Fear of the Dark
Les personnages emblématiques de la série sont bien présents.
Si le jeu s’éloigne allègrement du livre sur le plan scénaristique, il en conserve néanmoins l’esprit et c’est tout ce qu’on lui demande. Les développeurs, plutôt que de reprendre point par point une histoire déjà connue, ont décidé de nous transporter vers un univers parallèle dans lequel le père de Jacky n’est pas un salaud et où un géniteur porteur du pouvoir peut survivre à sa démoniaque engeance. Loin d’être un mauvais choix, cela permet au contraire aux amateurs de la série de pouvoir faire un bout de chemin supplémentaire avec le beau brun ténébreux dont le créateur, mort depuis, a laissé l’aventure en suspens. Vous retrouverez néanmoins beaucoup d’éléments du comic, du physique du protagoniste à l’Angelus en passant par la Confrérie ou encore Butcher Joyce le nettoyeur. Et du trash. Beaucoup de trash.
Les exécutions sont toutes très sanglantes
Depuis quelques mois, la toile est abreuvée de vidéos offrant en spectacle les différentes mises à mort possible dans le jeu, tant et si bien qu’on avait peur de ne plus rien avoir à découvrir le jour de la sortie. Malheureusement, c’est un peu le cas et, si les vidéos sont au final assez discrètes sur le gameplay en lui-même, elle déflore malgré tout une grande partie du plaisir qui consiste à se dire « tiens, c’est la première fois que j’en démembre un de cette manière ». A ce propos, autant vous y faire dès à présent : si le premier volet était rythmé par une alternance de scènes d’action et infiltration, il ne sera plus ici question de faire dans la dentelle. Vos quatre bras seront désormais exclusivement dédiés à l’équarrissage de vos ennemis et aux décapitations en tout genre. On se consolera en se disant que ce qu’il perd en subtilité, The Darness II le récupère en diversité lors des exécutions, mais on aura tout de même bien du mal à s’en convaincre.
L'arbre paraît grand mais la plupart des compétences sont dispensables.
Tout est fait pourtant pour nous en donner l’illusion : chaque bras supplémentaire possède plusieurs fonctions qui lui sont propres, vous pouvez utiliser une arme dans chaque main, vous servir d’objets du décor comme autant d’armes mortelles, et vous avez même le droit à une roue de compétences à faire évoluer selon vos envies. Malheureusement, cette dernière se révèle très décevante car, mis à part les améliorations de santé et de puissance très vite débloquées, le reste des compétences est complètement dispensable et recèle plus de gimmicks que de réels moyens de varier les plaisirs. Quel que soit le chemin emprunté dans les arbres qui vous sont offerts, votre personnage se battra de la même façon à tous les coups, ce qui entame sérieusement le potentiel de rejouabilité du titre déjà très court : dans l’avant dernier mode de difficulté, six heures à peine suffisent à boucler la campagne principale sans jamais transpirer.
Les tentacules dégagent une impression malsaine de puissance.
La gestion de la difficulté fait d’ailleurs partie des gros points faibles du jeu. Du niveau le plus faible au mode Parrain, les adversaires réagiront à l’identique. Seuls leur résistance et leur puissance sera modifiée. Ce ne serait pas un problème si les comportements étaient un minimum variés mais on se rend vite compte que la seule tactique disponible est le bourrinage. Seuls ou à quinze, piétaille ou disposant de compétences évolués, vos opposants vous fonceront dessus en défouraillant à tout va quel que soit le contexte. Tout juste se mettront-ils à couvert quand ils sont un peu éloignés, en prenant bien soin de laisser dépasser leur tête pour vous faciliter la tâche. Amateurs de challenge, passez votre chemin. C’est d’autant plus dommage que les niveaux sont globalement bien fichus et jouent beaucoup sur l’alternance de couloirs et d’espaces semi-ouverts dans des bâtisses à plusieurs étages. Mais plutôt que de profiter de leur position en hauteur pour vous canarder pendant que vous êtes occupés à vous défaire des ennemis vous attaquant au corps à corps, ceux du premier étage sauteront tous au rez-de-chaussée pour venir s’ajouter à la masse qu’on découpera à grand renfort de tentacules.
