Le Versance, 75002 : restaurant chic et bon!

Publié le 31 janvier 2012 par Chrisos

Le Versance, restaurant
16 rue Feydeau 75002 Paris – Entrée par le 1 rue des Panoramas
Tél. : 01 45 08 00 08. Site Web.
Ouvert midi et soir du mardi au vendredi, et samedi soir.

Ouvert en 2006, situé entre la Bourse et les Grands Boulevards, le Versance,  restaurant du chef voyageur Samuel Cavagnis, propose une belle et bonne cuisine de gourmet dans un cadre agréable et relaxant. Formules déjeuner à 32€ (entrée+plat ou plat+dessert, dans les deux cas avec un verre de vin) et à 38€ (entrée+plat+dessert et un verre de vin). À la carte, entrée+plat+dessert dans une fourchette 60-80€. Les prix peuvent en effrayer plus d’un, mais ils sont nettement justifiés : bel espace entre les tables, service aux petits soins, et, le plus important, très de superbes assiettes, avec d’excellents produits, savant mélange de classique et d’inventif, avec l’utilisation fine et modérée de produits asiatiques. Très bien pour un déjeuner d’affaires ou pour fêter une belle occasion en couple ou entre amis.

Avis en vrac lus sur le Versance

Trois coeurs décernés par le FigaroScope fin 2006. Le FigaroScope en parle à nouveau en 2007, dans un dossier sur les cocottes. Alain Fusion aime beaucoup. Test Internaute en 2007 : « étoile montante », Miaam trouve le Versance très bien. L’Express en parle en 2008, le présentant comme l’anti Bigarrade, qu’ils trouvent surcotée. Le NemàlaChoucroute y mange début 2010.  Télérama lui attribue un « Bien » fin 2010. Olivia Ruiz en est fan. Nourritures terrestres et spirituelles, après y avoir mangé, en groupe, des plats pas forcément pour elle, veut y retourner pour y manger des plats à sa guise.

Trois couverts Michelin, deux toques Gault et Millau. Sur L’Internaute, sur CityVox, TripAdvisor, Qype, iTaste, presque tout le monde approuve, sauf un eu deux « malheureux » utilisateurs de SmartBox et LaFourchette (très beau 8.7/10). Unanimité positive sur Mmmm!!!.

Cinq ans de patience!

Pour ma part, cela fait depuis février 2007 que le Versance est dans ma wish-list. L et C y étaient allés il y quelques temps déjà et avaient apprécié. Le Versance restait dans ma liste, mais sans jamais trouver ni provoquer l’occasion d’y manger. La faute au quartier, et peut-être aussi à l’absence d’écho percutant depuis quelques temps, que ce soit dans la presse ou sur les blogs. Il aura fallu déménager Rive Droite, un carrot cake maison préparé par O pour attirer C (qui garde alors A pour la soirée) pour découvrir enfin le Versance. Parmi la short list d’adresse que j’ai proposées, c’est le Versance qu’elle choisit. Une fois décidés, nous avons de la chance, puisque nous réservons le jour même, pour le diner. Autant dire qu’il y avait à la fois beaucoup d’attentes et finalement pas beaucoup d’attente… Notons la possibilité, très pratique, de réserver en ligne (via LaFourchette).

Préliminaires

Après être allé voir à quoi ressemble Chez Plume (une rôtisserie-resto-rapide pour les bozos zobos et autres food martyrs de la rue des Martyrs : tarifs effrayants, pas d’intérêt pour moi, puisqu’à plus de 15 minutes à pied dma rue, qui compte pas moins de trois bouchers de tradition française, sans compter les hallals et autres exo-folkloriques), je retrouve O rue de Paradis et nous marchons ensemble vers les Grands Boulevards. Nous arrivons au Passage des Panoramas vers 19h30, avec une heure d’avance sur notre réservation. Nous nous occupons en goûtant les Gyozas du tout frais Gyoza Bar (intérêt discutable) puis en faisant un petit tour. Les gyozas terminés, il est 19h50, nous observons les derniers préparatifs avant la mise en place du soir. Un tour de Bourse et puis nous revoilà.

