Quand nous sommes cassés de l’intérieur pouvons-nous avancer? C’est une question qui m’est venue en tête en assistant à une projection de Detachment. A la base, j’étais partie sur l’idée de voir un film sur l’éducation avec James Caan. Oui vous me permettez d’avoir retenu en premier Sony ou le patron de la série Las Vegas et non pas le héros de Splice Adrien Brody dans mes petits papiers. Faut dire que le dernier Predator m’avait laissé des séquelles… alors je peinais un peu avec cet acteur. J’ai été étonnée et je reviens sur mon dégoût.
Detachment offre un rôle pessimiste de héros aux blessures familiales secrètes à Adrien Brody. Il apparaît un peu étrange, un peu largué, un peu trop souriant et un tantinet plus confiant que ses collègues professeurs dans les élèves. Sa position de professeur remplaçant l’aide à ne pas être réellement blasé par les circonstances et les divers protagonistes qui égrennent son chemin. Au fil des minutes, le réalisateur Tony Kaye pose un Henry Barthes surprenant tout en finesse. Les interrogations naissent: le grand-père aurait été incestueux? le suicide de sa mère serait-il lié à un drame? Son statut d’orphelin l’aurait-il brisé et fait perdre foi en l’humanité?
Tous les personnages ont des aspects décalés, ils portent tous un fardeau. Plusieurs acteurs sont connus pour jouer dans des série: Las Vegas, True blood, Ally Mc Beal, Les experts… L’intimité du regard à travers la caméra permet d’entrevoir une partie de leur univers à l’école et hors. Chaque personnage a son côté touchant: Lucy Liu en conseillère d’éducation, sublime Blythe Danner… Un lancinant constat sur l’éducation nationale, le rendement des résultats scolaires et les moyens se dévoilent. Les parents laissent leurs enfants désoeuvrés, seuls sans autre lien que les professeurs. Ils ne fixent plus de limites, autorisent tout, incendient les professeurs qui punissent leurs tendres progénitures. Les professeurs sont lâchés par le système.
La remarque qu’il n’existe aucun test pour devenir parent m’a fait sourire. Professeur, les études sont sensés formés aux conditions, aux dures réalités du terrain mais ils apprennent une grosse partie au jour le jour. Les parents n’ont pas tous les capacités à élever correctement leur progéniture, ni le niveau pour les pousser à étudier. Voir que certains lycéens rêvent d’avoir un enfant et de travailler à 16 ans sans aucun bagages interpellent. Le conseiller essaie de leur expliquer que les études offrent plus d’opportunités, sans succès.
L’école apparaît déserté, abandonné de sa substance. Les enseignants continuent à croire en leur métier, du moins ils tentent. Les étudiants se rebellent – non pas comme dans le film avec Pfeiffer- ils manquent de respect, sont brutes, malpolis, ont ce regard critique et méchant envers autrui… Ils sont largués, les deux jeunes femmes Sami Gayle (aka Erica) et Betty Kaye (Meredith) apportent un visage triste, désabusé et dur de la jeunesse. Toutes les deux cherchent à être aimé même au plus profond du trou. Tous les lycées souhaitent trouver leur place à leur manière maladroite. Les jeunes sont les premiers à partir du système.
Pour tous ses points, j’ai aimé Detachment, j’ai apprécié étrangement le ton mi-mélancolique mi-triste mi-pessimiste. Certes, c’est pas rose, c’est même plutôt alarmant le constat posé par Tony Kaye, il reflète une part des soucis qui se posent aussi en France. Selon le lieu, toutes les chances ne sont pas les mêmes. Le film parlera davantage aux parents. Je peux remarquer à l’échelle de la maternelle que le désintérêt des réunions est déjà présent. Les enfants commencent tôt à manquer de respect, à être livrer à eux-mêmes. L’école, le lycée, l’université ne devrait pas se substituer à l’éducation d’un parent, seulement tout le monde n’a pas les mêmes moyens ni la même connaissance. Je retiendrais la petite pointe d’espoir de fin, je ne la dévoilerai pas. J’ai juste envie de dire chapeau, chapeau à tous ses êtres qui continuent à se rendre aux collèges, lycées, écoles primaires ou maternelles pour aider nos enfants à avoir une éducation, à apprendre, à aimer découvrir le monde.
3 Moop raisons de voir Detachment:
Adrian Brody somptueux dans son rôle
Constat amer de l’éducation nationale aux Etats-Unis, une part se retrouve en France.
Des acteurs brillants
3 Moop raisons de fuir Detachment:
Marcia Gay Harden détachée un peu éloignée comme pour accentuer sur le malaise de son établissement
Detachment est pessimiste
Detachment est sombre
Note: 9/10