Après l’annonce de la validité de la candidature d’Abdoulaye Wade par le Conseil constitutionnel et les violences qui se sont produites dans le pays, les États-Unis appellent clairement le président sénégalais à renoncer à un troisième mandat. L’opposition et la société civile prévoyaient, elles, une nouvelle manifestation mardi 31 janvier, mais les autorités ont interdit ce rassemblement dans la capitale.
« Nous respectons le processus politique et légal et le fait qu'(Abdoulaye Wade) soit autorisé à briguer un nouveau mandat mais le message que nous lui adressons reste le même : l'attitude digne d'un chef d'État serait de céder la place à la prochaine génération ».
C’est en ces termes que la porte-parole du département d'État américain, Victoria Nuland, a réagi à l’annonce de la validité de la candidature du président sortant sénégalais, annoncée par le Conseil constitutionnel le 27 janvier.
« Nous sommes préoccupés par le fait que la décision du président Wade de solliciter un troisième mandat (…) pourrait mettre en péril la démocratie, le développement démocratique et la stabilité politique que le Sénégal a bâtis sur le continent au cours des décennies », a averti pour sa part William Burns, le secrétaire d'État adjoint américain, lundi 30 novembre.
"Cest trop tard, Wade est candidat"
Mais le ministre d'État et chargé de la communication du directoire de campagne du président, El Hadj Amadou Sall, ne l’entend pas de cette oreille. « Je réponds à nos amis américains que nous comprenons leur préoccupation, mais c'est trop tard, Abdoulaye Wade est candidat », a-t-il rétorqué lors d’une interview dans une émission de la chaîne privée sénégalaise Télévision Futurs médias (TFM, du groupe de presse de Youssou Ndour). « Il appartient au peuple sénégalais de se prononcer » a-t-il ajouté, précisant que « la candidature (du président actuel) a été déclarée propre et recevable par une institution constitutionnelle qui en a la compétence ».
La France a, de son côté, appelé au calme, et regretté que « toutes les sensibilités politiques ne puissent être représentées » à la présidentielle. Le nom de Youssou Ndour, star internationale dont la candidature a été rejetée par le Conseil constitutionnel, n’a pas été explicitement cité par Paris.
Alioune Tine libéré
Lors de la présidentielle du 26 février, face à Abdoulaye Wade, les candidats seront donc au nombre de treize, suite à la décision des juges, qui ont définitivement confirmé la validité de la candidature du chef de l’État sortant, le 29 janvier.
Les partis d’opposition et des ONG de la société civile regroupés au sein du Mouvement du 23 juin (M23), dénoncent depuis le 27 janvier un « coup d'État constitutionnel, prélude à un coup d'État électoral ». Le M23 a donc appelé à une nouvelle manifestation dans la capitale, place de l'Obélisque, ce mardi. Ce « sera un rassemblement pacifique pour continuer à protester contre l'inqualifiable et l'inacceptable validation de la candidature du président Wade par le Conseil constitutionnel », a affirmé Alioune Tine, coordonateur du M23, qui a été libéré lundi soir après avoir passé deux jours en détention, sans motif. « Tous les citoyens » sont appelés à y participer, précise-t-il.
Mais le gouvernement a réagi immédiatement, interdisant la manifestation prévue ce mardi. Le motif ? « Ses organisateurs n'ont pas fait de déclaration préalable comme l'exige la loi », a expliqué le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Abdoulaye Thiam.Si la manifestation venait à avoir lieu, les forces de sécurité seraient donc autorisées à disperser les manifestants dès qu'ils commenceront à se rassembler.
De quoi faire craindre de nouvelles violences, notamment suite à la mort de deux personnes à Podor (dans le nord du Sénégal) lundi 30 janvier, lors de manifestations hostiles au président, et d'un policier le 27 janvier à Dakar.
(Avec AFP)