Berenice Abbot au Jeu de Paume

Par Blogegide

Après l'exposition consacrée à Gisèle Freund à la Fondation Pierre Bergé - Yves Saint-Laurent, le Musée du Jeu de Paume présente pour la première fois en France une grande rétrospective des œuvres de la photographe Berenice Abbott (1898-1991). A voir du 21 février au 29 avril 2012.
Présentation de l'exposition :
Avec plus de cent vingt photographies, des ouvrages originaux et une série de documents inédits, cette rétrospective dévoile, pour la première fois en France, les multiples facettes de l’oeuvre de la photographe américaine Berenice Abbott (1898‑1991), notamment célèbre pour avoir oeuvré à la reconnaissance internationale d’Eugène Atget. À Paris, où elle arrive en 1921, elle est formée par Man Ray avant d’ouvrir son propre studio et d’entamer avec succès une carrière de portraitiste. À New York, où elle est de retour en 1929, elle conçoit son projet le plus connu, Changing New York (1935‑1939), financé par l’administration américaine dans le contexte de la crise économique qui touche le pays.
Ses photographies prises en 1954 le long de la côte Est des États‑Unis, dont cette exposition offre une sélection inédite, témoignent pour leur part de sa volonté de représenter l’ensemble de ce qu’elle appelle la « scène américaine ». Enfin, au cours des années 1950, elle réalise pour le Massachusetts Institute of Technology (MIT) un corpus d’illustrations aux ambitions pédagogiques sur les principes de la mécanique et de la lumière.
Engagée dès les années 1920 auprès des milieux de l’avant-garde artistique, militant contre le pictorialisme et l’école d’Alfred Stieglitz, Berenice Abbott a consacré toute sa carrière à interroger les notions de photographie documentaire et de réalisme photographique. Montrant la richesse de cette démarche, la présente exposition révèle à la fois l’unité et la diversité de son œuvre.

André Gide c. 1925, par Berenice Abbott


Portraits
Au début des années 1920, installée à New York, Berenice Abbott entreprend de devenir sculpteur et fréquente la bohème de Greenwich Village. Elle y côtoie les poètes et artistes Djuna Barnes, Sadakichi Hartmann ou encore Marcel Duchamp et pose pour Man Ray. Confrontés à des conditions économiques difficiles et attirés par l’Europe alors symbole d’eldorado culturel, plusieurs membres de cette communauté émigrent à Paris pour y tenter leur chance, formant un groupe d’expatriés américains rejoint par Abbott en 1921.
En 1923, elle devient l’assistante de Man Ray qui a ouvert son atelier de portraits peu de temps après son
arrivée à Paris en 1921. Si la clientèle de l’atelier se compose en partie de touristes américains, Abbott est également immergée au cœur de la scène artistique d’avant-garde, et notamment surréaliste. Entre 1923 et 1926, elle est ainsi initiée à la pratique du tirage et au métier de portraitiste tout en bénéficiant d’une formation intellectuelle et artistique. Avant d’ouvrir son propre espace, elle utilise dans un premier temps l’atelier de Man Ray pour produire ses portraits puis inaugure avec succès son studio en 1926. Composée autant de personnalités françaises que d’expatriés américains, sa clientèle se répartit entre la société bourgeoise, la bohème artistique et le monde des lettres. Les portraits sont parfois empreints de traces plus ou moins évidentes de l’influence surréaliste, mais reflètent plus généralement un goût pour la mascarade, le jeu et le travestissement.

A. Gide, par B. Abbott  

André Gide c. 1925, par Berenice Abbott

Les modèles féminins expriment une forme d’ambiguïté sexuelle, perceptible grâce aux coupes de cheveux
et aux vêtements masculins laissant percevoir volontairement un trouble identitaire. La composition des portraits permet la mise en place d’une véritable esthétique, rejetant les conventions commerciales classiques. L’absence d’éléments de décor et le fond, réduit le plus souvent à un pan de mur neutre, isolent le modèle, insistant sur son attitude, la position de son corps et l’expression de son visage. L’usage d’un trépied et d’objectifs à longue focale placés à hauteur des yeux permet d’éviter les déformations et de bannir les effets de distorsion, assurant aux modèles une forte présence physique.
Au début de l’année 1929, Berenice Abbott quitte Paris pour New York où elle va poursuivre les mêmes activités et entreprendre des démarches similaires : ouvrir un nouvel atelier de portraits, participer aux manifestations en faveur de la photographie moderniste et veiller parallèlement à la reconnaissance d’Eugène Atget dont elle a acheté une partie du fonds en 1928.


Jeu de Paume - Concorde1, place de la Concorde, 75008 Paris
accès par le jardin des Tuileries, côté rue de Rivoli
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