Suite au débat récurrent que soulève en France, l'écart entre la mesure officielle du pouvoir d'achat et le ressenti des ménages, le ministre de l'économie avait
annoncé la mise en place, le 23 octobre 2007, d'une commission chargée de "réfléchir" à la question. Cette commission était composée de représentants d'associations familiales et de
consommateurs, et d'experts de l'université ou de Bercy. Alain Quinet, président de la commission, a remis mercredi 6 février à Christine Lagarde, un rapport présentant plusieurs
recommandations.
La première proposition est la suivante : publier tous les ans l'évolution du pouvoir d'achat par unité de consommation pour mieux tenir compte des évolutions démographiques et familiales.
En effet, en 2006, la population a augmenté de 0,6 %, le nombre de ménages de 1,6 % et celui des unités de consommation de 0,9 %. Cette même année, la hausse du pouvoir d'achat a été de +2,3 %
pour l'ensemble des ménages, et de seulement +1,4 % par unité de consommation.
Bien entendu, il faut dire un mot sur ce que représente l'unité de consommation. Pour faire simple, disons qu'il s'agit d'un système de pondération attribuant un coefficient à
chaque membre du ménage et permettant de comparer les niveaux de vie de ménages de tailles ou de compositions différentes. Avec cette pondération, le nombre de personnes est ramené à un nombre
d'unités de consommation (UC). En effet, tout le monde comprend bien que les besoins d'un ménage ne s'accroissent pas en stricte proportion de sa taille. Lorsque plusieurs personnes vivent
ensemble, il n'est pas nécessaire de multiplier tous les biens de consommation (en particulier, les biens de consommation durables) par le nombre de personnes pour garder le même niveau de vie :
une machine à laver suffit par exemple pour plusieurs personnes, etc. Aussi, pour comparer les niveaux de vie de ménages de taille ou de composition différente, on utilise une mesure du revenu
corrigé par unité de consommation à l'aide d'une échelle d'équivalence (c'est-à-dire que le niveau de vie est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d'unités de consommation, de
sorte que le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d'un même ménage).
L'échelle actuellement la plus utilisée (dite de l'OCDE) retient la pondération suivante :
- 1 UC pour le premier adulte du ménage
- 0,5 UC pour les autres personnes de 14 ans ou plus
- 0,3 UC pour les enfants de moins de 14 ans
Ainsi, un ménage comportant 2 adultes et 1 enfant de 12 ans compte pour 1,8 UC et non pas 3, puisque les autres membres du ménage peuvent profiter des installations déjà
acquises par l'un des adultes (téléviseur, machine à laver,...).
Une autre proposition de la commission consiste à publier un indicateur de dépenses préengagées (loyers et dépenses liées au logement, services de télécommunications, de télévisions, assurances,
services financiers et frais de cantine). Ces dépenses sont en effet suffisamment récurrentes et stables pour considérer qu'elles sont prévisibles (en gros, quoi que l'on fasse, il faudra payer
pour ses dépenses...). Grâce à cet indicateur, l'Insee pourrait publier un indicateur de remboursement d'emprunts, un indice du prix des logements neufs et un indicateur de revenu libéré (le
revenu disponible brut moins les dépenses préengagées et les remboursements d'emprunts). Car au fond, ce qui compte vraiment, c'est le revenu dont on peut se servir pour acheter ce que l'on veut,
sans y être contraint comme c'est le cas pour la facture d'EDF, ou le remboursement du crédit !
J'espère ne pas vous avoir noyé avec tous ces détails, mais il me paraissait important de vous donner une vision précise des statistiques afin que vous puissiez comprendre la portée des débats
actuels sur le pouvoir d'achat. Car, n'oublions jamais ces mots d'Alfred Sauvy : "bien informés, les hommes sont des citoyens; mal informés ils deviennent des
sujets".