Chez les candidats à la présidentielle, de gauche comme de droite, la chasse en meute contre les riches, les spéculateurs, les banques et plus généralement la planète financière est ouverte.
Par Michel de Poncins
Si l’on cherchait un fil conducteur général dans la Pensée Unique Totalitaire (P.U.T.), on trouverait en bonne place, parmi d’autres, le combat contre le capitalisme et les capitalistes. Les candidats réels ou présumés à l’élection présidentielle se donnent joyeusement la main en la matière.
François Hollande en a fait un cheval de bataille marquant. Il a fustigé publiquement la « planète financière » et projette de punir fortement les riches pour leur enlever de leur richesse dans une idée de redistribution. La France compte au moins cent impôts importants, ce qui est le double du nombre existant généralement ailleurs ; cette chape de plomb bouge en permanence et nous avons souvent dénoncé les effets négatifs de cette bougeotte perpétuelle. C’est dire la difficulté de tout chiffrage de son programme. Certains calculs aboutissent à constater que 15% de la population serait fortement agressées de diverses manières : droits de succession, ISF, impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, dividendes, taxes sur les bénéfices des banques et autres projets ; ces 15 % sont des créateurs : entrepreneurs, artistes, etc. Remarquons au passage que le candidat socialiste épargne soigneusement dans ses projets le monde politique alors que sur la toile apparaissent régulièrement les gains fabuleux et largement défiscalisés de tel ou tel Prince de la politique.
Du coté du pouvoir en place depuis non seulement 2007 mais aussi bien avant, la chasse aux riches et aux capitalistes est aussi ouverte. Lors de la sortie du programme Hollande, ce pouvoir rêve tout haut de la taxe Tobin ; faute d’oser la mettre en place avant d’autres pays, en France il recule. Dans sa furie taxatoire, il vient d’annoncer pour février une taxe spéciale à l’achat de toute action d’une entreprise française à quelqu’endroit dans le monde que cet achat se produise ; il faudra expliquer clairement ce qu’est une « entreprise française ». Au bout du processus, il y aura des délocalisations et une atteinte grave au marché financier de Paris.
Ce même pouvoir a, certes, organisé le bouclier fiscal. Toutefois le tableau global reste très négatif. Si l’impôt sur le revenu a été légèrement atténué une foule d’autres impôts ou pratiques administratives ont attaqué les riches. Le refus des fonds de pension aurait pu sauver les retraites et est le signe de la méfiance vis-à-vis du capital. Le rabotage des niches fiscales est présenté comme une mesure d’économie : c’est un mensonge car il en résulte de nouveaux impôts pour des gens qui y échappaient jusqu’ici.
Attaques contre les entreprises
Le président a popularisé les attaques contre les entreprises en proposant publiquement la règle du tiers des bénéfices : un tiers des bénéfices aux salariés, un tiers à l’investissement et un tiers aux actionnaires ; c’est une agression en règle, car non seulement en droit mais en bonne logique les actionnaires sont seuls juges de l’emploi de leurs bénéfices quand il en existe, au surplus, pour développer les entreprises seules capables de créer de la richesse et des emplois, il faut que les actionnaires s’enrichissent soit par capitalisation soit par des dividendes. Les racines de ces pratiques sont anciennes ; c’est le Général de Gaulle qui, le 17 août 1967, signait l’ordonnance instituant la participation des salariés aux bénéfices ; dans l’exposé des motifs, il était question de la « loi d’airain » du capitalisme (sic). Depuis lors le système dans la légendaire tradition « bourreaucratique » française est devenu très complexe, beaucoup de gouvernements ayant ajouté des tuyauteries à l’usine à gaz en construction.
Les gains des banquiers sont sur la sellette avec des techniques que le public ne comprend pas forcément : bonus, parachutes dorés, stock-options, primes de départ, retraites-chapeaux, etc. Tous ces termes font allusion à des contrats extrêmement compliqués et parfois incertains dans leurs effets. Exemple : des stock-options n’ont de la valeur que si le jour de l’exercice du droit à souscrire les actions, celles-ci ont elles-mêmes de la valeur ; de ce fait beaucoup de stock-options contractées il y a quelques années n’ont plus aucune valeur aujourd’hui.
