halte a la destruction de la recherche scientifique
La recherche est un bien public essentiel pour comprendre l’univers dans lequel nous vivons, améliorer notre espérance de vie tout en nous permettant de développer nos moyens d’existence dans un monde écologiquement plus responsable. Or, la recherche va mal en France, La France est tombée à la quinzième position mondiale pour la dépense intérieure de recherche versus le PIB, d’après l’OCDE, et en vingt-sixième position (sur 32 classés) pour le budget civil de la recherche ! Nous sommes en butte à la fascination du chiffre, la réduction drastique des moyens alloués aux équipes de recherche, la distribution brouillonne des moyens, l’excès d’évaluation, le pilotage technocratique et une bureaucratie ubuesque. Nous accusons des réformes mal coordonnées et inefficaces depuis 5 ans, qui multiplient les accès à des financements dont les demandeurs ne comprennent pas la logique. Nous sommes opposés à la fermeture annoncée pour des raisons idéologiques des établissements scientifiques et techniques et au pilotage aberrant de la recherche qui n’a pas d’équivalent dans d’autres pays développés. Il est temps de se ressaisir et de recréer les conditions pour que la France puisse relever le défi et retrouver son rang. Nous savons que la population nous soutient, les sondages montrant combien les Français sont attachés à une recherche scientifique publique de qualité fiable et indépendante du pouvoir politique.
Nous souhaitons que les prochaines échéances électorales soient l’occasion de comparer les programmes des candidats et amener le monde scientifique à s’exprimer et mettre en garde contre une perte définitive de notre capacité d’innovation. Nous appelons les personnels de la recherche scientifique chercheurs, enseignants chercheurs, ITAs , étudiants à nous rejoindre.
Constatant que la politique d’évaluation et de financement est devenue catastrophique, nous exigeons de :
i) Supprimer l’AERES, superstructure sans équivalent qui croit pouvoir évaluer toute la recherche Française, toutes les équipes, les labos et les universités. Cette agence de notation style S&P est coûteuse, opaque, inefficace, composée de personnes cooptées à partir de critères obscurs qui ne sert à rien puisque 90 % des équipes sont classées A ou A+ avec peu ou pas d’incidence sur le financement. De nombreuses équipes en dépit d’excellentes notes à l’AERES sont peu ou pas financées et donc végètent. L’évaluation des laboratoires et chercheurs doit être assurée par les organismes de recherche (EPSTs) et les Universités (CNU). Il faut aussi stopper cette gabegie de structures LABEX, EQUIPEX IDEX etc.qui ont un coût exorbitant en temps et en argent et qui sont conservatrices par essence obéissant à des desiderata politiques. Ils permettent des effets d’annonce mais ne résolvent aucun des problèmes concrets sur le terrain. Le financement du Plan Campus doit se faire en plus des subventions de la recherche, pas en moins comme c’est le cas dans le programme actuel.
ii) Revoir le périmètre et le fonctionnement de l’Agence Nationale de la recherche (ANR) dont le fonctionnement a été épinglé à juste titre par la Cour des Comptes pour son coût de fonctionnement et d’administration. L’ANR doit être une structure souple de taille considérablement réduite qui travaille en étroite collaboration avec les EPSTs et Universités et qui est réservée aux priorités affichées par les pouvoirs publics dans des domaines bien définis (retour des chercheurs de l’étranger, jeunes équipes, valorisation de la recherche, gros équipements etc ). Ces budgets doivent pouvoir financer 25% du montant et des dossiers soumis car en deça de ce chiffre le taux de succès l’évaluation n’est pas fiable. Surtout, les EPSTs et Universités doivent pouvoir assurer un « financement de base » aux chercheurs et enseignant-chercheurs de qualité, le budget de l’ANR venant en plus de celui-ci. Ce financement de base permet la créativité et l’essaimage sachant que les grandes découvertes ne se font qu’à partir d’un certain volume de recherche de base. L’ANR ne doit pas se baser, sur des évaluations exclusives par des chercheurs étrangers car les aspects locaux ne peuvent être ignorés et la compétition internationale est souvent incompatible avec cette approche ; On n’a jamais vu des « study sections américaines » jugées uniquement par des chercheurs étrangers.
iii) Il faut arrêter le démantèlement des EPSTs au profit « soit disant » des Universités. Il faut, diminuer le nombre des campus universitaires -source d’économie et assurer une collaboration saine avec les EPSTs
iii) Ouvrir de nouvelles perspectives de travail à nos doctorants y compris en dehors de la recherche comme cela se fait dans les pays anglo-saxons. Trouver des affectations aux chercheurs et techniciens qui n’ont plus de financement.
iv) Il est impératif d’augmenter les postes mis au concours et abroger cette règle absurde et lourde de conséquences qui consiste à ne pas remplacer les départs en retraite par de jeunes chercheurs et techniciens aboutissant de facto à une exode de quelques uns de nos meilleurs espoirs. Nos laboratoires y compris les plus prestigieux doivent souvent travailler dans des conditions indignes sans aucune capacité leur permettant de tenir la compétition mondiale dans laquelle ils doivent s’inscrire.
v) Réduire le nombre de guichets, l’administration excessive qui les accompagne et simplifier la gestion de la recherche augmenterait notre compétitivité de plus de 30% sans aucun coût supplémentaire. Nous devons pouvoir ajuster l’utilisation de nos moyens en fonction des résultats que nous obtenons et cesser ce pilotage incompatible avec l’innovation qui consiste à prévoir dès le début du programme ce que nous allons découvrir !. Les conséquences néfastes sont nombreuses avec des chercheurs qui passent plus de temps à chercher des finances et à les gérer qu’à faire de la science, un recrutement pléthorique d’administratifs au détriment de chercheurs et ITAs et une fuite de cerveaux gravissime pour le futur. La recherche devient un paquebot de croisière sans capacité de manœuvre et d’adaptation.
Premiers signataires
Yehezkel Ben-Ari –neurobiologiste, fondateur de l’INMED à Marseille, grand prix INSERM 2009
Joel Bockaert, neurobiologiste fondateur de l’IGF à Montpellier et. membre de l’Académie des Sciences .
source
Vous aussi, signez la pétition
Cet appel tombe à pic : je m’étonnais justement auprès d’un ami chercheur de l’INRIA de ce qu’aucun candidat ne développait ce thème, alors qu’ils sont tous à courir après le thème de la ré-industrialisation. Comment peut-on dissocier les deux ? A moins que l’on ne veuille réintroduire des industries délocalisées qui ont fait la preuve de leur non rentabilité ?