Versance, le sens

Une recherche sur internet nous apprend que la versance est une conduite (emportée). Disons que ça rime avec Astrance.

Accueil et service

Nous ne somme même pas les premiers arrivés! Nous donnons notre nom de réservation, laissons nos manteaux, bombe et parapluie au vestiaire, et sommes conduits à notre table, une belle table ronde très confortable pour deux, au rez-de-chaussée (le haut était quasi privatisé par un groupe, dont une table de six apparentée, et pas toujours distinguée, occupait également le rez-de chaussée). Nous déclinons l’apéritif, O demande une carafe d’eau, qui arrivera vite.

Tout au long du repas, le service sera attentif et bienveillant. Au départ un peu distant (tout à fait normal), nous discuterons un moment avec le directeur de salle en fin de repas : prendre l’addition en photo l’avait intrigué, nous avons alors « avoué » tenir des blogs qui parlent, entre autres de restaurant. C’est alors qu’il nous a dit, entre autres, beaucoup apprécier le style et la justesse de Mr. Lung, et qu’il aimerait bien qu’il visite bientôt le Versance pour lire son avis critique. Me demandant notre avis sur notre diner, nous lui avait donc qu’il était très bon. La seule réserve concernait la température des deux verres de vins, trop froide au début. Quant à l’a-priori sur les tarifs à la carte et le rapport qualité/prix, je lui ai avoué que c’était au départ une appréhension, mais qu’après ce dîner, l’addition relativement élevée se justifiait par la qualité des produits et des préparations servies, le cadre agréable et le service. O se verra même offrir un joli petit flacon de miel « maison » (ou plus exactement du miel de l’oncle du chef).

Versance, le Lieu

Le Versance s’appelait autrefois le « Petit Coin de la Bourse » (de Guy Girard, où travailla aussi le Maitre Cuisinier de France Guy Gâteau, qui passera ensuite chez Alain Chapel), une adresse très vingtième siècle qui connut son heure de glore dans les années 60-70-80. La décoration du Versance a été modernisée en 2006 par le Studio Marioton-Jones : des éléments d’époque (début du XXe siècle donc) ont été conservés, rénovés, et des ajouts contemporains judicieux les mettent en valeur en apportant un côté fonctionnel et pratique. Résultat chic et élégant : belle hauteur sous plafond, joli salon pour l’apéro ou le digestif, et agréable espace entre les tables. Le cadre est celui d’un restaurant de standing, on est très loin du bistrot. Mon appareil photo se fait vieux et ne réagit pas très bien le soir, lorsque la lumière est discrète, pour voir à quoi ça ressemble à l’intérieur, allez voir sur leur site.

À table, c’est cohérent avec le reste, belle nappe blanche épaisse et immaculée, couverts en argenterie, verres en cristal. Sous la jolie assiette de présentation en verre soufflé transparent, une feuille de fougère.

Le Chef du Versance : Samuel Cavagnis

Ce qui est certain, c’est que le chef, Samuel Cavagnis a vu le monde et du monde (un aperçu de son parcours sur LaRadioduGoût) avant de se fixer au Versance. Il a tenu un blog, les coulisses du Versance, sur lequel on peut retrouver quelques extraits de ses notes de voyage, et des photos de ce qu’était le Versance avant 2006.  Fan de cassoulet et membre de son académie. Il participe à cinq émissions de « Pas la peine de crier » fin 2010. Enfin, le chef est sur Qooq où il partage des recettes.

La carte

La carte propose pas mal de choix : cinq entrées (19-26€), une petite dizaine de plats (poissons et viandes, 27-39€) du fromage de chèvre M. Chevenet (11€), cinq desserts (une douzaine d’€uros). Pour la version en ligne, c’est ici ; pour la carte du diner du mercredi 25 janvier 2012, c’est là (et c’est un peu flou). Là encore, il y a le choix, on est bien dans un restaurant et pas un bistrot à la mode avec menu unique imposé par l’humeur du chef. Des produits nobles et de saison, des intitulés de plats détaillés, on sait où l’on va, ce qui rassure tout de suite.

