L'enquête fouillée que vient de publier le New York Times sur les conditions de travail chez les sous-traitants chinois d'Apple suscite un grand émoi aux Etats-Unis. Les consommateurs (et les actionnaires du groupe) vont-ils réagir ?
Explosion en mai 2011 à l'usine Foxconn de Chengdu, sous-traitant d'Apple : 4 morts et 18 blessés publiée mercredi 25 janvier, étudie dans le détail les pratiques cautionnées par Apple en Chine, pays où sont fabriqués et assemblés les objets phares de la marque, l’iPod et l’iPad. Ouvriers surchargés de travail, conditions de vie difficiles, non respect des règles de sécurité… la liste des manquements au “code de conduite” d’Apple est longue.
Pour appuyer son propos, le quotidien américain cite des dizaines d’ouvriers et cadres de Foxconn, principal sous-traitant d’Apple en Chine. Il étaye également son enquête de plusieurs témoignages d’anciens responsables de la firme à la pomme, qui se montrent impitoyables.
Au travail 12 heures par jour, 6 jours sur 7
Difficile de dire exactement combien d’ouvriers travaillent pour Apple en Chine. ils sont “des millions”, avance le New York Times. Au moins 1,2 million rien qu’à Chengdu, qui vivent et travaillent dans des conditions parfois exécrables. 70 000 ouvriers sont toujours contraints de dormir dans des dortoirs ; la plupart dépassent le quotat de 60 heures de travail hebdomadaire.
Selon Lai Xiaodong, l’un des employés cités, la lumière “éblouissante” ne s’éteint jamais, les roulements se font 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Des panneaux “Travaillez dur maintenant ou vous lutterez pour chercher du travail demain” sont placardés sur les murs. Ce réparateur de machines travaille 6 jours par semaine. Il gagne 22 dollars par jour, soit 100 euros par semaine, mais avoue que c’est “davantage que de nombreux” collègues.
Des salariés d'une usine Foxconn (un des sous-traitants chinois d'Apple) protestent lors du meeting annuel de la firme à Hong-Kong, 18 mai 2011. Quatre morts et des dizaines de blessés en 2011
Le New York Times rappelle que l’an passé, deux explosions ont fait quatre morts et des dizaines de blessés à Chengdu, au sein d’une usine Foxconn. La poussière d’aluminium serait à l’origine de ces accidents, mais aucune enquête n’a permis d’en établir clairement les causes. D’autres ouvriers ont été contaminés au N-hexane, un solvant utilisé pour polir les écrans (interdit en Europe).
Interpellé par des ouvriers et des journalistes sur les conditions de vie dans ses usines, Foxconn a commencé à mettre en place un service de hotline à partir de 2008. Il n’est vraiment entré en marche qu’en 2010, après les suicides de plusieurs employés qui se sont défenestrés.
Une culture du secret qui rend les contrôles difficiles
“Les conditions de travail dans nos usines sont tout sauf difficiles”, se justifie Foxconn. L’entreprise affirme que tous les employés ont une pause d’une heure pour déjeuner et ont accès à des loisirs qu’elle leur propose. Selon elle, “seuls 5 % des ouvriers doivent se tenir debout en permanence pour travailler”. Des affirmations largement remises en cause par des témoignages recueillis par le journal.
Apple a bien un “code de conduite” pour ses sous-traitants, mais le New York Times estime que la marque ne se montre pas assez sévère avec eux. Sur des centaines de violations de son code de travail recensées au cours d’audits menés ces dernières années, seuls 15 contrats ont été rompus par Apple. Selon un ancien cadre de la firme, la marque à la pomme a l’obsession des réductions de coûts, aux dépens des ouvriers. “Changer les choses concrètement entre en contradiction avec les objectifs de secret et de rentabilité (d'Apple). Nous ne pouvons pas aller plus loin”.