Alors là les enfants, attention les yeux, ça va piquer.
Je ne vais rien vous apprendre, Internet est l’endroit rêvé pour dénicher des artistes talentueux, de grands espoirs, peut-être des futures étoiles de l’art séquentiel qui sait…
L’autre jour je suis tombée sur l’une de ces étoiles justement, grâce à un site américain que je consulte régulièrement, et en regardant de plus près son Deviant Art puis son blog personnel, je n’ai pas pu résister à la contacter tellement son talent m’a brûlé les yeux. Ni une ni deux je me suis lancée dans l’élaboration de quelques questions, cela a été pour moi une expérience très enrichissante, car poser des questions à une personne que l’on ne connait absolument pas, et bien c’est loin d’être évident. Lorena Carvalho, c’est son nom, a tout de suite répondu à ma requête de manière positive et enthousiasmante. Je pense que vous allez tomber comme moi sous le charme de ses croquis et de ses interprétations de Black Canary, Wonder Woman, Barbara Gordon, Harley Quinn.
Franchement entre nous, Adam Hughes et Terry Dodson n’ont qu’à bien se tenir.
Bonjour Lorena, avant de commencer cette petite entrevue, j’aimerais te remercier d’avoir répondu si rapidement à ma requête et surtout de prendre le temps de répondre à mes questions afin que les lecteurs français puissent découvrir ton travail fantastique !
Alors pour commencer je sais que l’exercice n’est pas toujours facile mais peux tu te présenter, je sais que tu es d’origine Catalane (plus précisément de Barcelone c’est ça ?) et qu’en plus d’être une excellente illustratrice, tu es également étudiante à l’Ecole de Conservation et de Restauration des biens culturels de Catalogne. Peux-tu nous parler dans les grandes lignes de ton parcours professionnel et artistique ?
C’est exact, je m’appelle Lorena Carvalho, je suis originaire de Barcelone et j’ai 25 ans. Mon beau-frère m’a toujours dit que quand j’avais 5 ans et qu’il venait chez moi, il me trouvait toujours tranquillement assise sur le canapé à dessiner, et 20 ans après, rien n’a changé, je continue à être assise et à dessiner.
Donc, mon intérêt pour l’art et la création viennent depuis que je suis toute petite et aux alentours de mes 14/15 ans, c’est à ce moment là que j’ai réalisé dans mon fort intérieur que je voulais transformer mon passe-temps en un moyen pour vivre et gagner ma vie. Ainsi étant adolescente et ayant été élevée par bon nombre des séries d’animation à la télévision, j’ai décidé de prendre des cours de Manga à l’Ecole Joso de Barcelone, étant donné que le Manga était ce que je connaissais et maitrisais le plus. Puis, quatre ans après avoir fini les cours de Manga, j’ai découvert davantage de choses sur le monde fascinant de la bande dessinée et de l’illustration, davantage de styles et d’auteurs je me suis éloignée du style manga pour apprendre et définir mon propre style, donc j’ai décidé de continuer ma formation à l’Ecole Joso mais cette fois dans un cours plus vaste, celui des Arts Graphiques où tout au long de ses quatre nouvelles années, j’ai amélioré mon dessin dans beaucoup d’aspects et j’ai découvert la conception graphique où je me suis sentie étonnement à l’aise en faisant plusieurs travaux rémunérés pour différentes entreprises avec des commandes de logos et la création de collections en lien avec l’impression textile.
Pour me spécialiser un peu plus avec le logiciel qui était utilisé en conception graphique j’ai fait un cours intensif d’Illustration Appliquée à la Conception dans l’Ecole Idep (Barcelone), mais après plusieurs problèmes personnels et blocages artistiques, j’ai décidé de m’éloigner de tout pendant une période indéfinie pour me remettre en question sur quelle direction je voulais diriger ma vie personnelle et artistique. Après ce repos j’ai choisi l’option Conservation et Restauration d’Art, comme quelqu’un qui irait à un cours de cuisine, pour changer d’atmosphère et connaître des gens nouveaux. Je suis aujourd’hui déjà en seconde année et j’ai remis en route mes projets personnels.
Est-ce que ton expérience de conservatrice d’art a une influence sur ton travail d’illustratrice, ou au contraire, ta sensibilité d’auteur n’influe t’elle pas sur ta manière d’appréhender les œuvres que tu te dois de sauvegarder ?
De nos jours, la conservation et la restauration a cessé d’être une idée romantique pour être très technique et chimique ; une oeuvre est comme un patient auquel on donne un diagnostic, on lui on donne des médicaments là ou il a été opéré.
Il y a des règles qui doivent être suivies dans un atelier sur les pièces et la sensibilité artistique que l’on peut avoir n’intervient pas beaucoup.
