Un triple A pour le Musée d'Orsay

Publié le 11 février 2012 par Mpbernet

Très discrètement, sans fermer une seule journée, le Musée d’Orsay a rénové 40% de sa surface et déplacé 1000 des œuvres exposées.*

La présentation d’origine, depuis 25 ans, devenait sans doute un peu trop complexe, et puis rien ne vaut un œil neuf pour découvrir des tableaux nouveaux qui en fait ne le sont pas.

Ce qui est intéressant, dans la nouvelle façon d’exposer les œuvres, c’est le parti-pris de simplicité et de cohérence.

Comme s’il s’agissait d’une merveilleuse exposition temporaire, on vous mène pas à pas à la rencontre de l’art pictural du XIX eme siècle, où, pour une fois, la France donnait le "la" au monde entier.

Et on la voit de près, cette peinture aux couleurs chatoyantes, aux chairs douces, joyeusement offertes, ces portraits qui vous dardent de leur regard profond ou complètement perdu comme cette fille devant son verre d'absinthe (E. Degas).

Au rez-de-chaussée, pas de changement notable sous la grande verrière consacrée à la statuaire ; on parcourt rapidement les « pompiers », les orientalistes, les abonnés du Salon et les peintres officiels. Gustave Courbet a droit, et c’est légitime, à un grand espace qui lui est spécialement dédié autour d’Un enterrement à Ornans, dont je comprends enfin le caractère révolutionnaire d’une scène triviale traitée comme une peinture de bataille …

Et puis, on s’engouffre tout au fond du hall, presque derrière le rideau de scène de couleur rouge « Cahors », et on grimpe tout en haut des escaliers roulants jusqu’au 5ème niveau. Et là, c’est l’émerveillement en continu. On mesure mieux le choc que représenta la première exposition « Impressionniste » de 1874. Ils sont là, rassemblés autour du Déjeuner sur l’herbe, les Renoir, Manet, Monet, Degas, Gustave Caillebotte (Ah, Les raboteurs de parquet ….) Cézanne déjà, Fantin-Latour et ses portraits de groupe.

Il a suffi aux architectes de découvrir la toiture de ce comble pour obtenir cette douce lumière zénithale, un espace aux murs unis de gris, des œuvres pas trop tassées, à hauteur de lecture, avec assez de place pour prendre le recul nécessaire. Les salles sont classées par univers : paysages, portraits, etc ...

Il faut aussi remarquer de somptueux bancs en cristal, transparents comme de l’eau frémissante. Ils sont signés Tokujin Yoshioka, ont coûté une fortune et ont été offerts par des mécènes japonais. Leur toucher est délicieux ….

C’est certain, il faut plus d’une journée pour tout voir, mais une halte au restaurant de l’ancien hôtel de la gare vous permettra de reprendre des forces. Le décor pompier a été scrupuleusement conservé. Je me suis laissée séduire par le plafond …

Ensuite, visite des salles du 2ème niveau consacrées aux post-impressionnistes : Gauguin, Van  Gogh , Seurat, Signac, Cross (tiens, tiens..), les Nabis (j’adore Félix Vallotton et Bonnard).

Bref, une après-midi de bonheur, comme si nous découvrions un musée inconnu, avec à chaque instant un cri d’étonnement : « - Ah ! Elle est ici, cette toile, j’avais oublié ! »

Il paraît que la moitié des frais de cette restauration réussie a été couverte par une grande tournée mondiale des chefs d’œuvre du Musée. Comme quoi, la culture, patrimoine national, ça peut rapporter gros !

*Merci à Jean-Michel Wilmotte !