Le fil conducteur de tous ces assauts est l’idée pour les politiques de se défausser de leur propre responsabilité dans la crise. À cette fin, ils accusent mensongèrement et pêle-mêle les banques, les spéculateurs, les capitalistes, les riches présentés comme des méchants. Ils n’hésitent pas à parler de « moraliser » le capitalisme, ce qui est surprenant pour des personnages ne se signalant pas toujours par un excès de moralité et ruinant les populations par leur luxueux carriérisme.
Les attaques contre le capitalisme trouvent aussi leurs sources dans l’ignorance de ces gens envers le rôle fondamental du capital qui est indissolublement lié au travail. Dans le Livre de la Genèse, on lit qu’Abel avait de beaux troupeaux ; c’était le premier capitaliste connu de l’histoire des hommes ; son frère Caïn au lieu de l’imiter trouva plus simple de le tuer : il était le premier socialiste connu.
Capital et travail
Pas de travail possible et continu sans capital et pas de capital fructueux sans force de travail. Bien entendu dans l’idéologie ambiante se trouvent les séquelles du marxisme avec la lutte des classes et l’idéologie égalitariste. Un des aspects de cette « P.U.T. » est la lutte contre les spéculateurs supposés à la racine de tous les maux. Voici une imposture de plus. Tout acte économique quel qu’il soit comporte une part de spéculation. L’acheteur d’un logement, certes, se préoccupe de savoir si le logement lui convient : il s’enquiert aussi des perspectives de la valeur dans les temps futurs. La spéculation est l’acte rationnel de quelqu’un qui organise à son profit le temps futur. Les spéculateurs sur les marchés financiers rendent grand service aux autres en prenant des risques que tout le monde ne peut assumer.
Les offensives contre les banques et leurs dirigeants font partie du tableau. Elles sont accusées à tort d’être à l’origine de la crise des subprimes. Or il est avéré que c’est le gouvernement américain qui les a amenées pour des raisons idéologiques à prêter à des gens qui n’avaient pas les moyens d’emprunter pour acheter leurs maison. Certes, par des pratiques complexes, elles ont diffusé les mauvaises créances dans le monde entier. Mais ici se retrouvent les politiques, car la Federal Reserve Bank américaine a inondé le système d’argent facile tout en jouant le rôle de prêteur en dernier ressort, ce qui poussait à la faute.
Le fait que les mastodontes bancaires soient des entreprises sans propriétaire défini et dirigées par des salariés de très haut niveau a facilité la catastrophe. Il est peu connu qu’en France une banque ancienne et de structure essentiellement familiale n’a pas eu de prêts toxiques lors de cette folle période. Il est évident que les banques devraient être libres de leurs activités sous la responsabilité sévère de leurs dirigeants.
En arrière plan se trouve le rêve insensé d’un capitalisme sans capital avec en conséquence la taxation de l’épargne. Or, c’est l’inverse qui doit être recherché. Le capital est l’ossature indispensable de l’enrichissement général. Une forte capitalisation des entreprises leur permet de se projeter dans l’avenir et de bien gérer le temps. IBM a failli succomber ayant raté le virage des petits ordinateurs. Elle a pu se reconvertir dans les services grâce au matelas financier accumulé pendant les périodes fastes.
Quelles sont les conséquences de cette chasse en meute contre les riches, les spéculateurs, les banques et plus généralement la planète financière ? L’énumération est courte mais désolante : chômage, panne irrémédiable de croissance, délocalisations, paupérisation et prospérité insolente des restos du cœur…
Il existe une route grande ouverte pour sortir du piège et je l’ai souvent décrite dans mes billets. Encore faut-il que quelqu’un de sincère et crédible veuille l’emprunter.