives. Sur son site, l'association Inf'OGM juge ainsi que " les sources et la méthodologie ne sont toujours pas transparentes " et précise que " pour de nombreux pays, l'Isaaa s'appuie sur des chiffres fournis par l'industrie. " Pour la section européenne des Amis de la terre "les données utilisées dans le rapport de l'Isaaa ne sont pas claires. Mis à part les États-Unis et plusieurs pays européens, très peu de gouvernements enregistrent les cultures génétiquement modifiées et conventionnelles séparément. " La part d'ombre reste donc importante.
Olivia Montero