Nous commandons nos entrées et plats, et je prends un verre de Viognier (6€), servi trop froid au début, mais plutôt agréable au bout de 5 minutes.

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Amuse bouche

Un velouté de chou-fleur ultra léger en texture (mais au goût bien marqué), sur une gelée de petits crustacés. Bon, précis, rafraichissant et tonifiant. Cela commence très bien.

Entrées

Soufflé suissesse au haddock, perles de hareng, mousseline de pommes de terre et œuf de caille (19€), servi copieusement dans une belle cocotte. Un soufflé suissesse? Un soufflé qui est démoulé à mi-cuisson, pour être terminé nappé de fromage (gruyère), sur un fond de crème fraîche [source : Roux]. L’œuf de caille est servi dans un œuf de poule et amélioré aux perles de harengs (œufs) et mousseline. Entre les deux, de très belles mouillettes. O se régale et est agréablement surprise par les quantités. C’est chaud, bon, consistant et assez ludique, avec une cuiller rose funky. On pioche à gauche à droite et miam! Une très belle entrée, originale et bien trouvée

Langoustines aux deux façon : en tartare au combawa et papaye, puis juste saisies aux épices et consommé au thé (25€). Je suis les conseils du serveur : commencer par le tartare pour laisser le temps aux crevettes dans le verre à cocktails de finir de cuire dans le consommé. Le tartare est délicieusement frais et intelligemment relevé par les fruits asiatiques, texture, saveurs, contrastes qui mettent bien en valeur la chair crue du crustacé. Très léger. Les deux langoustines « saisies » sont enrobées d’une très fine couche d’épices (et fine panure?) qui les relève judicieusement. Le consommé (de crustacés, sur fond de thé) est riche en saveurs et bien présent, mais avec très peu de matière grasses (on est loin de la bisque). En y repensant, le consommé était particulièrement concentré (peut-être même un petit peu trop à la fin, au fond du verre), ce qui laisse une touche un peu forte en bouche, une fois terminé. Rien de bien grave, mais je pense qu’il faut, une autre fois, soit ne pas terminé le fond du verre, soit garder une bouchée de langoustine pour après la dernière gorgée. Une entrée qui met bien en valeur les langoustines.

Plats

Je commande un verre de Chateauneuf du Pape blanc (16€). Comme pour le premier verre, dommage qu’il n’ait pas été servi quelques degrés moins frais. Une fois à bonne température, il était irrésistible.

Filet de biche, pomme Anna au coing et chorizo, crêpes de potiron et sauce betterave (39€, photo trop floue sans flash!) pour O. Biche bien cuite et tendre, bien mise en valeur par le lit de betteraves et la sauce betterave. Les pommes Anna seraient-elles une spécialité du quartier de la Bourse? J’en avais mangé au Café Moderne aussi! Cette fois, elles sont proposées en version revisitée, avec du coing et de fines tranches de chorizo (avec chips de betterave sur le dessus). Trois petites crêpes de potiron terminent le tableau aux couleurs automne-hiver. Une composition recherchée à la réalisation cohérente et au résultat concluant. Du classique revisité et enrichi d’idées malines et bien vues.

Cela faisait un moment que je n’avais plus mangé de ris de veau. La pomme de ris de veau croustillant café, crème de topinambour et chou pack-choï braisé (37€) était excellente. Le ris de veau cuit impeccablement, bien croustillant et incrusté de bris de graines café, apportant des petites touches croquantes qui renforcent le croustillant. L’intérieur du ris est moelleux, fondant, loin de tout sécheresse et d’amertume. Tout simplement savoureux. La petite pomme de terre farcie au jus de romarin, en forme de champignon, est une petite merveille, cuisson « à la limite » de la patate (juste équilibre entre encore un peu de consistante et fondant), et le jus est remarquablement bien dosé, ce qui s’échappera ira agréablement finir de parfumé et de relever le ris. Le topinambour et le chou apportent une touche de saison végétale. La crème est impeccable et le chou apporte texture et peps à ce plat. Si j’ai préféré l’entrée d’O à la mienne au premier round (plus original et surprenant), je me suis réjouis de mon choix pour le plat.

