Les bonnes nouvelles arrivent en rafale. Pardon, en escadrille. Bon, vous m'avez compris : en groupe. Ainsi donc, après deux articles récemment publiés (l'un ici, l'autre qui arrive demain), après un entretien dont vous avez eu également connaissance, voici le dernier bébé de cet hiver : ENFIN !
"Enfin", pour plusieurs raisons :
- parce que le colloque a eu lieu il y a maintenant dix-huit mois et que l’expérience m'enseigne qu'il est plus compliqué de publier les actes que d'organiser l'activité...
- parce que la logistique est un vrai sujet, négligé par la plupart des amateurs de stratégie qui préfèrent, au choix, la technologie, le combat, les affaires d'information (info ops à cyber) ou de commandement, sans apercevoir que dans les conflits contemporains, la question logistique est absolument centrale et mérite d'être pensée au moins autant que les autres
- parce qu'il s'agit d'un bébé copatronné par "Participation et progrès" et "AGS", deux groupes de passionnés, sans aucun moyen (d’ailleurs, vous adhéreriez à P&P, vous feriez une bonne œuvre, voir blog P&P, onglet adhésion), avec donc énormément de bénévolat, et qui animent le débat stratégique loin des grosses écuries et de la pensée convenue.
- parce que conformément à l'esprit de ces deux maisons, si le livre fait appel à des plumes confirmées, il y a aussi plein de jeunes à qui on donne leur chance de se faire connaître.
Vous aurez ci-dessous une description de l'ouvrage : pas seulement la quatrième de couverture, mais aussi quelques commentaires et explications, pour illustrer le besoin de pensée logistique. Ceux qui sont intéressés peuvent m'écrire (vous aurez un ouvrage dédicacé, veinards), ou alors commander directement sur le site de l'Harmattan : j'insiste, car si vous passez par Amazon, d'abord vous n’encouragez pas les petits éditeurs et en plus Amazon est très long dans ses livraisons car il fait tout peser sur les petits éditeurs (c'est notamment le cas pour l'OTAN : là aussi, écrivez-moi). Autrement dit, pour encourager la vitalité éditoriale, éviter de passer par les grosses machines....
Le colloque avait pour ambition de réunir chercheurs, militaires et entrepreneurs.
Pour comprendre la logistique dans les conflits contemporains, il fallait partir de l'histoire, grâce à l'excellente intervention de G. Lasconjarias (IRSEM). Le livre se poursuit par une réflexion théorique sur la logistique dans l'art de la guerre, donnée par B. Bihan (AGS).
Plusieurs cas ont alors été analysés pour illustrer le rôle de la logistique dans des conflits récents : Le CV (R) Heudeline montre l'importance de la log dans l'insurrection tamoule (et comment la destruction de cette ligne logistique entraîne la défaite des Tamouls) ; St. Taillat (AGS et CREC) évoque le cas irakien sous deux aspects, celui de la bataille des convois et de la bataille des ceintures ; le LCL Thépenier décrit son expérience au BCS en Afghanistan; et Cl; Major (SPW) rapelle les défis logistiques des opérations EUFOR.
La deuxième partie donne la parole aux professionnels : le col. Jacquement, chef du J4 du CPCO ; le CCL Legendre, responsable des externalisations à l'EMA; le col Guéguen, responsable du soutien au CFT de Lille ; Le GDI Pinaud, chef de la division SLI à l'EMA.
La troisième partie s'attache à explorer la réalisation conjointe de la logistique entre armée et privé : F. Brétaudeau, d'EADS, s'interroge sur la maîtrise de l'information logistique; le GCA Verhaeghe, directeur de la SIMMAD, évoque le MCO; L. Maury (Thalès) distingue la logistique et le soutien; l'IGA Dufour (DGA, SMO) parle du soutien initial commun. Enfin, Ch. Laroque (DCMAT) décrit les relations avec la NAMSA, l’agence spécialisée de l'OTAN.
La quatrième partie s'intéresse à la logistique privée et ses apports à la défense : GH Bricet des Vallons (institut Choiseul) décrit longuement le mécanisme d'externalisation américaine en Afghanistan, qui conduit à une perte de contrôle des opérations par l'armée américaine; le GDI Beyries (EDA) évoque le cas de CAPES France, l’externalisation maison pratiquée avec l’Économat des armées ; J. Aymé expose les procédures et l'ambition du GIE Access, qui réunit des PME françaises s'associant pour répondre aux marchés des organisations internationales, et tout d'abord de l'ONU; Ph P Dornier (Newton Vaureal) termine en évoquant la question des partenariats logistiques.