Mais je dois mentionner qu’étudier dans ce cursus m’a apporté de l’air frais, ainsi que d’autres influences et techniques pour pouvoir les inclure dans mes travaux, avoir des idées nouvelles et ne pas m’enfermer dans des thématiques.
D’où vient ton intérêt pour les comic-book ?
J’ai toujours été attirée par les super héros comme par exemple Batman, de plus mon intérêt a crû au fur et à mesure que les professeurs et des amis m’ont recommandé des auteurs et des titres.
Tu sembles d’après tes illustrations être très attirée par les personnages de DC Comics et Vertigo. Peux tu nous en dire plus ?
J’adore DC et ses personnages, je suis une fan absolue.
Les comics Sandman et Hellblazer m’ont marquée à vie et j’ai pour habitude de les relire dès que je le peux. Mes personnages principaux préférés sont Batman, Death, John Constantine et Zatanna.
Il semble que l’Amérique commence à porter un certain regard sur toi, journalistes et blogueurs relaient tes différents travaux, comment abordes-tu ce début de reconnaissance et as-tu déjà été approchée par des éditeurs outre atlantique ?
En vérité c’est pour moi un réel honneur et une joie inattendue.
Cela donne toujours l’illusion qu’on est fixé sur ton travail, qu’on l’aime ou qu’il inspire les gens, ça t’encourage à continuer à croire en ce que tu fais et à continuer à dessiner que ce soit pour les loisirs ou le travail.
Quelles sont tes aspirations en tant qu’artiste, et quels sont tes projets ?
En ce moment le projet que j’ai entre les mains concerne une de mes sœurs, cela s’appelle le Paradis de Lola (www.elparaisodelola.com), un magasin online où nous créons des accessoires artisanalement d’après mes illustrations, on vend quelques unes de mes œuvres originales, je fais des commandes personnalisées et je suis également la conceptrice graphique.
Quels artistes t’inspirent ?
Du monde de l’illustration et de la bande dessinée ceux qui m’inspirent sont Adam Hughes, Terry Dodson, j.ScottCampbell, Tim Bradstreet,
Joseph Christian Leyendecker, Olivia, Alphonse Mucha, Joseph Christian Leyendecker.
En peintres : John Waterhouse, Sorolla, Klimt,…
En sculpteurs, Bernini, Canova, LLimona…
Je m’inspire aussi généralement beaucoup de la musique et la photographie.
Depuis ses débuts, il y a une certaine histoire d’amour entre la Catalogne et la Bande Dessinée, de plus l’influence des comics américains est très présente et a beaucoup de succès en Espagne, d’ailleurs beaucoup de dessinateurs espagnols (et Catalans) travaillent pour les Etats-Unis est-ce que tu es capable d’expliquer ces deux situations aux lecteurs Français ?
Je ne peux pas parler en mon nom puisque je ne suis jamais allée chercher du travail auprès des éditeurs ni porter de projets personnels à publier, mais en parlant avec des auteurs et des amis, la majorité des éditeurs espagnols ne prennent apparemment aucun risque, ils parient sur des personnes ou des projets qui ont précédemment fonctionné sur d’autres marchés, fermant ainsi les portes aux nouveaux artistes.
Donc les artistes ne restent pas les bras croisés et ils décident de tenter leur chance sur les marchés français ou américain qui paraissent être plus réceptifs, il s’ensuit qu’actuellement la majorité des dessinateurs Espagnols travaillent pour l’étranger.
Pour finir, quel regard portes tu sur les artistes féminines qui évoluent où qui tentent de percer dans l’industrie des comics qui est un milieu essentiellement géré par des hommes et destiné en majorité à un public masculin ?
Je suis fière que les sujets sur ce thème aient fait l’actualité, et que les femmes se battent pour ce qu’elles veulent et apportent leur essence au sein de l’industrie des comics dans le poste qu’elles occupent.
Je ne me suis jamais sentie personnellement discriminée en tant que femme, au contraire, je me suis sentie gâtée, en outre dans ce milieu, ton travail doit parler pour toi, que tu sois une femme ou un homme.
Concernant les lecteurs, j’ai toujours cru que les comics n’étaient jamais destinés uniquement pour des hommes et il y en a toujours eu pour tous les âges et pour les deux sexes, il y a des années cet univers était assez inconnu maintenant il est déjà plus généralisé et on n’écoute plus généralement cette phrase stupide : « mais si les bandes dessinées sont pour les enfants ! ! ! … » qui démontrait seulement l’ignorance de certains.
En outre du point de vue d’un auteur ou d’un éditeur c’est quelque chose de difficile à concrétiser ou prédire, car un auteur crée peut-être un personnage et des histoires destinés à un public masculin et il triomphe ensuite également auprès du lectorat féminin.
http://batsandstars.blogspot.com/
http://www.elparaisodelola.com/
Alors ? Convaincus ?