Le temps des semailles approche, et toujours aucun signe concret du gouvernement allant dans le sens d'une nouvelle interdiction de culture du maïs OGM MON 810...
En fin de semaine dernière, le ministère du Développement durable dévoilait non sans fierté l'arrivée en juillet 2012 d'un nouvel étiquetage " sans OGM ". Malheureusement, la bonne nouvelle risque d'être écourtée, avec la perspective d'une coexistence entre cultures OGM et non OGM.
Un projet d'arrêté qui met en danger l'agriculture bio
En effet, le 20 janvier dernier Bruno Le Maire a déposé à la Commission européenne, un projet d'arrêté sur les conditions de coexistence entre ces deux types de cultures. Alors que le ministère avait reçu quelques semaines auparavant des délégués de syndicats d'apiculteurs et d'agriculteurs bio pour les rassurer sur son intention de maintenir l'interdiction d'une variété de maïs OGM, il se retrouve accusé de " double-jeu " par un collectif emmené par la Confédération paysanne. Et pour cause : la cohabitation défendue par le ministre de l'Agriculture pourrait bien signer l'arrêt de mort de cet étiquetage, et de l'agriculture bio. En effet, pour les détracteurs des OGM, les semences d'une parcelle OGM pourront contaminer les parcelles voisines, par le processus de pollinisation mais aussi les allers-retours des oiseaux et même en raison du vent. Dès lors, que deviendra la culture de produits biologiques ? Pour plusieurs associations environnementales, comme France nature environnement, les Amis de la Terre ou Greenpeace, si le gouvernement suit cette recommandation, nous pourrons dire adieu à l'agriculture biologique, et bien sûr, à l'étiquetage " pas d'OGM " qui doit garantir un produit contenant moins de 0,1% de présence fortuite d'OGM (la législation européenne étant moins rigoureuse avec un seuil de 0,9 %).
La coexistence des cultures en question
Le 17 janvier dernier, le Haut Conseil des biotechnologies estimait de son côté que la coexistence des cultures de plantes conventionnelles avec celles qui ont été génétiquement modifiées n'est pas incompatible, à condition toutefois que soient définies des distances de séparation entre les champs. Dans les pays où la coexistence est tolérée comme l'Espagne et le Portugal, les agriculteurs doivent se concerter localement afin de définir la distance de sécurité entre une parcelle OGM et une parcelle conventionnelle ou bio.
Le projet d'arrêté rédigé par Bruno Le Maire prévoit lui différentes " conditions d'isolement ", en fonction des variétés cultivées. Pour la culture de maïs OGM par exemple, il indique qu'elle doit être " implantée en respectant une distance de 50 m entre chaque bord de la parcelle de maïs génétiquement modifié et tout bord d'une parcelle de culture non ogm interféconde ". Par ailleurs, cette "distance d'isolement peut être remplacée par l'implantation, sur chaque bord concerné de la parcelle de maïs Ogm, d'une bordure d'une largeur minimale de 9 m constituée d'une variété de maïs non Ogm de classe de précocité identique à celle de la variété du maïs Ogm".
Mais ces précautions font doucement rire les détracteurs des OGM pour qui la toxicité et la transhumance des OGM ne font plus aucun doute. Pour Greenpeace, ce texte définit " les règles de coexistence les plus laxistes d'Europe ". Et de souligner que " dans ce texte, pas une ligne concernant la protection spécifique de l'apiculture, pas une seule mention de l'agriculture biologique "...
Publier rapidement une nouvelle clause de sauvegarde contre le MON 810
La ministre de l'Ecologie indique vouloir réagir avant la période des semis - début mars - mais suffisamment tard pour " que la Commission européenne n'ait pas le temps de la remettre en cause ". " Nous nous opposerons à la culture du Mon 810, donc ce n'est pas la peine d'acheter des semences de Mon 810 ", affirmait-elle lundi 23 janvier aux agriculteurs. Pour se décider à le publier dans les plus brefs délais, le gouvernement devrait peut-être relire les résultats des sondages d'opinion qui montrent que les Français sont majoritairement opposés à la culture d'OGM sur le territoire.
Alicia Muñoz