Le quinquennat de Sarkozy a démarré sur le yacht de Bolloré et se termine en pirogue
De notre envoyé spécial à Marseille :
Dans quelques semaines, du 6 au 17 mars, va se tenir àMarseille, sous l’égide du Conseil mondial de l’eau, le 6ème Forummondial de l’eau. Quelque 25 000 personnes venant du monde entier sontattendues dans la cité phocéenne. En pleine campagne électorale des présidentielles,on pourrait craindre que cette manifestation passe quelque peu inaperçue.Pourtant…On ne peut évidemment pas passer sous silence un tel évènement.Mais avant de dire pourquoi, il est indispensable de bien rappeler ce qu’est le« Conseil mondial de l’eau », quel est son rôle et quels sont lesenjeux du « Forum mondial de l’eau » qu’il organise. Conseil mondialde l’eau : dit comme cela, ça fait vraiment très important, très officiel.Ça ressemble à une organisation internationale. Ça a la saveur d’uneorganisation internationale. Ça a toutes les apparences et le discours d’uneorganisation internationale, comme par exemple l’Unesco ou l’Unicef… Mais, sousces apparences de respectabilité et de légitimité, c’est un organisme tout cequ’il y a de plus privé au service d’intérêts privés.
Le Conseilmondial de l’eau (CME), c’est un rassemblement auquel participent cependant des ONG, lesgouvernements d’une cinquantaine de pays et des organisations internationales,au motif vertueux de résoudre les problèmes de l’eau dans le monde. Son siège est à Marseille et son président,M. Loïc Fauchon, se trouve être également – hasard de l’existence – celui de la Société des Eaux de Marseille,filiale de Veolia. Cet organisme privé qui s’autoproclame « responsable de l’avenir de l’eau dansle monde » entendrait dicter à l’ensemble des pays de la planète desorientations et des recommandations dont on a constaté au travers des diversesinterventions des participants au dernier Forum mondial de l’eau d’Istanbul, en2009, qu’elles s’accordaient aux vues et aux intérêts des grandesmultinationales de l’eau. À titre d’exemple, le Conseil mondial de l’eau arefusé d’entériner la notion de droit à l’accès à l’eau lors de ce dernierForum. Sont notamment membres du CME, Veolia, Suez-Lyonnaise des Eaux, Fédérationprofessionnelle des entreprises de l’Eau (FP2E), Groupe Genoyer, Évian, Volvic,Sources internationales, Degremont, Areva, Price Waterhouse, Coopers Advisory(expertise financière), etc.
Ceci énoncé, il apparaît dès lors comme une évidence quece « Conseil mondial de l’eau » et son forum ne sont que le faux-nezdes multinationales de l’eau. Et leur outil, sous couvert d’expertise et desavoir-faire, pour mettre la main sur l’eau partout dans le monde où des Étatssont prêts à leur ouvrir les portes de ces juteux marchés. Il n’est alors pasdifficile de comprendre pourquoi s’est mis en place depuis quelques années, le Forum alternatif mondial de l’eau (FAME),l’équivalent de ce qu’est au Forum de Davos, le Forum social mondial en termesde développement économique altermondialiste. Le FAME se tiendra aux mêmesdates, également à Marseille.
Il est organisé par plusieurs dizainesd'associations, de syndicats et d'élus de nombreux pays, pour qui « l'eau, patrimoine commun de l’humanité,n’est pas une marchandise ». Le FAME veut donner la parole àtous ceux qui, partout dans le monde, «se battent contre l'accaparement del'eau et des terres, pour la protection des sources, contre la pollution et lasurexploitation, contre la privatisation de l'eau et de l'assainissement parles multinationales ».Rappelons enfin qu’aujourd’hui encore, un milliard d’êtreshumains sur terre n’ont pas accès à l’eau potable. Trois milliards vivent sansassainissement. Chaque année, 1 800 000 meurent de maladies qui sont la conséquencede la consommation d’eau souillée. Les enjeux humanitaires sont donc de taille,et nous serons très attentifs aux travaux du FAME.
Mais revenons au 6ème Forum mondial de l’eau.À ce grand raout, se retrouvera bien entendu tout le gratin néolibéral du trèsbranché « capitalisme vert ». À commencer par le sémillant SergeLepeltier, maire de Bourges, ancien ministre de l’Écologie et du Développementdurable de 2004 à 2005 dans le gouvernement Raffarin III, ci-devant Ambassadeurdu climat de sa Majesté Nicolas Ier. Après vous, Excellence ! On devraitsans doute y rencontrer aussi Nathalie Kosciusko-Morizet, l’actuelle ministrede l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement enfinremise de son excursion en pirogue sur le Maroni ; ainsi que notre phénix nationaldu Grenelle de l’Environnement : j’ai nommé Jean-Louis « Bord l'eau », le repiqueur decorail. Ce fameux Grenelle de l’Environnement, Himalaya de l’attrape-gogos quia accouché d’une souris verte ; coproduit avec le bonimenteur de l’Élyséeavant que ce dernier ne déclare, excédé, aux acteurs de l’agro-industrie :« l’Environnement, ça commence à bienfaire ! ». Allez, circulez les Verts !À ce 6ème Forum mondial de l’eau, la listedes visiteurs de marque n’est pas close. Il se dit qu’on devrait également ycroiser un certain nombre de candidats à la présidentielle, et non des moindres...Pour les noms de ces derniers, les paris sont ouverts. À vous de jouer !Et à bon entendeur, salut !
H. DezeauxEnvoyé spécial