III - Virtuel ou réel ? Un délicat équilibre.
Le mouvement indigné français est née sur le web. A la télévision, dans les journaux aussi, mais surtout sur le web. Par propagation, par imitation de ces indignados espagnols, rodés et nombreux ! C'est donc le web qui nous a permis de nous rencontrer, de nous connaître, de nous souder, de nous agrandir, de nous faire connaître, etc.
Mais contrairement à ce que l'on pourrait croire dans unpremier temps, le web ne nous facilite pas la tâche. Il la rend même pluscomplexe, voir ingérable. Je ne compte plus le nombre de groupesfacebook, de pages facebook, de blogs, de sites, de forum, de hashtag twitter,bambuser, de pearltree, wordpress, tumblr, ... en rapport plus ou moins étroit avec les indignés. Ce nombre estmultiplié par trois, trois échelles, locale, régionale, nationale voirinternationale... La diaspora virtuelle des sites qui font vivre le mouvement des indignés est énorme. Et bien plus grande numériquement que le nombre de mobilisés réel. Cela pose un réel problème et un réel risque. EnFrance, le mouvement se virtualise bien trop, c'est d'ailleurs la preuve de sa"faiblesse" et du manque d'urgence/attentisme qui sévit à l'heure actuelle.
Pour y remédier, je pars d'une règle de base : dans le virtuel, privilégier le réel. Le changement ne viendra pas du net, nous devrons aller en chair et en os secouer nosreprésentants, nos concitoyens, balancer quelques pavés si il faut, faire dessittings, des flashmob, des occupations, etc. Faire du DDOS est certe jouissifmais peu efficace si l'action n'est pas beaucoup suivie ou si elle n'attaquepas un site réellement gênant. Les Anonymous font d'ailleurs très bien letravail tout seul de ce côté-là. L'Hacktivisme est quelque chose de bienparticulier, ce n'est pas à la portée de tous et cela implique de rentrerrapidement et clairement dans l'illégalité.Ne reste donc que le travail de diffusion, derelais, et d'information qui incombe à chacun, à son niveau. Si le web offre la possibilité à de nombreux ruraux de suivre nos actions, il ne doit pour autant pas devenir lieu de décision. Ce que beaucoup aimerait voir naître. Mais il n'y aura pas d'assemblée virtuelle, pas de sitenational des indignés (sauf pour ceux qui veulent se constituer en partipolitique, libre à eux...), pas de vitrine officielle du mouvement. Les outils permettant de pratiquer la démocratie dans le virtuel à la façon de 8th Wonderland ne sont pas pour tout de suite, nous devons faire sans pour le moment. Il est primordiale de garder cette multitude deplate-forme locale et proche des gens pour que les nouveaux arrivantsprennent le plus rapidement contact avec leurs voisins indignés et fasseconnaître la cause dans leur patelin.
Partant de cette conception des choses, le maximum que nous pouvons faire, est une plate-formed'agrégation des flux RSS de chaque site locaux qui permettent à tousd'avoir en temps réel les dernières publications de chaque groupes locaux (CR,Lettre ouverte, infos sur les actions, urgences, vidéos, etc...). Le deuxièmeintérêt de cette plate-forme c'est qu'elle affranchit de la question de la"légitimité" ou de la "responsabilité" des webmasters quila maintienne. Ils ne sont que techniciens et en aucun cas administrateurs. Leprojet est en cours d'élaboration et devrait voir le jour avant les élections,du moins je l'espère.Le deuxième problème virtuel c'est Facebook, cette plaie si géniale, cette grandeinconnue du XXIème siècle.
Facebook est un outil génial inventé par un congénial. Zuckerberg l'a inventé dans le but d'alimenter et de transposer la vulgaritéet la procrastination à la mode du réel dans le virtuel. Il en a fait un outilde drague, de vide neuronal. Et a permis à tous de se constituerun alter-ego virtuel idéalisé, de se prendre pour une star de télé-réalité ou d'enfin être soi-même. Facebook a répondu à l'attente de 800 millions de personne à travers le monde : un espace vierge dans lequell'on peut rester en permanence en contact avec des amis (réels ounon). Il mis à mort le mot solitude, ou l'a fait renaître dans une nouvelleforme plus encore plus vicieuse.Si Facebook est critiquable par de nombreux aspect, il est aussi devenu avec Twitter le pavé detous les révoltés de la planète, l'arme du printemps arabe, desvictimes de Fukushima, des dissidents chinois et de tous les indignés de laplanète. C'est un fait, le nier ne sert à rien, il faut donc faire avec. Ouicar techniquement Facebook n'est pas fait pour l'activisme et encore moinsl'hacktivisme. En plus de suinter partout, de couler dans toutes les bases dedonnées officielles et commerciales douteuses, en plus de vous ficher pour lerestant de vos jours, Facebook manque cruellement de fonctionnalités. Ce n'estfinalement qu'un agrégateur de Flux RSS mis en pages et bien présentés.
Cela dit, j'en viens au fait : Facebooknous ralentis plus qu'autre chose. Certes j'ai pu rencontrer des gens des quatrescoins de la France, c'est même grâce au groupe Facebook nantais que j'ai pu entrer encontact avec les indignés de Nantes. Et cela à mener à un camp d'un mois et àune expérience de fou. Seulement, une fois les tentes pliées, Facebook reprendle dessus. Le mouvement se disloque dans le virtuel. Et se disloque dans les divergencesde conception, dans les différents tons, dans les humeurs, les ras-le-bol, etc.
Dépenser son énergie à essayer de se structurer dans le virtuel est une perte de temps. Ayant participer à l'élaboration de nombreux groupes Facebook, à l'animation de nombre d'outils communautaires comme les PAD ou les Google Docs et étant gestionnaire de nombreux groupes, je me rend compte que tout ceci ne vaut pas une bonne rencontre ou une bonne AG. Le virtuel crée de la distance entre les gens. Dès qu'un nerf saute, un quiproquo surgit et ralentit ou condamne les discussions en cours...
Toujours garder à l'esprit : privilégier le réel au virtuel.
Le réel c'est dur le matin.