Sans domicile fixe, s'installant ici et là comme des bernard-l'hermite, les deux jeunes galeristes DDC sont jusqu'au 18 février hébergées par Laurent Mueller. Je n'avais rien dit de leur précédent squatt, sous un plafond bas, et pour cause*. Cette exposition-ci présente onze artistes de la galerie, tous ou presque dessinateurs, autour de la poétique de l'espace (s'il reste des catalogues, empressez-vous d'acheter ce petit bijou). La tonalité d'ensemble est grise, dépouillée, épurée, et les quelques coloristes présents ont du mal à trouver leur place.
De Mathilde Roussel, découverte à Montrouge, j'aimais surtout le travail autour du corps, le sien -moulé périodiquement- et celui des autres, dessiné, tracé, mémorisé. Elle montre ici des petites boîtes précieuses contenant des vestiges, des empreintes, des reliques, objets étranges et fascinants, entre minéral et végétal, à moins qu'il ne s'agisse ici d'une sécrétion, d'une trace d'humeur intime vite aseptisée, d'une vie aussitôt gelée avant d'éclore.
La Slovaque Kristina Hečková (Prix FID 2010) décline des séries noires aux arbres morts sous un ciel plombé, sorties tout droit de Murnau ou de Fritz Lang, mais au dessin plein de finesse, quasi précieux dans ces paysages apocalyptiques.
Dans l'escalier des dizaines de petits visages blancs de porcelaine, suspendus au plafond en grappes, surgissent dans le dos des visiteurs comme autant de démons ou d'anges gardiens. Pixels blancs, ils composent des formes géométriques, des partitions injouables, des scansions improbables. On ne voit cette installation de Samuel Yal qu'en se retournant, en descendant, et, un instant, le sang se fige.
* Hospitalité au même endroit ce dimanche 12 février, de midi au coucher du soleil, pour l'artiste performeuse Romina de Novellis (s'inscrire par mail à performance.romina@gmail.com)
Seconde photo de Mathilde Roussel courtoisie de la galerie DDC. Autres photos de l'auteur.