Il y a quelque chose de pourri dans la gestion de notre agriculture. Après l’autorisation du Conseil d’Etat à la commercialisation des OGM Monsanto, l’UMP veut interdire aux agriculteurs de ressemer les graines issues de leur culture et la Commission Européenne veut autoriser à nouveau les farines animales.
La privatisation du vivant Cela m’a été signalé par un commentateur, et le blog économique et social, associé sur Marianne 2, a fait un excellent papier sur le sujet. Aujourd’hui, les espèces végétales créées par les laboratoires sont protégées par un COV, Certificat d’Obtention Végétale. Ce « brevet européen » interdit de ressemer les graines issues de la culture des agriculteurs pour garantir leurs revenus. Mais aujourd’hui, 50% des semences restent issues de la culture, ce que cette loi veut interdire.Bien sûr, il est légitime de garantir que ceux qui investissent dans la recherche en tire un profit. Néanmoins, cela pose un double problème. Tout d’abord, à un moment où les agriculteurs sont la variable d’ajustement des marchés et souffrent souvent très durement des variations de prix, au point de parfois voir leurs revenus temporairement disparaître, il paraît scandaleux de privilégier ainsi le droit des plus forts sur celui des plus faibles, qui n’auraient plus le droit d’utiliser le fruit de leur travail.
Ensuite, comme le remarque justement Eugène, le fait de ressemer contribue à la diversité des cultures en permettant à la nature de faire évoluer des semences, favorisant leur résistance et leur évolution. Cette privatisation de la nature pose de vrais risques écologiques. Bref, encore une fois, les grands groupes privés tirent leur épingle du jeu dans cette Europe qui semble conçue pour leur rendre service. Plus globalement, l’Etat devrait sans doute jouer un rôle plus grand dans ce domaine. Le retour des farines animalesC’est une des plus grandes monstruosités provoquées par la marchandisation à outrance de notre alimentation. Dans les années 1980, le recyclage des carcasses d’animaux en farines a créé une filière lucrative. A l’époque, personne ne semble s’être soucié de l’horreur de certaines pratiques : recyclage d’animaux malades, cannibalisme ou le fait de transformer des herbivores en charognards. Une bonne leçon sur les conséquences du laisser-faire. Et au bout du compte, ces horreurs ont produit la maladie dite de la vache folle, qui s’est transmise à l’homme. Assez logiquement, le commerce des farines animales a été interdit en conséquence. Mais bien évidemment, les intérêts économiques ont fini par reprendre le dessus. Et très logiquement, la Commission Européenne, toujours prompt à défendre les intérêts économiques des uns et des autres, a poussé l’idée, comme je l’avais déjà rapporté en août 2010. Bien sûr, on nous assure, la main sur le cœur, que les horreurs du passé ne seront pas répétées. Les animaux malades ne seront pas recyclés de la sorte. On ne transformera plus les herbivores en charognards et le cannibalisme ne sera pas autorisé. Le motif économique sera habilement utilisé. Mais la confiance est cassée sur ce sujet. Comment croire de telles institutions qui ont trop souvent montré qu’elles donnaient la priorité aux intérêts de l’argent et à la libéralisation sur tout le reste ? La réglementation de l’ensemencement des champs des agriculteurs (avec le propre fruit de leur travail) et l’autorisation des farines animales sont les produits d’une même marchandisation à outrance de notre alimentation. La logique ultime ? Que de grandes multinationales contrôlent toute la filière ?