Outre la conclusion de Pierre Pascallon qui apporte son regard d'économiste, le lecteur appréciera deux bonus : tout d'abord une liste des acronymes ; ensuite et surtout une bibliographie qui est, à ma connaissance, la première établie sur le sujet.
Il y a ainsi énormément d'idées et de faits dans cet ouvrage. On peut risquer le mot de "référence" car c'est le seul livre récent (depuis Maurice Suire et ses "Comptes de la cuisinière", nous ne savons pas d'ouvrage stratégique sur la logistique) : autant dire qu'il intéressera :
- les spécialistes de la logistique militaire, qu'ils soient confirmés ou débutants
- les logisticiens civils, qui veulent soit s’inspirer de la logistique militaire, soit examiner les perspectives de marchés de sous-traitance
- les stratégistes généralistes qui souhaitent disposer d'une référence sur cet aspect, et qui ne se contentent pas des pages du Coutau-Bégarie finalement assez pauvres en la matière
- les fans d'égéa, d'AGS et de P&P qui ne seraient dans aucune des catégories précédentes
- les esprits généreux décidés à favoriser au hasard les "bonnes œuvres" (car cette ouvrage est une œuvre de grande qualité)
- et, comme il est marqué au dos de la plupart des ouvrages zarbis que vous feuilletez à la FNAC, le grand public cultivé qui s'intéresse au grandes questions du monde.
Quatrième de couverture
La logistique constitue une des trois fonctions stratégiques universelles avec le commandement et le renseignement. Méconnue, elle est toutefois intimement associée à la manœuvre interarmes. L’apparition des guerres industrielles est d’ailleurs allée de pair avec son développement. Les évolutions récentes l’amènent à répondre à deux traits essentiels, celui de l’internationalisation et celui de l’externalisation.
Pourtant, la logistique est bien souvent absente des débats stratégiques. C’est l’originalité du colloque La logistique, fonction opérationnelle oubliée ?, organisé en juin 2009 par le club Participation et progrès et Alliance géostratégique à l’École militaire. Il a voulu répondre à des questions permanentes (trop ou trop peu ? flux ou stocks ? à l’avant ou à l’arrière ? par armées ou conjointe ? interne à la défense ou externalisée ? publique ou privée ?) mais aussi aux questions nouvelles du contexte contemporain (projection, base de théâtre ou soutien de proximité ? front, ou espace lacunaire ? avec, contre ou au sein des populations ? nationale, ou internationalisée ? si oui, dans le cadre de dispositifs institutionnalisés (ONU, UE, OTAN) ou avec des structures ad hoc (coopération avec la nation hôte, avec les ONG…) ? étatique, par agence, ou par SMP ?).
C’est en fait la question de l’adaptation de la logistique à la guerre irrégulière qui est ainsi posée. Dans cette perspective, il semble que tous nos débats stratégiques oublient, le plus souvent, que la logistique devient de plus en plus une fonction opérationnelle majeure et est devenue le centre de gravité opératif, voire stratégique, des opérations aujourd’hui conduites, alors que dans le même temps elle devient le lieu des efforts de rationalisation.
Ont contribué à cet ouvrage :
- Julien Aymé, le commissaire général Philippe Beyries, Benoist Bihan (AGS), Francis Brétaudeau, Georges Bricet des Vallons, Philippe-Pierre Dornier, l'IGA Patrick Dufour, Hugues Eudeline, le colonel Philippe Guéguen, le colonel Jean-Luc Jacquement, Christian Laroque, Guillaume Lasconjarias, le commissaire-colonel Emmanuel Legendre, Olivier Kempf (AGS et P&P), Claudia Major, Laurent Maury, Pierre Pascallon (P&P), le général de division aérienne Michel Pinaud, Stéphane Taillat (AGS), le lieutenant-colonel Jean-Bernard Thépenier, le général de corps aérien Jean-Jacques Verhaege.
Références :
- présentation du colloque
- enseignements à chaud
- logistique maritime
La Logistique, fonction opérationnelle oubliée, sous la direction d’Olivier Kempf, 18 euros, 182 pages, ISBN : 978-2-296-56934-8
O. Kempf