Et on lui pèlera le jonc…
Le tentacule droit permet de découper vos ennemis en tranche sans forcer.
C’est avec le système de combat que The Darkness II commence à regagner des points. Comme dit plus tôt, il est impossible de faire vraiment évoluer le système de départ vers quelque chose de plus complet. Mais au final, les possibilités de base sont tellement énormes que ce défaut ne vient pas vraiment gâcher l’expérience. Les développeurs ont choisi de développer un système vous permettant de combattre plusieurs ennemis à la fois, qu’ils soient proches de vous ou plus éloignés. Vous disposez bien sûr d’une ou deux armes, mais ce sont les tentacules qui offrent des possibilités vraiment intéressantes. Celle de droite vous permet de fouetter tout ce qui passe à votre portée en vous laissant le choix de l’orientation du coup grâce à la souris. Vous pourrez au choix découper vos ennemis à la verticale ou à l’horizontale, et même en diagonale si vous vous en sentez l’envie. La tentacule de gauche quant à elle sert à empoigner puis lancer ce qui passe dans votre viseur : pilonne électrique, queue de billard, bombonne de gaz, scie circulaire, ennemi chancelant… Quelques objets spéciaux possèdent même des atouts supplémentaires. Une portière de voiture pourra vous servir de bouclier de fortune et en exécutant un ennemi que vous tenez, vous récupérerez au choix vie, munitions ou pouvoirs.
Le darkling occupera les ennemis pendant que vous les criblez de balles.
En plus de ces bras supplémentaires fort seyants, vous disposez également de l’aide d’un petit compagnon indépendant créé par le darkness : le darkling. Sorte de gremlin doué de parole, il vous accompagnera tout au long de l’aventure du moment qu’il n’y a pas de lumière, celle-ci le faisant disparaître. S’il se révèlera être un allié très utile durant les combats en occupant les gardes ou en les expédiant ad patres, il vous sera en revanche impossible de lui donner des ordres, ce qui constitue une petite régression par rapport au premier jeu. Pour pallier ce manque vous aurez donc la possibilité de le saisir avec un tentacule et le balancer sur les ennemis afin qu’il en fasse de la charpie. Mais plus qu’un allié de choix, le darkling se révèle surtout être un compagnon distrayant et attachant, insufflant une bonne touche d’humour à un scénario pourtant très noir. Regarder votre compagnon uriner sur les dépouilles adverses ou s’électrocuter en tentant d’ouvrir une porte est absolument délectable, tout comme sa manie de vous appeler affectueusement monkey. A ce propos, une option vous permettant de passer toutes les voix en anglais en conservant les sous-titres français étant disponible dans les menus, nous vous invitons à jouer au jeu dans sa version originale. La version française est très moyenne et il serait dommage de se priver de l’excellent travail de doublage réalisé dans la langue de Shakespeare.
L’empire du côté obscur
Les phases calmes vous permettent plusieurs clins d'oeil au comic et au phases d'action d'une manière insolite.
Mais venons-en maintenant au cœur de la meule : l’univers. Etrangement, il est difficile de parler de scénario pour The Darkness II, celui-ci tenant sur une demi-feuille de papier hygiénique. Après avoir tué votre oncle Paulie « s’il vous plait pas les enfants » Franchetti, vous devenez un parrain de la mafia. Un jour que vous dinez avec deux donzelles, vous êtes attaqué par la confrérie, qui cherche à s’emparer du darkness. Fin. Ne vous laissez pas enfumer par ce résumé, au demeurant tout à fait exact et exhaustif. Le scénario principal n’est qu’un prétexte. A la baston, certes, mais surtout à une plongée dans l’univers du comic. Sans jamais s’étoffer un iota, l’histoire délaissera plusieurs fois le pitch de départ pour se décomposer en une série de branches parallèles déconnectées du scénario principal, créant ainsi des temps de pause bienvenus après une heure ou deux de massacre à la chaine. Afin de ne pas gâcher le plaisir des futurs joueurs, nous n’en diront pas plus sur ces moments calmes qui constituent une réelle surprise et donne vraiment envie de continuer à jouer pour en comprendre le fin mot.
