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Seule Venise - Claudie GALLAY

Par Liliba

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Je ne suis pas certaine que partir à Venise au beau milieu de l’hiver, seule quand on vient d’être quittée méchamment par l’homme avec qui on pensait finir sa vie, soit la solution idéale pour se sortir de la dépression…

C’est pourtant ce que fait cette femme, qui à quarante ans largue toutes les amarres, vide son compte en banque, quitte son appartement et s’enfuit. C’est la seule alternative qu’elle a trouvée pour ne pas sombrer totalement. Bien sûr, dans la ville magique, elle va rencontrer quelques personnes, et notamment les autres locataires de la pension où elle s’est réfugiée, qui sont plutôt hauts en couleur et originaux : l’aristocrate russe en fauteuil (Venise quand on a un fauteuil roulant, la galère !), la jeune danseuse, son amant… mais c’est surtout le libraire passionné qui la remettra sur les rails, et lui redonnera l’envie de vivre et d’aimer à nouveau.

Je n’ai pas accroché avec ce roman, que j’ai trouvé triste, mais triste… Venise est une ville sublime, où j’ai eu la chance d’aller une fois, mais j’ai du mal à m’imaginer y revenir pour soigner un amour… C’est retourner le couteau dans la plaie, puisque cette ville mythique est la ville des amoureux par excellence ! Et l’hiver, saison déjà pas très gaie un peu partout, doit être là-bas particulièrement cafardeux : humidité, brouillard, froid…

Je n’ai pas non plus aimé le style de Claudie Gallay, cette fois-ci. Les phrases sont trop courtes, abruptes, ça n’est pas fluide, mais long, et un peu monotone… Je n’ai pas été touchée par la détresse de cette femme et malheureusement pas su débusquer la sensualité dans son cheminement à travers la ville et ses rencontres… La seule poésie à mon sens tient à la ville seule, toujours merveilleuse malgré les brumes hivernales.

Rendez-vous raté pour moi…

"Ses lèvres, humides, elle les essuie avec le pouce. Je ne sais pas gérer le désespoir, le mien, encore moins celui de autres. Je n’ai jamais su.

Et puis l’histoire qui revient. Toujours la même histoire. Le même désaccord.

Je détourne la tête. Dehors, les toits, le ciel. Un temps sombre, chargé de nuages.

– Ça va s’arranger… je dis, et je ne sais pas si je parle du temps. Ou d’elle. De sa vie.

Elle ne le sait pas non plus.

Mais c’est tout ce que je trouve à dire à ce moment-là. Ça va s’arranger, alors que ça ne s’arrangera pas.

Elle attend que je lui dise cette chose-là, ça ne s’arrangera pas, cette vérité, que ça ne s’arrangera jamais, jamais plus, jamais plus comme avant. Et qu’il n’y a rien à faire contre ça.

Je prends une tranche de pain, je la recouvre de confiture. Impossible de mordre dedans. Je la repose.

Il faudrait arrêter de mentir. Au gens, aux vieux, aux enfants.

Quand Trevor est parti, j’aurais dû lui dire je ne crève pas pour toi mais c’est ma jeunesse qui crève. Quelque chose que je porte en moi et que j’aimais et qui s’en va.

Je ne lui ai rien dit.

Au fond du salon, la porte s’ouvre, Carla baisse la tête.

–Ne fais pas ça, je dis.

Mais ça ne suffit pas.

Je veux me lever. Partir.

Elle dit reste.

D’une voix, venue du ventre. Valentino s’avance. Je sens la tension entre eux. Palpable. Je la subis. Ça me rappelle trop les silences avec Trevor à la fin quand on ne s’engueulait même plus.

Qu’on s’ennuyait.

Au restaurant, on n’osait plus se regarder. On regardait par la fenêtre ou alors on regardait les autres. Ailleurs. On tournait notre fourchette entre nos doigts. On avait hâte de finir, hâte de payer. Hâte de partir. Et pourtant on ne partait pas. On s’accrochait. Moi surtout.

Je ne les regarde pas. Je prends une orange. Je la garde dans ma main et puis je la fais rouler sur la table d’une paume dans l’autre.

L’amour de Carla connaît sa fissure. La première. Elle le sait. Avant lui.

C’est le savoir des femmes."


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