Je ne t’écris pas parce que je t’ai perdue de vue.
Je ne t’écris pas parce que ta présence, si forte et si lointaine à la fois, n’est que l’écho d’une voix étrangère.
Je ne t’écris pas parce qu’on m’a volé le temps qui me permettait de te réinventer ici-même, à mon seul bénéfice, pour mon seul bonheur.
Combien de fois peut-on écrire l’absence ? Combien de phrases faut-il pour combler le vide qu’on a soi-même créé ? Je veux dire, est-ce que l’absence a une forme de prédilection ? Une forme dont elle ferait son lit ?
Je ne t ‘écris pas parce que je t’ai trahie. Et soudain, les mots n’ont que le goût du regret. Et soudain, je ne sais plus ni pourquoi il était important de commencer cette correspondance, ni pourquoi un jour j’ai pensé à la clore simplement en te faisant disparaître. Car tu ne me quittes pas, en vérité. Jamais.
Mais je n’entends plus ta voix. Et sans elle, je ne suis que bouteille à la mer. Je n’ai pas besoin d’autres spectres, tu sais, après tout, je t’avais, toi, depuis si longtemps. Est-ce d’avoir ouvert la porte à d’autres qui fait de moi l’antre de toutes les cacophonies ? Est-ce ta manière de continuer à exister lorsque je détourne les yeux ?
Je ne t’écris pas parce que, tout simplement, je n’écris pas. Je n’ai jamais écrit. Et je n’écrirai jamais.