Rencontre sans langue de bois avec cette actrice, réalisatrice et scénariste française qui était l’invitée de la dernière Master Classe animée par Pascal Mérigeau au Forum des images.
La Master class de Sandrine Bonnaire par forumdesimages
« J’ai de moins en moins envie d’être actrice ». Voilà, tout est dit. C’est sur ce constat que celle qui gagne à seize ans le César du meilleur espoir féminin pour son premier rôle, celui de Suzanne dans À nos amours de Maurice Pialat, conclue cette Master Class. Celle-là même qui confirmera son talent inné pour l’acting en 1986 en recevant le César de la meilleure actrice pour son rôle de jeune marginale dans Sans toit ni loi d’Agnès Varda. Elle est, alors, la plus jeune comédienne à être distinguée dans cette catégorie. Elle n’a alors que 19 ans. « Peu de gens m’embarquent aujourd’hui. Je m’ennuie dans ce métier-là ». Sandrine Bonnaire à désormais 44 ans, et 29 années de carrière derrière elle.
Derrière elle ? Maurice Pialat, Claude Sautet, Claude Chabrol… Des réalisateurs inclassables qui ont construit son jeu, mais pas son caractère. « L’orgueil est un vrai poison. Pialat et moi en avions tous les deux ». Un orgueil qui la pousse à refuser de participer au tournage de Van Gogh pour lui préférer une collaboration avec Mastroiani. S’en suit, onze ans d’absence. Onze ans sans Pialat, son mentor. « Moi, j’ai une méthode, celle de Pialat. Ça me correspond, c’est juste. On ne peut pas me forcer à donner des choses que je n’ai pas envie de donner à ce moment là. Avec Pialat, on donne au bon moment ». Et le bon moment, ce fut À nos amours en 1980, alors que l’adolescente n’a encore aucune référence cinématographique. « C’est horrible, parce qu’il m’a fait un sacré beau cadeau et j’ai été incapable de lui dire merci. Il y avait comme un rejet. Ce n’était pas facile de se voir ». Ne pas se voir, mais plutôt regarder.
Voilà la nouvelle direction de Sandrine Bonnaire. SA direction. « J’aime diriger des acteurs. Diriger, c’est observer, c’est regarder, c’est sentir les choses, c’est les exprimer. » C’est aussi, aimer les acteurs, comme elle le prouve en 2007 avec son premier film, le documentaire Elle s’appelle Sabine, sur sa sœur autiste. « C’est ce que je reproche à Claude Sautet. Il était capricieux et je crois qu’il n’aimait pas les acteurs, à moins qu’il ne m’aimait pas moi ». L’amour de l’acteur qui lui fait poser un regard délicat et juste sur la souffrance, celle des familles concernées par l’autisme. « Ce sont des gens malmenés. J’ai voulu montrer la négligence, la négligence de l’Etat ». Artistiquement correct, politiquement incorrect, Sandrine Bonnaire reste entière. Applaudissements.
Prochaine Master Class, le samedi 25 février avec Jean-Jacques Annaud.