Quelles que soient les origines de cette comptine, qui apparaissent anciennes et curieusement font sens dans le registre des jeux d’argent qui comportent une part de hasard, cette formule permet de «faire un choix» et c’est bien ce que propose le PMU avec son nouveau jeu - «Pick» en anglais signifie «choisir» «sélectionner» - où il faut désigner les 5 premiers chevaux d’une course sans considération d’ordre. Pas facile malgré les apparences. Plaquette de lancement (2) et publicité (3) insistent sur la sagacité et la « force » dont devra faire preuve le turfiste pour gagner à ce jeu.
Les trois principes simples de ce nouveau pari (un seul rapport, une course par jour, une faible mise) indiquent que ce jeu ne s’adresse pas qu’aux turfistes chevronnés mais vise un large public. L’ambivalence de la cible visée par le PMU se confirme quand on consulte les tarifs. Si Pick 5 apparaît peu cher dans sa mise de base ( 2 euros) il existe un grand nombre de possibilités tarifaires (pas moins de 63). Selon la combinaison jouée, Pick5 peut atteindre 1820 € si on joue «en champ un cheval de base associé à 16 autres» et même 2002€ «en combinaison pour 14 chevaux». Autant dire que si la société dirigée par Philippe Germond ambitionne d’attirer des petits joueurs qui misent peu, elle indique dans le même temps aux «vrais» turfistes qu’il va falloir investir et continuer à «faire son papier» s’ils veulent gagner gros à ce jeu.
Certes les esprits chagrins, les anti jeu prohibitionnistes trouveront que le PMU a trouvé avant tout avec Pick 5 une nouvelle idée pour «piquer» encore davantage d’argent dans les poches des turfistes. C’est oublié un peu vite le caractère volontaire de cet impôt facultatif - donc démocratique - qui ne saurait impressionner le sociologue mais qui peut légitimement émouvoir le moraliste.
Cette formule simple, courte et précise - mais qui omet pourtant curieusement de mentionner les risques financiers du gambling – commence à devenir célèbre mais ne possède pas encore la notoriété de celle utilisée pour lutter contre l’alcoolisme: «L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommez avec modération» Face à ces injonctions contradictoires de plus en plus déséquilibrées comme nous venons de le voir, l’avenir dira – notamment si des expertises indépendantes sont menées – si cette politique de jeu responsable doit continuer à monter en puissance pour atteindre celle menée en matière de lutte contre le tabagisme («Fumez tue !») où si au contraire elle est par trop envahissante voire contre productive, trop d’information standardisée répétée pouvant tuer l’information ou la rendre contradictoirement invisible.
Mais jusque là tout va bien. Le pari mutuel urbain vient pour la première fois de passer la barre des 10 milliards (+7,3% à 10,236 milliards €)(4). Non contente d’inventer de nouveaux paris - ici Pick 5 - , de se lancer avec succès dans le poker en ligne, de truster la première place des paris hippiques en ligne loin devant Zturf, elle installe un nouveau concept d’espaces de jeu - PMU City - dernièrement à Lyon, prochainement à Marseille. Une manière pour Philippe Germond de souligner fortement que si le PMU (qui n’a jamais été rétrograde en matière de paris à distance) a plongé avec succès dans le e.gaming , il tient à rester proche physiquement de sa clientèle.
Notes
- Cette comptine serait la déformation phonétique d'une comptine allemande qui commence par "Ein, zwei, drei". Une, deux, trois,Vole, vole, hanneton,Cours, cours, cavalier, Une, deux, trois. Une autre interprétation suggère que cette comptine trouverait son origine dans une incantation chamanique d'origine nordique utilisée lors des veillées funèbres chez les Francs (cf Jean Pierre Poly, "Am stram gram... la chevauchée des chamanes". L'Histoire no 305, janvier 2006)
- La plaquette de présentation précise: «Pick 5 il va falloir être fort ! nouveau pari, nouveau défi» (12 pages , janvier 2012)
- Par exemple dans le Parisien du 8 janvier 2012, page 7
- «le PMU franchit pour la première fois la haie des 10 milliards d’euros» , dépêche AFP du 5/1/2012
© JP Martignoni , Lyon, France, janvier 2012