C’est ce qu’il m’est arrivé avec « L’homme à la tête de chou ». Je n’en savais pas grand chose. Si ce n’est bien sûr que c’était associé à Gainsbourg. Mais qu’avait-il vraiment fait là-dedans, je n’en savais trop rien. Arrivé dans la salle de spectacle à Louvain-la-Neuve, j’eus une certaine gêne en survolant le papier de présentation. Ce n’était pas la voix de Gainsbourg qu’on allait entendre, mais celle de Bashung ! De plus, ce n’était pas un spectacle de chanson, mais une chorégraphie !
Gainsbourg, j’aime à moitié. Mais je sais que dans son genre, c’est un génie. Bashung, je dois bien avouer que je n’aime pas vraiment. J’ai plusieurs amis qui le considèrent comme un dieu vivant (ah non, lui aussi est mort). Mais personnellement, je ne suis jamais parvenu à vibrer pour ce rock ténébreux, cette voix en recul, ce personnage hors du temps. La danse, enfin, je n’ai rien contre, mais j’ai du mal quand même. Il y a 40 ans, j’avais assisté pour la première fois à une chorégraphie de Béjart. Ça m’avait bien plu, mais sans doute surtout parce que durant le spectacle ma main avait trouvé pour la première fois la main de celle qui allait me faire découvrir l’amour ! Mais à part ça…
Bref, je me sentais mal barré. Un spectacle en pleine semaine alors qu’il fallait encore travailler tôt le lendemain. Et une première approche qui n’annonçait rien de bon.
Pourtant, ce fut bon. Excellent même ! Gainsbourg reste le maître des mots, surtout de ceux qu’on croit ne pouvoir combiner avec aucun autre. Les mouvements de danse, d’une densité et d’une sensualité incroyables, m’ont rappelé Béjart tout en ouvrant un tout autre univers. Et la voix de Bashung m’a envoûté. Il y avait là une harmonie parfaite. Pourtant, c’est un spectacle dur, délirant, où l’on sombre dans la folie en même temps que… tous les artistes.
Ce spectacle m’a profondément bouleversé justement parce que je ne m’y attendais pas. Il est donc encore possible de s’émouvoir !