Le méchant a une sale gueule, comme d'habitude. Dommage pour un jeu si loin du manichéisme habituel des autres FPS.
L’autre atout majeur du jeu prend vie avec les personnages secondaires que vous croiserez un peu partout. On l’a dit plus haut, l’univers de The Darkness II reste très proche de la bande dessinée même si l’histoire prend des allures différentes. Le personnage principal se retrouvera donc entouré par des acolytes aux personnalités bien trempée et toutes différentes. Johnny est un expert en sciences occultes malingre et parano, Vinnie votre bras droit vous sera fidèle envers et contre tous, votre tante Sarah jure comme une charretière mais déborde d’amour, Adolf est un psychopathe au QI un peu léger… S’ils sont au final peu nombreux, les personnages secondaires auront au moins le mérite de vous marquer profondément et de vous toucher, chose rare dans un FPS qui revendique depuis des mois son orientation très « trippes à la mode de Caen ».
The Darkness II multiplie les scènes trash sans complexes.
Malheureusement, cette qualité d’écriture n’est pas toujours au rendez-vous dans le mode Vendetta, qui vous met dans la peau de quatre personnages supplémentaires afin d’effectuer des missions parallèles à l’aventure principale. Ces missions sont un petit plus permettant de prolonger l’aventure mais le manque de charisme des protagonistes rend ce mode multijoueur assez dispensable. Au mieux permettra-t-il aux plus acharnés de faire durer le plaisir en retrouvant une nouvelle fois quelques-uns des personnages de la campagne solo et leurs dialogues loufoques.
Prenez bien garde à rester jusqu'à la fin du générique pour savoir contre qui se battra Jacky dans le troisième volet.
Reste enfin un dernier point à aborder : la partie graphique. Abandonnant la vision réaliste de Starbreeze, Digital Extremes fait le pari du cell-shading pour se rapprocher d’un rendu plus comic et le résultat a de quoi laisser perplexe. Alors que le sang est rouge pétant, le reste des couleurs est désespérément terne et peine à convaincre. Alors que XIII, sorti sur les machines de la génération précédente, réussissait sans problème à retranscrire l’univers de la bande dessinée, The Drakness II n’arrive pas à trouver ses marques et donne l’impression qu’on a passé un trait noir autour de personnages dessinés par un moteur 3D classique. En terme de qualité pure, le résultat n’est pas plus concluant : les textures sont baveuses, l’aliasing omniprésent et sur PC, ne comptez sur aucune option permettant d’améliorer le rendu. Comme bien des jeux actuellement, The Darkness II se contente du minimum syndical en offrant un portage console bâclé qui ne fait pas honneur à nos machines.
Note globale : 6/10
The Darkness II cherche encore ses marques et oscille perpétuellement entre le bon et le mauvais dans tous les domaines. Si la direction artistique est bonne, la réalisation est bâclée. Quand l’histoire tient en deux lignes, le background est fouillé et l’écriture excellente. Le gameplay est désespérément bas du front, mais il est aussi profondément jouissif. Pour résumer, on sent que les développeurs aiment la licence, mais sans doute ont-ils manqué de temps ou de bras pour nous offrir un jeu vraiment peaufiné. Reste un petit jeu sympathique qu’on pourra acheter en occasion ou pendant une promo Steam et qui ravira les fans du comic d’origine.