Toujours en quête de la martingale pour augmenter le pouvoir d'achat, les médias nous annoncent que Nicolas Sarkozy convoiterait les 15 milliards d'euros consacrés chaque
année par les entreprises à l'intéressement et à la participation des salariés. C'est surtout qu'après avoir épuisé l'argument très médiatique (et spécieux) des heures supplémentaires, notre
omniprésident ne voyait plus très bien comment poursuivre cette fable. Ainsi, l'idée est de permettre aux salariés de disposer chaque année immédiatement des sommes concernées.
De prime abord, certains diront que c'est une bonne chose que de disposer directement de son argent. J'aimerai juste rappeler rapidement le principe de l'épargne salariale afin que chacun puisse
en comprendre les tenants et aboutissants. L'épargne salariale, qui concerne un salarié sur deux (voir ci-dessous), est essentiellement liée aux dispositifs d'intéressement et de participation
dans les entreprises, et encouragée par des dispositifs d'exonération de charges sociales et d'impôt. Cette participation des salariés aux résultats de leur entreprise n'est pas nouvelle en
France. elle a fait l'objet d'un premier dispositif, celui de l'intéressement, dès 1959. À cela sont venus s'ajouter en 1967 la participation et les plans d'épargne entreprise. Le but du Général
de Gaulle était clairement de développer l'épargne et l'actionnariat populaires en encourageant les salariés à conserver ces sommes pendant au moins cinq ans.
Sur le graphique ci-dessous, on représente l'évolution de la part de salariés (secteur marchand non agricole, hors intérim) ayant accès à un dispositif d'épargne salarial (participation,
intéressement, PEE, PERCO).
[ Source : DARES]
D'ailleurs, les lois qui se sont rajoutées depuis, confirment cette idée: en 2001, la loi sur les plans partenariaux d'épargne salariale volontaire établissait un dispositif
visant à permettre à de nombreux salariés de se constituer un capital, ainsi qu'à soutenir le développement des entreprises. En 2004, l 'instauration du PERCO (Plan d'épargne pour la retraite
collectif) visait à permettre aux actifs de se constituer un capital pour leur retraite.
Précisons qu'en général l'épargne salariale est placée dans des FCPE, qui sont des fonds communs de placement, équivalent des SICAV et FCP. Ainsi, l'argent épargné de la sorte est bien drainé
vers des entreprises pour permettre leur développement. Ce qui m'inquiète c'est donc justement les contradictions des lois suivantes, qui finalement auront annoncé la mesure souhaitée par
Monsieur Sarkozy aujourd'hui : la loi du 9 août 2004 pour le soutien à la consommation et à l'investissement et loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie ont
cherché à favoriser le déblocage anticipé de l'épargne salariale.
Argument avancé pour débloquer les montants placés sur ces fonds? Les Français épargnent trop, en comparaison de leurs voisins. M. Sarkozy veut qu'ils disposent de ces sommes pour
consommer. Conscient de ce que je viens de vous expliquer ci-dessus sur l'utilité de ces fonds pour le développement des entreprises, l'Elysée a promis de ne pas créer de nouveaux
dispositifs de déblocage anticipé afin de ne pas "assécher trop vite les fonds propres des entreprises" (sic!).
Pour être complet, il me faut préciser qu'en transformant l'intéressement, la participation ou l'abondement en éléments du salaire, le gouvernement envisage aussi de les assujettir aux
cotisations sociales et à l'impôt... Jusqu'à présent considérés comme de l'épargne, ils y échappaient, à l'exception de la CSG et du CRDS !