Après le sauvetage « miraculeux » de l'usine Lejaby, le gouvernement va devoir trouver rapidement une solution pour la Sernam qui emploie 1 600 salariés. Le candidat préféré du gouvernement pour la reprise serait la SNCF dont la Sernam était une filiale ... avant sa privatisation en 2005.
Nicolas Sarkozy grand amateur de privatisations, comme celle de GDF, décidera t-il de procéder à une renationalisation ? C'est ce qu'on est droit de se poser, en apprenant que l'état souhaiterait que la SNCF, qui avait vendu sa filiale le Sernam en 2005, au fonds d'investissement Butler Capital, en redevienne le principal actionnaire.
Il faut dire qu'entre temps, contrairement à l'article élogieux rédigé en 2007 par Le Figaro, les nouveaux actionnaires n'ont pas fait de miracle et que l'entreprise vient d'être placée en redressement judiciaire !
Eh oui, la situation économique a changé et le Président et son gouvernement sont confrontés à deux problèmes : l'accélération des mises en redressement judiciaire et des plans sociaux et la proximité des élections présidentielles. Or, nul ne peut contester que les électeurs seront particulièrement attentifs au taux de chômage lors des prochaines élections.
Jean-Christophe Féraud, du service économie de «Libération» nous donne pour mémoire les récents cas les plus médiatisés : 5 000 suppressions de postes annoncés chez PSA pour 2012, 800 chez Areva, la faillite de SeaFrance (800 emplois), celle de Lejaby et de Petroplus, ... Ce à il faut ajouter ... le dossier Sernam !
Et la Sernam, avec tout le respect du aux 98 ouvrières de Lejaby, c'est une toute autre dimension. En effet, le groupe emploie 1 600 salariés, mais avec les sous-traitants, ce sont 3 000 emplois au total qui pourraient être menacés par une faillite explique un syndicaliste interrogé par Libération
Panique à bord du bateau gouvernemental et mobilisation de pas moins de quatre ministres François Baroin (Economie), Xavier Bertrand (Travail), Eric Besson (Industrie) et Thierry Mariani (Transports) pour trouver une solution avant l'échéance fatidique de la présidentielle. Et dans la mesure ou Bernard Arnault n'envisage pas de reconvertir 1600 personnes dans l'industrie du luxe, c'est tout naturellement vers un des opérateurs publics, à savoir la SNCF que les yeux gouvernementaux se sont tournés.
Geodis, filiale de la SNCF a miraculeusement manifesté dès lundi son intérêt : « Nous allons nous inscrire dans la perspective du redressement judiciaire et faire des propositions » , a annoncé son directeur général Pierre Blayau (accésoirement ancien PDG et liquidateur de Moulinex)
Ce qui est autant étonnant qu'amusant, c'est que la Sernam a été créé par la SNCF en 1970 pour gérer le transport des colis et des bagages, en France et à l'étranger. Et privatisée en 2005 par le gouvernement Villepin dans lequel on trouvait, entre autre, Nicolas Sarkozy, François Baroin et Xavier Bertrand.
Ce sont donc eux qui vont devoir essayer d'arbitrer entre l'offre du groupe Caravelle, spécialisé dans la reprise d'entreprises en difficulté (et qui a déja mis la main sur deux autres entreprises de transport moribondes) et Geodis, branche de la SNCF.
Ajoutons à celà, nous dit l'Expansion que Pierre Blayau : « Dans une interview à L'officiel des transporteurs, en mars (...) avait pourtant déclaré qu'en aucune manière Geodis ne rachèterait Sernam » Et ajoute : « Il semble toutefois que l'intérêt de Geodis pour Sernam réponde plutôt à un souhait du gouvernement qui, dans une période stratégique, tient à sauvegarder des emplois non délocalisables »
Après tout, direz-vous si cette opération de nationalisation à peine déguisée permets aux salariés de conserver leur emploi, pourquoi pas ? Il faut savoir de temps en temps manger son chapeau et reconnaître que le marché et la concurrence peuvent être parfois être les pires ennemis de l'emploi.
Nous espérons que cette nouvelle « opération commando » du gouvernement aboutira et qu'elle pourra rassurer les salariés. Mais, rappelons que le Sernam a été privatisé sur décision de la Commission européenne. On donc peut imaginer aisément, la réaction de la même Commission, dans le cas où une filiale de la SNCF reprendrait le contrôle de la Sernam. D'autant que compte tenu de sa grave situation financière, la SNCF devrait réinjecter des fonds, ce qui sera immédiatement condamné par la Commission Européenne.
Verra t-on dans les jours qui viennent plusieurs ministres faire l'aller et retour entre Paris et Bruxelles pour infléchir les membres de la Commission et essayer de gagner quelques précieux mois entre le rachat et une intervention de la Commission européenne ?
C'est assez probable et ça éviterait au Président et à son gouvernement de trouver un peu de temps avant d'être obligé d'expliquer aux 1600 salariés qu'ils sont victimes de l'incohérence du dogme européen sur la concurrence !
Affaire à suivre ...
Crédit photo
Passion Trains