On rencontre toujours ces camions où des humains sont accrochés dans un équilibre qui me semble toujours précaire. Pour la petite info, on suit un bus qui roule à plus de 110 km au moment où je capte cette photo !! Outre ces haïtiens en équilibre sur des tacots, le journalisme haïtien est peut-être en train de perdre l’équilibre. Pour être honnête, je n’ai jamais cru à l’objectivité comme position intellectuelle, entre autres dans le domaine de la nouvelle et de son analyse. J’ai passé 15 ans de ma vie professionnelle dans le secteur de la recherche sociale, assez pour ne plus croire possible tout raisonnement ‘objectif’. Ça ne veut pas dire qu’on fait ou pense n’importe quoi, mais je préfère parler de la notion de subjectivité consciente ou encore d’intersubjectivité. Les journaux français me semblent plus clairement identifiés à un courant de pensée, alors que chez nous au Qc, il sont encore trop nombreux à se bercer dans l’idée de l’objectivité. Les journalistes haïtiens sont à cet effet en train de perdre un peu de leur vernis. Je ne parle pas de ces animateurs de radio qui n’avaient plus de vernis à perdre (des ‘vrais’ journalistes pourraient vous dire que ces animateurs ne sont justement pas des journalistes), mais de gens pour qui j’avais développé une certaine estime au cours des dernières années. Le président et les médias ont eu plusieurs occasions de se bagarrer depuis un an et l’altercation de la semaine dernière (le président a refusé de répondre à une question d’un journaliste après lui avoir demandé pour quel média il travaillait) ouvre la porte à certaines prises de position moins ‘molles’. Aujourd’hui, le 7 février, on soulignait un peu partout le départ de Duvalier (1986), donc la victoire de la démocratie, des droits de l’homme, de la liberté … L’évènement du jour a permis à certains journalistes de tisser des liens avec la dernière sortie du président, les accusations de violation des droits de l’homme contre Duvalier qui ne sont pas retenues, la présence de Duvalier aux côtés de Martelly lors de la cérémonie de commémoration des deux ans du tremblement de terre, les accointances duvaliéristes de proches du président, … Tout un argumentaire pour nous souligner que la démocratie haïtienne était sur le bord d’un précipice, à deux pas de perdre une fois de plus un équilibre toujours fragile.