Desserts

O n’a plus très faim, je lui force un peu la main en suggérant de partager deux desserts. Nous ferons presque du moitié/moitié.

Escapade à la fête foraine : gaufres; banane et noix de coco, sauce chocolat (12€). Vue d’un angle un peu différent. Dire qu’au début je pensais qu’il ne s’agissait que de gaufres! Belle surprise. Barbe à papa rose, gaufres, beau chocolat chaud, mini pomme d’amour (à la banane), entremet banane et fins morceaux de noix de coco, c’est en effet la fête! Un dessert feu d’artifice, joli, ludique, qui fait plaisir à voir. Plaisir des yeux, mais aussi du nez et du palais. Idée simple en soi, mais magistralement interprétée et réalisée. On ne peut pas s’empêcher de penser aux desserts de l’Assiette Champenoise (déjeuner de janvier 2009).

Pain perdu et mangue fraiche, glace au yaourt et mousse de lait de chèvre (12€) : moins spectaculaire que l’escapade, mais redoutablement efficace et réussi. Un beau morceau de pain perdu bien épais, savoureux mais pas écœurant du tout, très habilement allégé par quelques morceaux de mangue juste mure et fraiche, un incroyable cylindre de glace au yaourt (qui vaut bien Grom). La fine mousse de lait de chèvre aère encore l’ensemble, mais ne tient pas très longtemps. Un autre dessert régressif malin. Le chef sait jouer sur les cordes sensibles et c’est diablement réussi. Égalité pour les deux desserts. Quand je pense que ces deux merveilles sont proposées à 12€ chacun et que les desserts de la Maison d’Aubrac, à près de 10€ chacun étaient à des centaines de kilomètres de ceux-ci, je ne peux pas m’empêcher de trouver le rapport qualité prix du Versance très bon!

La carte des cafés et infusions nous est proposée, avec un texte, sur deux pages intéressantes décrivant le chef et son parcours (également disponible et plus lisible en ligne, sur le site du Versance). Il commence à se faire tard, nous ne sommes toujours pas café, et nous faisons l’impasse sur une tisane, même si la carte est alléchante.

Un petit granité aux agrumes termine ce très bon diner. Une judicieuse touche de fraicheur et de légèreté. Car, si, pris séparément, chaque entrée, plat ou dessert est bien dimensionné, léger mais copieux, lorsque l’on met tout cela bout à bout, c’est un repas complet, plus qu’honorable!

Bilan-Conclusion

166€ pour ce très bon diner, soit une moyenne de 83€/personne, pour entrée+plat+dessert chacun, une carafe d’eau et deux verres de vin blanc pour moi. Pas donné au point de revenir y diner toutes les semaines, mais tout à fait logique lorsque l’on tient compte du lieu, du cadre, de l’assiette et du service. Le Versance ne nous a pas déçus, la soirée fut excellente (merci!). Je ne peux pas m’empêcher de comparer le Versance à l’Arôme (qui a une étoile Michelin). Certes, je ne vais plus à l’Arôme depuis juillet 2009 et la baisse de la TVA. Je ne suis peut être pas encore assez critique pour le Versance (ça viendra avec plus de visites), mais je trouve qu’on y mange aussi bien qu’à l’Arôme (en tout cas à l’époque où j’y allais), et qu’en plus le cadre y est plus agréable (moins d’avidité au Versance) et le service plus rassurant. On n’est pas si loin d’un Auguste, lui aussi étoilé. Est-ce ce côté restaurant, rassurant, et non bistrot qui bloque le guide rouge qui essaie de surfer sur les modes du moment?

Le Versance est un endroit attachant, où l’on se sent vite en confiance, confortable et à l’aise. J’espère y retourner bientôt. En tout cas je ne laisserai pas passer cinq ans de plus avant d’y manger à nouveau!

Rédigé par chrisos